Ces assassinats n'ont pas seulement visé des victimes mais aussi des témoins et des juges Inyangamugayo (intègres) membres des juridictions gacaca. 64 des 167 victimes répertoriées ont été empoisonnées et les 103 autres ont été tuées soit au moyen d’armes à feu ou traditionnelles, soit par strangulation, quand elles n'ont pas été carrément brûlées.
Selon M. Dieudonné Kayitare, chef du département juridique au sein d’Ibuka, ce chiffre serait bien inférieur à la réalité. « Beaucoup de rescapés meurent dans des circonstances tellement mystérieuses et bien stylées qu’on a du mal à établir des causes criminelles à l’origine de leur mort : des accidents, des suicides, des cas d’empoisonnement", a-t-il dit à l'agence Hirondelle
Selon lui, «la période des infiltrés a connu des cas d’assassinat des rescapés, sans doute dans l’intention de parachever le génocide de 1994. Mais le plus grand nombre de victimes s’inscrit dans le contexte du règlement du contentieux du génocide par les juridictions classiques et gacaca…surtout avec la collecte d’information et le lancement des juridictions gacaca dans tous les secteurs du pays en 2007».
Polycarpe Ntagwabira, un parajuriste de l'association se souvient de certains cas « d’assassinats commis avec une brutalité et une haine qui frisent l’animalité ou la folie ». Ainsi, en 2006, ce fut le cas de « la jeune Fatuma Uwingabire retrouvée complètement éventrée et démembrée, sans foie ni cœur ni organes génitaux. Son père, témoin dans plusieurs procès gacaca, avait également été tué en 2002. C’était dans le secteur Rusororo, district de Gasabo dans la Ville de Kigali », précise-t-il.
Selon une femme, membre de l’Association des veuves du génocide (AVEGA), «la clémence, proche de l’amnistie générale, affichée par le politique à l’égard des auteurs du génocide, stimule ces derniers à continuer de nous tuer. Ils savent qu’après tout il y aura le pardon (...) Comme si nous, on est des bêtes de boucherie ».
SRE/PB/GF