« Les accusations portées contre Emmanuel Ndindabahizi manquent singulièrement de vraisemblance », a affirmé dans sa déclaration liminaire Me Pascal Besnier, l’avocat français de Ndindabahizi. « En avril, mai et juin 1994, la mort a rodé à Kibuye mais elle n’avait pas le visage d’Emmanuel Ndindabahizi », a poursuivi Me Besnier.
« Les experts, les historiens et les spécialistes des droits de l’homme n’évoquent jamais Ndindabahizi parmi les responsables du génocide », a plaidé l’avocat.
Pour le défenseur de l’ancien ministre, « tous les Hutus se sont pas devenus des démons (en 1994) même si tous les Tutsis étaient des victimes potentielles». « Emmanuel Ndindabahizi fait partie de ceux qui ont traversé l’enfer sans se déshonorer », a soutenu Me Besnier.
Après cette déclaration liminaire, l’avocat a introduit le premier témoin à décharge qui a déposé à huis clos.
Les trois témoins suivants, tous rescapés du génocide, ont déclaré que l’accusé a appelé à l’arrêt des massacres de Tutsis au début de juin 1994.
« Il a tenu une réunion dans la cellule Agasharu (commune Gitesi) au cours de laquelle il a demandé que soit mis fin aux tueries », a rapporté le témoin DG ainsi dénommé pour préserver son anonymat. « Sans cette intervention, je n’aurais pas survécu », a-t- il ajouté.
Le témoin suivant, DH, a abondé dans le même sens. « A partir de ce jour (de la réunion), plus personne n’a été tué dans notre cellule, les Tutsis n’ont plus été pourchassés ».
Le dernier témoin du jour, DI, a, quant à elle, déclaré que l’ex–ministre a ordonné d’arrêter les auteurs des massacres de Tutsis.
Tous les trois ont cependant reconnu n’avoir pas été témoins oculaires de cette réunion car ils se cachaient. Le message de pacification attribué à l’accusé leur a été rapporté par d’autres personnes, selon leurs dépositions.
Seize autres témoins parmi lesquels des génocidaires repentis qui ont avoué leurs crimes devant la justice rwandaise déposeront en faveur de Ndindabahizi, selon Me Besnier.
Neuf d’entre eux sont déjà présents à Arusha et s’apprêtent à faire leur déposition. Me Besnier est assisté, pour la défense de l’ex- ministre, de son concitoyen, Me Guillaume Marçais.
Le bureau du procureur est représenté dans cette affaire par le Nigérian Charles Adeogun- Phillips et le Tanzanien Wallace Kapaya.
Les débats se déroulent devant la première chambre de première instance du TPIR, dirigée par le juge norvégien Erik Mose, également président du tribunal. Il est assisté de l’Ougandaise Salomy Balongi Bossa et de la Pakistanaise Khalida Rachid Khan.
ER/GF (NB’10 27’A)