Dans l'histoire de la justice, jamais crime de masse n’aura été autant jugé que le génocide des Tutsis du Rwanda, perpétré en 1994. Ni peut-être dans autant de lieux. Le Rwanda a créé plus de 12 000 tribunaux pour que personne n’échappe à sa part de responsabilité. Plus d’un million d’individus y ont été jugés. Tandis qu’un tribunal international installé par l’Onu a contribué à poursuivre les plus hauts responsables et qu’une dizaine de pays occidentaux ont également mené quelques procès symboliques. Et la tâche est sans fin.
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Quand le Front patriotique rwandais (FPR) prend le pouvoir à Kigali, en juillet 1994, le système judiciaire n'existe plus. La plupart des magistrats ont été tués, d'autres sont partis en exil. Il n'y a plus ni gendarmerie, ni police judiciaire, ni structures judiciaires. Quelques semaines plus tard, les cachots communaux, les prisons à peine réhabilitées et d'autres centres de détention improvisés regorgent de dizaines de milliers de personnes accusées d'avoir participé au génocide des Tutsis – 600 000 à 1 million de morts, selon les estimations, entre avril et juillet 1994.
Deux ans plus tard, le Rwanda publie « la loi organique du 30 août 1996 sur l'organisation des poursuites des infractions constitutives du crime de génocide ou de crimes contre l'humanité, commises entre 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 ». Il se dote ainsi d’une compétence temporelle plus vaste que celle du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), créé au lendemain du génocide par les Nations unies et qui ne couvre que la période du 1er janvier au 31 décembre 1994.
Sur l'histoire du génocide, deux opinions divergent quant à son commencement. Alors que la communauté internationale considère que le génocide des Tutsis a été perpétré à partir du 6 avril 1994, après l'assassinat du président hutu Juvénal Habyarimana, les nouvelles autorités rwandaises affirment, de leur côté, que les pogroms anti-Tutsis, organisés dès le déclenchement de la rébellion du FPR, en octobre 1990, font partie d'un plan génocidaire en place depuis de longues années.
Affaires Emblématiques
Rwanda, TPIR, Belgique, France, Suisse : quelques procès emblématiques sur le génocide au Rwanda.
Colonel Theoneste Bagosora, Directeur de cabinet du ministère de la Défense
Le génocide perpétré au Rwanda en 1994 n’a pas d’Hitler, de Staline ou de Pol Pot. Un homme a pourtant été présenté comme « le cerveau » du génocide : le colonel Théoneste Bagosora, qui était, en avril 1994, le directeur de cabinet du ministère de la Défense. Un moment rarement évoqué de son procès fut celui où, sous les questions de son propre avocat, Bagosora a reconnu que, « à un moment donné, les Tutsis étaient tués parce qu’ils étaient tutsis » – une véritable reconnaissance du génocide. Ce « moment », Bagosora a estimé qu’il a eu lieu à partir du 12 avril.
Un autre aspect de son procès n’a pas retenu suffisamment l’attention. Le jugement de première instance, rendu le 18 décembre 2008, est sans doute le document le plus précis, le plus complet et le plus troublant dans lequel les juges du TPIR ont examiné et analysé les événements précédant le génocide et ceux qui ont accompagné son déclenchement. Bagosora est reconnu coupable de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Mais il ne l’est que sur trois jours – du 6 au 9 avril – et seulement en tant que supérieur hiérarchique. Pour un « cerveau » de l’extermination, c’est bien maigre. Trois ans plus tard, la chambre d’appel, tout en effaçant toutes les nuances de ce jugement, réduit la sentence à une peine de 35 ans d’emprisonnement. Mais l’avocat du colonel pourra souligner que les décisions judiciaires du tribunal international ont, de facto, signé « l’écroulement du mythe du cerveau » du génocide, rendant l’histoire de l’extermination des Tutsis au Rwanda plus singulière encore. En savoir plus
Jean-Paul Akayesu, Premier homme condamné pour génocide par un tribunal international
C’est l’histoire d’un homme dont le destin aura été de porter des habits bien plus grands que ceux qu’il avait portés dans sa vie. Jean-Paul Akayesu, ancien enseignant et maire de la commune de Taba, au centre du Rwanda, est le premier homme à avoir été condamné pour génocide par un tribunal international, le 2 septembre 1998.
Selon tous les témoignages entendus au cours de son procès, Akayesu a d’abord résisté, pendant deux semaines et avec l’aide de seulement huit policiers communaux, aux attaques des miliciens génocidaires. Puis, au retour d’une grande réunion du gouvernement avec les élus locaux, le 18 avril, tout a basculé. Akayesu s’est allié au chef local des miliciens Interahamwe et lu des listes de personnes vouées à la mort si elles étaient débusquées. Il a également tourné le dos ou encouragé les violences sexuelles commises jusque dans l’enceinte du bureau communal. Pour le procureur, l’histoire d’Akayesu fut celle d’une « trahison ».
Aujourd’hui, le jugement Akayesu est enseigné partout en droit pénal international et il est le symbole de la reconnaissance du viol comme arme de guerre et comme arme du génocide. En savoir plus
Jean Kambanda, Il plaide coupable de génocide, puis renie ses aveux
Le 8 avril 1994, une escorte militaire vient chercher Jean Kambanda à son domicile dans Kigali, la capitale rwandaise déjà soumise aux tueurs. Le lendemain, il prête serment comme Premier ministre d’un gouvernement intérimaire qui va présider au génocide des Tutsis du Rwanda et à l’assassinat des Hutus s’opposant aux massacres et au « Hutu Power ». Arrêté au Kenya en 1997, il est brandi l’année suivante comme un retentissant succès du TPIR : au cours d’une audience inoubliable d’intensité, il plaide coupable de génocide.
Mais rapidement, cet « aveu » va s’avérer des plus ambigus et controversés. Quelques années plus tard, le bureau du procureur avouera avoir dissimulé aux juges la véritable nature de la reconnaissance des faits par Kambanda car elle aurait risqué de mettre en doute sa sincérité. Kambanda, annoncé comme un témoin clé contre ses anciens acolytes, reniera (en vain) ses aveux et ne se présentera jamais comme le grand témoin à charge qu’on attendait. Ayant espéré éviter la prison à perpétuité et n’y ayant pas échappé, il apparaît en réalité davantage comme le perdant d’un marché judiciaire de dupes que le trophée annoncé de la justice internationale.
Pauline Nyiramasuhuko, Seule femme reconnue coupable de génocide par un tribunal international
Ancienne ministre de la Famille et de la promotion féminine dans le gouvernement rwandais aux affaires entre avril et juillet 1994, Pauline Nyiramasuhuko est la seule femme à avoir été condamnée par le TPIR et la seule femme à avoir été reconnue coupable de génocide par un tribunal international. Cela suffirait à lui donner une place à part dans l’histoire de la justice pénale internationale. Mais son procès présente également un certain nombre de records peu enviables.
Jugée en compagnie de cinq autres Rwandais, dont son propre fils, cette affaire aura été la plus longue des procès contemporains pour crimes internationaux : quinze ans, entre l’ouverture des débats au fond et le jugement en appel. Pire : deux de ses co-accusés auront passé plus de vingt ans en prison avant de connaître leur sentence définitive. Le « dossier Butare », comme il était désigné, du nom de la région du sud du Rwanda où avaient agi les accusés, demeure un symbole des dysfonctionnements et des dérapages du TPIR.
Froduald Karamira, Un symbole de l’idéologie du « Hutu Power »
Lorsqu’il se trouve dans la salle de transit de l’aéroport d’Addis-Abeba, en Ethiopie, ce jour de juin 1996, en passe d’être embarqué sur un vol à destination de Kigali, Froduald Karamira sait qu’il doit tenter le tout pour le tout. Il s’échappe. Vite rattrapé par la police éthiopienne, il est suspendu pendant deux semaines à l’issue d’un bras de fer entre le jeune TPIR et les autorités rwandaises. Finalement, le tribunal de l’Onu, soucieux d’obtenir la coopération du gouvernement rwandais, cède. Karamira atterrit sur sa terre natale pour y être jugé.
Son nom est un symbole de l’idéologie du « Hutu Power » puisqu’on lui attribue la paternité de cette expression qui va souder les tenants de l’extrémisme hutu. Cet homme politique, ancien vice-président du Mouvement démocratique républicain (MDR), un parti d’opposition démocratique qui va se scinder entre partisans et opposants au Hutu Power, est la plus grande prise du gouvernement rwandais parmi les figures du génocide. En janvier 1997, il est l’un des premiers à être jugé par la justice rwandaise. Le 14 février, il est condamné à la peine de mort. Et le 24 avril 1998, il fait partie d’une vingtaine de condamnés pour génocide à être exécutés. Ce seront les seules exécutions judiciaires dans le Rwanda d’après génocide.
Valérie Bémériki, Une voix ancrées dans les mémoires
On a souvent raconté que, aux barrières où ils massacraient les Tutsis ou tous ceux qu’ils soupçonnaient comme tels, les miliciens et les civils qui les aidaient dans leur besogne avaient une machette dans une main et une radio dans l’autre. Le rôle de la Radio des mille collines (RTLM) dans la montée de la violence, à partir de juillet 1993 quand elle est créée, et dans l’efficacité des massacres à partir du 6 avril, est un souvenir majeur du crime. Deux voix, sans doute, sont restées ancrées dans les mémoires : celle, sur le ton du sarcasme et du jeu macabre, de Kantano Habimana et celle, versant davantage dans l’hystérie, de Valérie Bémériki. Kantano est mort rapidement dans les camps de réfugiés au Congo (ex-Zaïre). Bémériki a été arrêtée dans l’est de la République démocratique du Congo en juin 1999 et ramenée au Rwanda. Dans sa tenue rose de prisonnière, le crâne rasé, elle est régulièrement interviewée par les journalistes et a témoigné pour l’accusation, dans des procédures au TPIR et en France. En décembre 2009, elle est condamnée à la perpétuité par un tribunal gacaca de Kigali pour planification du génocide, incitation au génocide et complicité d’assassinats. Le seul autre animateur de la tristement fameuse station à avoir été condamné est l’Italo-Belge Georges Ruggiu, condamné par le TPIR à 12 ans de prison après avoir plaidé coupable.
Mgr Augustin Misago, Le plus haut responsable de l’Eglise catholique jugé au Rwanda
La très puissante Eglise catholique du Rwanda est accusée de porter une lourde responsabilité dans le génocide de 1994. Plusieurs églises à travers le pays ont en effet été travesties en lieux de massacre, dont certains à l’instigation de responsables religieux. Le plus haut responsable de l’Eglise catholique jugé au Rwanda en rapport avec le génocide des Tutsis est l’ex-évêque de Gikongoro (sud-ouest du pays), Augustin Misago.
Le prélat est arrêté à l’entrée de Kigali, dans la matinée du 14 avril 1999, une semaine après avoir été publiquement mis en cause par le président Pasteur Bizimungu. Mgr Misago est notamment accusé de n’avoir rien fait pour protéger des fidèles, y compris certains prêtres tutsis tués pendant le génocide. En juin 2000, il est acquitté par la chambre spécialisée du Tribunal de première instance de Kigali. Après un bref séjour à Rome, il reprend ses fonctions ecclésiastiques. Dans la matinée du 12 mars 2012, alors qu’il se trouve dans sa 69ème année, l’évêque est retrouvé sans vie dans son bureau.
Léon Mugesera, Un discours qui appelle au génocide des Tutsis
Brillant linguiste, Léon Mugesera est surtout connu pour son discours du 22 novembre 1992, à Kabaya, dans le nord du Rwanda. Mugesera est alors un membre important du parti présidentiel, le MRND, dont il est le vice-président pour la préfecture de Gisenyi, au nord-est du Rwanda. Il enseigne également à l’Université nationale du Rwanda. Ce jour-là, il suscite une vague de réprobation au sein de la classe politique rwandaise pour avoir indiqué que les Tutsis devraient être renvoyés « chez eux » par le cours de la rivière Nyabarongo. Contraint à l’exil, Mugesera atterrit au Canada. Mais son discours le poursuit. Après des années de procédure, il est finalement extradé au Rwanda, où il est jugé et condamné à la perpétuité, le 15 avril 2016. Les juges concluront que le discours de Kabaya était un appel au génocide des Tutsis, qui allait avoir lieu deux ans plus tard. En savoir plus
Soeur Gertrude et Soeur Marie-Kizito, Coupables d’avoir livré aux tueurs entre 6000 et 7000 Tutsis
Les religieuses Consolata Mukangango (Soeur Gertrude) et Julienne Mukabutera (Soeur Marie- Kizito) sont jugées en compagnie de deux hommes dans le premier procès tenu en Belgique sur le génocide des Tutsis au Rwanda. Au moment des faits, Sœur Gertrude était la supérieure du monastère de Sovu, à Butare (sud), où vivait également Sœur Marie-Kizito. Le 8 juin 2001, les Bénédictines sont reconnues coupables d’avoir livré aux tueurs entre 6000 et 7000 Tutsis qui étaient venus chercher refuge au monastère, entre avril et mai 1994. Condamnées respectivement à 15 ans et 12 ans de prison, elles sont aujourd’hui libres.
Le major Bernard Ntuyahaga, Impliqué dans l’assassinat de dix casques bleus belges
Au lendemain du génocide, tout le monde veut mettre la main sur le major Bernard Ntuyahaga. La justice belge le cherche car elle l’accuse d’avoir joué un rôle important dans l’assassinat de dix casques bleus belges, à Kigali, le 7 avril 1994. La justice rwandaise le voudrait bien aussi. Craignant l’une et l’autre de ces justices, l’officier quitte son refuge en Zambie et décide de se livrer au TPIR, à Arusha, en juin 1998. Le tribunal international met quelques temps à décider si oui ou non il souhaite le juger. Un acte d’accusation est dressé, puis il est retiré. Ntuyahaga en reste pas libre longtemps. Il fait l’objet d’une âpre bataille judiciaire entre la Belgique et le Rwanda, qui tourne à l’avantage de la Belgique, en 2004. Le 5 juillet 2007, il est condamné à vingt ans de prison pour son implication dans l’assassinat des militaires belges. A sa sortie de prison, en mai 2018, il est placé en centre fermé à Bruxelles. La Belgique n’en a pas fini avec lui. En décembre, il est expulsé vers son pays d’origine,le Rwanda. Où l’on ignore encore si la justice le rattrapera une nouvelle fois. En savoir plus
Ephrem Nkezabera, Trésorier des Interahamwe
Les Interahamwe, miliciens hutus issus des jeunesses de l’ancien parti présidentiel MRND, ont été le fer de lance du génocide. Pourtant, ses onze dirigeants nationaux ont connu des sorts judiciaires inattendus. Plusieurs d’entre eux ont notamment figuré parmi les principaux informateurs du bureau du procureur du TPIR, espérant ainsi échapper à la justice en contrepartie de leur aide pour arrêter et faire condamner les hauts responsables politiques et militaires. L’un d’entre eux est Ephrem Nkezabera.
En 1994, il l’un des directeurs de la Banque commerciale du Rwanda. Il est aussi l’un des trésoriers des Interahamwe. Le marché qu’il conclut avec le TPIR semble le servir pendant plusieurs années. Mais finalement, son témoignage à la cour devient nécessaire pour le procureur. Or, comment oser le présenter comme un témoin crédible, sans aussi le juger pour ses propres crimes ? Le piège se referme sur Nkezabera. Et c’est la Belgique qui se dévoue pour le juger. Le 1erdécembre 2009, il écope de 30 ans de prison pour crimes de guerre. Pendant l’instruction, il a reconnu avoir financé et armé les Interahamwe. D’autres anciens camarades l’ont accusé d’avoir directement participé aux tueries. Un peu plus d’un an après son jugement, il est emporté par un cancer du foie alors qu’il devait être rejugé.
Pascal Simbikangwa, Du redouté Service central de renseignement
L’image de ce capitaine de l’armée rwandaise dans sa chaise roulante a été depuis toujours associée aux allégations les plus graves portées contre le pouvoir rwandais, au début des années 90, dans ces années qui marquent la montée des violences, des assassinats et des pogroms, avant le génocide. Pascal Simbikangwa travaille alors au redouté Service central de renseignement. Il est considéré comme un proche du président Juvénal Habyarimana et du cercle présidentiel. En mars 2014, il est le premier Rwandais à être jugé pour génocide en France, pays accusé d’avoir soutenu le pouvoir hutu, y compris pendant le génocide, et vivement critiqué pour sa réticence à juger certains suspects de génocide qui ont trouvé refuge sur son sol.
Simbikangwa est finalement condamné à 25 ans de prison. Selon l’arrêt de la Cour d’assises, l’officier a donné des ordres et distribué des armes à des miliciens présents à des barrages routiers à Kigali, dans le cadre d’un « plan concerté » visant à éliminer l’ethnie tutsie. En savoir plus
Abbé Wenceslas Munyeshyaka, Un symbole des blocages de la justice française
L’Abbé Wenceslas Munyeshyaka a été au cœur d’un des grands drames du génocide dans la capitale rwandaise avant d’être un symbole, aux yeux des associations de victimes, des blocages de la justice française sur les dossiers liés au génocide au Rwanda.
Entre le 6 avril et le 4 juillet 1994, date de la prise de Kigali par la rébellion du Front patriotique rwandais, le père Munyeshaka est vicaire de la paroisse de la Sainte-Famille, à Kigali. Tout le monde cette église en briques rouges qui sied en plein centre de la capitale. Des centaines de Tutsis pourchassés s’y sont réfugiés, espérant y trouver protection. Un nombre important d’entre eux n’échappera pas aux tueurs, qui encerclent l’église et viennent régulièrement y prendre leur lot de victimes. Quel rôle a réellement joué l’abbé pendant cette période ? A-t-il été complice des génocidaires ? Dès 1994, de nombreux témoignages accusent ce responsable religieux qui portant un pistolet à la ceinture. Réfugié en France, il est le premier Rwandais à y faire l’objet d’une plainte pour son rôle présumé dans le génocide des Tutsis. S’ouvre alors un interminable feuilleton judiciaire. Et après 23 ans de procédure, le 21 juin 2018, la cour d’appel de Paris confirme le non-lieu prononcé en 2015 et requis par le parquet, faute de preuves suffisantes. Tout en reconnaissant le rôle « trouble » du prêtre en 1994, les juges d’instruction ont estimé que sa passivité face aux massacres ne suffisait pas à le renvoyer aux assises. En savoir plus
Fulgence Niyonteze, Premier Rwandais condamné en Europe pour son rôle dans le génocide
Ancien maire de Mushubati, à l’ouest du Rwanda, Fulgence Niyonteze est le premier Rwandais condamné en Europe pour son rôle dans le génocide des Tutsis. Au déclenchement du génocide, Niyonteze se trouve pourtant précisément en Europe, en voyage. En mai 1994, il retourne dans sa commune où il ordonne, selon l’accusation, de tuer les Tutsis qui étaient encore vivants. Réfugié en Suisse en octobre 1994, Niyonteze est arrêté le 28 août 1996. Le 30 avril 1999, il est reconnu coupable d’assassinat et crimes de guerre et condamné à la perpétuité par un tribunal militaire suisse.En mai 2000, la peine est réduite à 14 ans de prison en appel. Niyonteze a recouvré la liberté le 29 décembre 2005, après avoir purgé neuf ans de prison.
Une vingtaine d'exécutions publiques
La loi de 1996 crée au sein de chaque tribunal de première instance une chambre spécialisée chargée des affaires en rapport avec le génocide. Elle instaure la procédure d'aveu et de plaidoyer de culpabilité en échange de réductions de peines et répartit les accusés de génocide en catégories, selon la gravité des crimes allégués.
Fin 1996, les premiers procès commencent. Au nombre des principales difficultés, les observateurs relèvent notamment le manque d'avocats de la défense dans un grand nombre d'affaires. « La mise en pratique du droit de se défendre et plus particulièrement d'être assisté d'un défenseur de son choix, gratuit au besoin, n'a pas toujours été chose aisée dans le cadre du contentieux du génocide », constate l’ONG Avocats sans Frontières (ASF) dans son rapport « Le crime de génocide et les crimes contre l'humanité devant les tribunaux ordinaires du Rwanda », publié en 2004. « Au début des procès, certains sièges des anciennes chambres spécialisées s'étaient montrés réticents à accorder des remises aux justiciables qui, à la première audience, comparaissaient seuls et exprimaient le souhait d'être assistés d'un avocat. Les juges qualifiaient fréquemment une telle demande de manœuvre dilatoire », relève le rapport.
A l'époque, même les avocats rwandais hésitent à défendre les accusés de génocide. ASF met courageusement des avocats à la disposition de certains accusés et de certaines parties civiles mais la demande est de loin supérieure à l'offre. Dans quelques cas, les juges – qui n'étaient pas forcément des juristes de formation –renversent le fardeau de la preuve, exigeant de l'accusé qu’il prouve son innocence, note encore ASF.
Parmi ceux qui ont pu comparaître avec l'assistance d'un avocat figure Froduald Karamira. Karamira est présenté comme l'un des ténors du radicalisme hutu, l’inventeur de l’expression « Hutu Power » derrière laquelle vont se regrouper les tenants de l’extrémisme hutu. Le 14 février 1997, il est condamné à la peine de mort. Le 24 avril 1998, au petit matin, il est fusillé publiquement à Nyamirambo, un quartier de Kigali, près de son ancien domicile et du stade où il avait l'habitude de haranguer les foules. Une vingtaine d’autres condamnés à mort subissent le même sort ce jour-là dans le pays. Ce seront les seules exécutions judiciaires dans le Rwanda de l’après-génocide. Le pays finira par abolir le châtiment suprême en 2007, sans doute pour lever le principal obstacle aux extraditions depuis des pays tiers et aux renvois devant la justice rwandaise de certaines affaires du TPIR.
Huit personnes mises en accusation par le TPIR sont officiellement encore en fuite. En cas d’arrestation, cinq d’entre elles seraient renvoyées au Rwanda pour y être jugées.
Les huit hommes qui ont échappé au TPIR
« Retrouver et arrêter les fugitifs est une priorité pour mon Bureau. La coopération des États demeure essentielle pour que nous puissions nous acquitter de cette fonction résiduelle le plus rapidement possible », a déclaré, en décembre dernier, devant le Conseil de sécurité, Serge Brammertz, procureur du Mécanisme (MTPI) qui assure les fonctions restantes, dites « résiduelles », du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Vingt-cinq ans après le génocide, huit personnes mises en accusation par le TPIR sont officiellement encore en fuite.
L’ancien procureur du TPIR, Hassan Bubacar Jallow, a souvent affirmé que le financier présumé du génocide se cachait au Kenya, à six heures de route du siège du tribunal, à Arusha, au nord de la Tanzanie. Mais d’autres sources pensent que le milliardaire, né en 1935, serait aujourd’hui décédé. Accusé d’avoir notamment commandé les machettes utilisées pour tuer les Tutsis en 1994 au Rwanda, Kabuga est un petit marchand ambulant devenu, à l’époque, l’homme le plus riche de son pays. Membre du parti présidentiel, il a aussi été président du Comité d’initiative de la tristement célèbre Radio-télévision libre des mille collines (RTLM) qui distillait des appels à la haine ethnique. Pendant le génocide, il est désigné président du Comité provisoire du Fonds de défense nationale. En juin 1994, à la veille de la débâcle de l’armée régulière face aux rebelles du Front patriotique rwandais, le milliardaire se réfugie en Suisse. Après avoir reçu l’ordre de quitter ce pays, il atterrit à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC), puis s’installe au Kenya. Fort du soutien d’un puissant réseau dans les plus hautes sphères du pouvoir au Kenya, il échappera à plusieurs opérations montées par le TPIR pour l’arrêter. En savoir plus
Augustin Bizimana, Ex-ministre de la Défense
Membre du parti présidentiel en 1994, il est accusé d’avoir participé à la préparation du génocide au plus haut niveau. Selon des sources au MTPI, cet ingénieur agronome de formation se cacherait dans l’est de la RDC. Mais des sources proches de l’ancien régime affirment qu’il est décédé depuis de nombreuses années au Congo-Brazzaville. Ce qu’a nié, en 2017, un ancien responsable du TPIR, s’exprimant sous couvert de l’anonymat, lors d’une conférence à Arusha. « C’est faux, cela est inventé juste pour la diversion. Nous avons fait procéder à l’ouverture de sa tombe présumée, il n’y était pas. » En savoir plus
Protais Mpiranya, Chef de la garde présidentielle
Le major Protais Mpiranya commandait la garde du président Habyarimana. En 1994, cette unité militaire d’élite a été la plus active dans les massacres. Longtemps membre du commandement des rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), basées en RDC, Mpiranya serait protégé, selon le MTPI, par de hauts responsables zimbabwéens, alors que d’autres sources le donnent pour mort. En 2010, un livre est publié en son nom au Zimbabwe, où il est affirmé que Mpiranya est mort le 5 octobre 2006. Kabuga, Bizimana et Mpiranya devront, s’ils sont arrêtés un jour, être jugés par le MTPI. Les cinq autres fugitifs, eux, seraient remis au Rwanda pour y être jugés. En savoir plus
Phénéas Munyarugarama, L’ombre de Nyamata
En 1994, ce lieutenant-colonel commandait le grand camp militaire de Gako, à l’est de Kigali, près de la frontière avec le Burundi. Selon le TPIR, des soldats du camp Gako ont commis des crimes dans leur voisinage. Phénéas Munyarugarama aurait également été présent à l’église de Nyamata, quand de 2500 à 5000 civils y ont été massacrés, le 14 avril 1994, par des militaires de son camp et des miliciens hutus. En savoir plus
Fulgence Kayishema, L’ombre de Nyange
Le nom de Fulgence Kayishema est souvent associé, dans de nombreux témoignages devant le TPIR, au massacre de Tutsis qui avaient cherché refuge à l’église de Nyange, dans l’ouest du Rwanda. Selon l’acte d’accusation, Kayishema, alors inspecteur de police de la commune de Kivumu, aurait aidé à rassembler les Tutsis de la commune à l’église de Nyange en vue de les exterminer. Des témoins ont affirmé, dans d’autres procès au TPIR, que Kayishema, était allé chercher du carburant utilisé par les miliciens pour mettre le feu à l’édifice religieux. En savoir plus
Aloys Ndimbati, Le génocide à Kibuye
A l’époque des faits, Aloys Ndimbati était maire de la commune de Gisovu. Il est accusé d’avoir joué un rôle prépondérant dans l’extermination systématique des Tutsis en différents endroits de la préfecture de Kibuye. Il aurait notamment assuré le transport de gendarmes et miliciens lors d’attaques sur les collines de Bisesero. De plus, il aurait donné l’ordre de tuer les Tutsis qui s’étaient retranchés sur ces collines et aurait personnellement tué certains d’entre eux. S’étant heurtées à une farouche résistance de la part des Tutsis qui se défendaient avec des armes traditionnelles, les attaques de Bisesero ont duré plusieurs jours, faisant des dizaines de milliers de morts.
Charles Sikubwabo, Un maire dans le génocide
Nommé à la tête de la commune Gishyita en 1993, Charles Sikubwabo a occupé ce poste jusqu’en juillet 1994, quand le génocide a pris fin. Avant, il avait servi au sein de l’armée rwandaise, comme adjudant-chef. Selon l’acte d’accusation, en avril 1994, il aurait ordonné à des éléments de la gendarmerie nationale, de la police communale et à des miliciens Interahamwe d’attaquer l’église de Mubuga. L’attaque a fait des milliers de morts parmi les Tutsis qui s’y étaient réfugiés. Charles Sikubwabo est accusé d’avoir personnellement pris part à certaines attaques.
Charles Ryandikayo, Le commerçant
À l’époque des faits, Charles Ryandikayo était le gérant d’un petit restaurant situé à Mubuga, dans la commune Gishyita. Ce petit commerce lui assurait un certain statut social dans cette commune pauvre de l’ouest du Rwanda. Selon l’acte d’accusation, le restaurateur aurait participé et assisté à des massacres de Tutsis entre le 8 avril et le 30 juin 1994, et notamment à l’église de Mubuga où des milliers de Tutsis furent massacrés entre le 14 et 16 avril 1994.
La réinvention des gacaca
De nombreux autres jugements suivront, mettant en cause analphabètes ou universitaires, portefaix ou riches hommes d'affaires, mineurs ou majeurs, hommes ou femmes. On estime alors à environ 9000 le nombre de personnes jugées par ces chambres spécialisées. Mais le gouvernement est déjà bien conscient d'une chose : il lui faudrait plusieurs dizaines d'années, à un coût faramineux, pour juger tous les détenus (la Croix-Rouge internationale publiera le chiffre de 144 000 suspects de génocide en prison, dont des milliers périront avant d’être jugés).
C'est ainsi qu'en 1998 s'ouvrent des consultations sur l'opportunité de puiser dans la tradition rwandaise quand les sages du village, personnes réputées intègres, s'asseyaient sur le gazon (gacaca, en langue rwandaise) pour trancher les différends. Les tribunaux gacaca, version pénale contemporaine d’une tradition transformée et adaptée aux circonstances, sont en train de naître. Ils vont marquer l'histoire judiciaire mondiale.
La première loi sur ces tribunaux ancrés dans les communautés est publiée en mars 2001. Elle sera plusieurs fois modifiée pour répondre aux difficultés rencontrées dans son exécution et s’adapter, avec un pragmatisme certain, à l’évolution des besoins.
Les objectifs recherchés sont l'accélération des procès, la manifestation de la vérité à travers la participation de la communauté, et la réconciliation. L'aveu se trouve au centre du processus. Bénévoles, les personnes appelées à siéger dans les Gacaca seront élues au sein de leur communauté sur le seul critère de l'intégrité.
Les travaux de ces tribunaux démarrent le 18 juin 2002, avec le lancement de la phase de « collecte des informations » sur le déroulement du génocide, une sorte d'instruction menée publiquement, souvent sous un soleil de plomb, avec la participation de témoins et victimes. Les procès proprement dits s'ouvrent en mars 2005 dans quelques juridictions pilotes, avant de se généraliser par la suite à l'ensemble du pays.
Les pays occidentaux jugent les auteurs du génocide des tutsis
Où a-t-on jugé le génocide des Tutsis du Rwanda ? Et dans quelles proportions ? Voici la géographie et les chiffres d’une entreprise judiciaire sans précédent.
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2 millions d’affaires, 1 million de personnes jugées
Ce sont ainsi plus de 12 000 tribunaux qui sont installés à travers le pays. A tous les échelons administratifs, dans toutes les communes, sur des milliers de collines, une gigantesque entreprise de justice se développe, sans précédent dans l’histoire.
Lorsque le président Paul Kagame procède à la clôture des Gacaca, en juin 2012, ces tribunaux auront entendu, selon un bilan officiel, le chiffre titanesque de 1 958 714 affaires visant 1 003 227 individus, dont la grande majorité ont été reconnus coupables. Coupable de quoi, cela n’est pas toujours très clair. D’après les statistiques des affaires (à différencier des individus, pour lesquels les données ne sont pas disponibles), 1 320 634 d’entre elles (soit 67,5 %) ont eu trait à des pillages et destructions de biens. Pour la catégorie des suspects de meurtres, tortures, outrages et violences physiques, un total de 577 528 affaires ont été jugées (29%). Le taux d’acquittement, 37 %, y est beaucoup plus élevé que dans les vols de biens (4%). Enfin, dans la première catégorie – celle des organisateurs, autorités et auteurs de violences sexuelles –, on compte 60 552 affaires jugées (3,5%), avec un taux de 12% d'acquittements.
« Il y a eu des peines d'emprisonnement allant de 5 à 10 ans, des peines de perpétuité totalisant 5 à 8 % des verdicts et des acquittements pour 20 à 30 % », précise alors le ministre de la Justice, Tharcisse Karugarama. « Le processus gacaca a réaffirmé la capacité des Rwandais à trouver des solutions à leurs propres problèmes », se félicite Paul Kagame, dans le plus grand stade du Rwanda. « La justice gacaca a été directement administrée par le peuple et au nom du peuple », poursuit le chef de l'Etat. Ce système « a bien servi le peuple rwandais et au-delà même de nos attentes. Il n'y avait pas meilleure alternative », ajoute-t-il, avec la fierté constante des solutions made in Rwanda.
Succès et périls d’une justice de masse
Dans un rapport publié en mai 2011, alors que les Gacaca avaient terminé l'essentiel des procès, l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW) dresse un bilan plus « mitigé » de cette justice sur le gazon. Tout en reconnaissant que ce système « a connu certaines réussites » comme « la tenue de procès rapides avec la participation populaire, une réduction de la population carcérale, une meilleure compréhension de ce qui s'est passé en 1994 », HRW affirme avoir « constaté un large éventail de violations (des principes d'un) procès équitable ». L'organisation épingle notamment « des restrictions sur la capacité de l'accusé à établir une défense efficace ; de fausses accusations, dont certaines basées sur la volonté du gouvernement rwandais de faire taire les critiques ; du détournement du système Gacaca pour régler des comptes personnels ; d'intimidation de témoins à décharge par des juges ou par des autorités ». Selon HRW, des victimes de viols pendant le génocide auraient également souhaité que leurs affaires restent de la compétence des tribunaux ordinaires, « dotés d'une meilleure protection des renseignements personnels » (un amendement de 2008 a élargi la compétence des Gacaca aux crimes sexuels commis dans le cadre du génocide).
L'organisation reproche, enfin, au gouvernement rwandais de ne pas avoir inclus dans la compétence des Gacaca les crimes commis par des éléments du FPR. Pour le pouvoir, aucun risque « d’équivalence » entre ces crimes – que le procureur général Gerald Gahima qualifiera, dans un entretien en 2001, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité – et le génocide ne saurait être pris. Seul le génocide des Tutsis sera jugé.
Face à cette critique, le ministre Karugarama accuse l'organisation américaine de se moquer « des efforts de tous les Rwandais qui travaillent ensemble pour promouvoir la justice et la réconciliation ». Il appelle à tenir « compte de l'énormité des défis auxquels le Rwanda était confronté après le génocide ». Et insiste : « Le choix des gacaca par le Rwanda doit être considéré dans son contexte. Après le génocide, le pays était anéanti et avait très peu de gens ayant une formation juridique. Gacaca a été une réponse à cela. »
Le reste du monde fait sa part du travail
Parallèlement à l’œuvre judiciaire accomplie au Rwanda, la communauté internationale, soucieuse de se racheter après son abandon du Rwanda en 1994, établit un Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), installé à Arusha, en Tanzanie. Prévu avec un mandat de quatre ans renouvelable, il durera vingt-et-un ans, mettant en accusation 90 individus, pour en poursuivre effectivement 75 et en juger 73. Dont le seul non Rwandais à avoir été condamné pour incitation au génocide, l’Italo-Belge Georges Ruggiu, ancien agent de la sécurité sociale belge venu se perdre au Rwanda quelques mois avant le génocide pour terminer comme animateur au sein d’une radio, la RTLM, devenue célèbre dans le monde entier pour ses appels au meurtre et sa contribution sinistre aux massacres. Surtout, le TPIR permet d’arrêter et de juger plusieurs chefs de l’armée, de nombreux membres du gouvernement et dirigeants de partis politiques, des préfets et des bourgmestres (maires), des responsables de médias, d’église, de milices, en plus de quelques commerçants.
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), créé en novembre 1994 par l’Onu et basé à Arusha (Tanzanie), a officiellement fermé ses portes en décembre 2015. En vingt ans, il a mis en accusation 89 Rwandais et 1 Belge pour leur rôle dans le génocide. 75 d’entre eux ont été effectivement poursuivis, dont 73 ont été jugés. 9 ont plaidé coupable et 14 ont été acquittés.
Les temps forts de vingt ans de procès au TPIR
Enfin, depuis vingt ans, au nom du principe dit de « compétence universelle », une dizaine de pays – Suisse, Belgique, France, Suède, Allemagne, Norvège, Pays-Bas, Finlande, Etats-Unis et Canada – ont jugé 22 responsables du génocide. D’autres procès sont notamment en attente en Belgique et en France.
La fin des Gacaca et la fermeture du TPIR ne marquent cependant pas la fin des procès de génocide, crime imprescriptible. Au Rwanda, une loi a été votée pour la gestion judiciaire de l’après-gacaca. Conformément à ce texte, les nouvelles poursuites pour génocide se déroulent devant les tribunaux ordinaires. Ces procédures, qui se font rares et passent souvent inaperçues, impliquent notamment de suspects rentrés d’exil après la clôture des Gacaca. Par ailleurs, une chambre spéciale a été créée pour juger des accusés renvoyés ou extradés par des pays tiers ou remis par l’ex-TPIR qui a clos ses travaux fin 2015.
Expulsions, remises, transferts : qui a renvoyé des suspects de génocide pour qu’ils soient jugés, et vers où ?
Ainsi le génocide des Tutsis du Rwanda aura été, de loin, le plus jugé de l’histoire, même s’il ne sera « jamais totalement jugé », comme l’a noté le juriste et essayiste Antoine Garapon, dans une récente préface au premier livre de François-Xavier Nsanzuwera, qui avait été le premier procureur général au lendemain des massacres. Une entreprise judiciaire unique et extraordinaire où le Rwanda, en particulier, a défié l’idée partout ailleurs admise qu’il ne peut y avoir de justice de masse après un crime de masse.
Les informations et données rassemblées dans ce dossier proviennent de la couverture des journalistes de Justiceinfo et de leurs recherches. Comme indiqué, elles sont complétées par d'autres sources : rapport des juridictions gacaca, rapports Human Rights Watch et ASF, TPIR.
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