Le Burundi, dont le président sortant Pierre Nkurunziza est décédé lundi, quelques jours après l'annonce de l'élection de son successeur, est plongé depuis l'élection présidentielle de 2015 dans une grave crise politique, qui a fait au moins 1.200 morts.
Ces violences, déclenchées contre la candidature à un troisième mandat de Pierre Nkurunziza, un ancien chef rebelle hutu, jugée inconstitutionnelle par l'opposition, ont fait ressurgir le spectre de la guerre civile, qui avait provoqué 300.000 morts entre 1993 et 2006.
Pierre Nkurunziza avait ensuite créé la surprise en juin 2018 en annonçant qu'il ne se représenterait pas au terme de ce troisième mandat.
- Manifestations -
Le 26 avril 2015, des milliers de personnes bravent l'interdiction de manifester au lendemain de la désignation de Pierre Nkurunziza par son parti, le CNDD-FDD, comme candidat à la présidentielle, après dix ans de pouvoir.
Commencent six semaines de manifestations quasi quotidiennes à Bujumbura, sévèrement réprimées.
L'opposition juge ce troisième mandat contraire à la Constitution et à l'accord d'Arusha, qui a mis fin à la guerre civile. M. Nkurunziza considère que son premier mandat obtenu en 2005 ne compte pas, car octroyé par le Parlement dans le cadre d'un mécanisme de sortie de guerre civile.
- Putsch avorté, reprise en main -
Le 13 mai 2015, une tentative de putsch échoue. Pierre Nkurunziza limoge ses ministres de la Défense et des Relations extérieures.
En juin, le président de l'Assemblée nationale fait défection à la veille de législatives boycottées par l'opposition.
Son départ s'ajoute à une longue liste d'opposants, journalistes, membres de la société civile ou cadres frondeurs du CNDD-FDD exilés.
Le 21 juillet, Pierre Nkurunziza est réélu.
- Attaques ciblées -
Commence une série d'attaques ciblées faisant craindre un cycle incontrôlable de représailles.
Le 2 août, le général Adolphe Nshimirimana, bras droit du président, est tué dans une attaque à la roquette.
Le 15 août, un ex-chef d'état-major, le colonel Jean Bikomagu, figure du camp tutsi pendant la guerre civile, est assassiné.
Le 11 décembre, au moins 87 personnes sont tuées dans des attaques coordonnées de plusieurs camps militaires, entraînant des exécutions sommaires en retour.
En avril 2016, le général tutsi Athanase Kararuza et son épouse sont tués.
- Risque de "génocide" -
En juillet 2016, le Conseil de sécurité autorise le déploiement de 228 policiers de l'ONU, résolution rejetée par Bujumbura.
En septembre, une mission d'enquête de l'ONU accuse le gouvernement de graves violations des droits humains, pointant un "grand danger de génocide".
Fin octobre, le Burundi notifie sa décision de quitter la Cour pénale internationale (CPI), effective un an plus tard.
Le 30 décembre, Pierre Nkurunziza annonce qu'il pourrait se représenter en 2020 si le "peuple le demande".
Début 2017, Human Rights Watch accuse des membres des Imbonerakure, la ligue des jeunes du parti au pouvoir, d'avoir tué, torturé ou molesté des dizaines de personnes. En avril, l'ONU les accuse d'appels au viol d'opposantes.
- Enquête de la CPI -
Le 29 septembre 2017, l'ONU prolonge d'un an le mandat d'une commission d'enquête.
Le 9 novembre, la CPI autorise une enquête sur des crimes contre l'humanité présumés, à la demande de l'ONU.
- Répression accrue -
Le 17 mai 2018, les Burundais approuvent par référendum une réforme constitutionnelle qui pourrait permettre au président de rester jusqu'en 2034, après une campagne électorale marquée par une répression accrue selon Human Rights Watch.
- Nkurunziza ne se représente pas -
Le 7 juin 2018, Pierre Nkurunziza crée la surprise en annonçant qu'il ne se représentera pas.
Le 5 septembre, des enquêteurs de l'ONU avertissent que de graves violations des droits humains, dont des crimes contre l'humanité, se poursuivent.
En janvier 2020, l'Assemblée nationale accorde au président de nombreux avantages à la fin de son mandat, jugés "indécents" par l'opposition.
Le 20 mai, le candidat du parti au pouvoir, Évariste Ndayishimiye, est élu président avec 68,72% des voix, une "mascarade électorale" selon le parti de son principal adversaire, Agathon Rwasa.
Le 4 juin, la Cour constitutionnelle rejette un recours de l'opposition, proclamant M. Ndayishimiye élu.
Le 8 juin, Pierre Nkurunziza décède à l'âge de 55 ans des suites d'un "arrêt cardiaque", selon la présidence.