Depuis le 2 juillet 2018, se déroule pour la première fois à Diffa, à l’extrême Est du Niger, le procès des présumés terroristes de Boko Haram. Un procès qui se tient au cours d’une audience foraine à laquelle assistent massivement les populations locales, victimes des actes terroristes perpétrés par ce groupe extrémiste.
La particularité de cette audience foraine, explique Chaibou Samna, Procureur du Pôle Anti-terroriste, « c’est que le procès se déroule en présence des populations, qui observent les conditions dans lesquelles il se tient ». Une façon poursuit ce dernier, de permettre à ces populations d’apprécier le déroulement de procès qui ont débuté en mars 2017 à Niamey, à quelques 1 500 km de Diffa, et dont les audiences concernent quelques 1 300 présumés membres de Boko Haram.
Ce procès, qui se déroule sous haute surveillance, compte tenue de la fragilité du contexte sécuritaire dans la région, est une première à Diffa. Il concerne, à titre pédagogique, une cinquantaine de prévenus, accusés « d’association de malfaiteurs et de participation à une entreprise terroriste ».
Créer la confiance
L’objectif de la tenue de ce procès, délocalisé, est de contribuer à baisser le niveau d’inquiétude au sein des populations et à prévenir les tensions, tout en facilitant la réinsertion éventuelle, au sein de leurs communautés, de ceux qui viendraient à être libérés.
En l’occurrence, il permettrait d’éviter les actes de vengeances et de représailles à l’encontre de ces derniers.
C’est pourquoi, il y a lieu de comprendre qu’à travers la délocalisation de ce procès, qui est en phase pilote, l’Etat du Niger veut démontrer à la fois son engagement pour le respect des textes juridiques internationaux, régionaux et nationaux, mais également sa volonté de créer la confiance entre la justice et les justiciables.
À l’heure actuelle, ce procès se déroule normalement et s’est poursuivi normalement jusqu’au 8 juillet au niveau du tribunal de grande instance de Diffa.
Pour rappel, le groupe terroriste Boko Haram qui sévissait alors au Nigeria, a fait ses premières attaques au Niger, le 6 février 2015 contre les localités de Diffa et Bosso.
Depuis lors, les attaques se sont multipliés, visant essentiellement les forces de Défense et de Sécurité du Niger mais aussi les populations civiles.
Il est aussi important de souligner qu’au Niger, il n’existe que 4 juges spécialisés en matière de lutte contre le terrorisme qui sont repartis en quatre pôles judiciaires spécialisés en matière de terrorisme et ce sont ses juges qui s’occuperont des dossiers de prévenus qui dépassent les 1 300 personnes. À cette date, il n’existe aucune association de victimes au Niger. Depuis, le début de ces procès en mars 2017, les condamnations varient entre 2 et 10 ans d’emprisonnement. Mais, il se trouve aussi que beaucoup ont été acquitté pour insuffisance de preuves démontrant leurs liens avec Boko Haram.
D’autres ont été acquitté par le juge parce qu’ils ont passés plus de deux ans sous mandat de dépôt sans être jugé. Or, selon la loi nigériene, on ne peut pas garder une personne pendant plus de deux ans avant de la juger. Dans une telle situation, dès qu’ils sont présentés au juge, il n’a d’autre choix que de les libérer en application de la loi.Enfin, l’implication de bout en bout de la population dans la tenue de ce procès est une recette importante qui contribuera à calmer les esprits des populations affectées par cette crise et ouvrira certainement la voie vers la pacification de la région avec une meilleure réinsertion des personnes libérées au sein de leurs communautés respectives.