En Colombie, Santos salue la pression internationale sur le processus de paix

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En pleine recrudescence du conflit armé en Colombie, le président Juan Manuel Santos a jugé "très positive" la pression internationale pour "accélérer" le processus de paix en cours depuis trois ans avec la guérilla des Farc, dans un entretien exclusif à l'AFP.

Les appels à l'apaisement se sont multipliés depuis le mois dernier avec la levée de la trêve unilatérale des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) et la reprise des bombardements massifs contre la rébellion marxiste, issue d'une insurrection paysanne en 1964 et qui compte encore près de 8.000 combattants.

"La patience des Colombiens n'est pas infinie et donc toute pression pour accélérer le processus de paix est la bienvenue", confie M. Santos, qui effectue une tournée marathon la semaine prochaine en Europe.

Alors que son gouvernement mène depuis novembre 2012 des négociations avec les Farc, délocalisées à La Havane, les pays garants des pourparlers, Cuba et la Norvège, tout comme l'Union européenne (UE) et l'ONU se sont inquiétés du retour de la guerre, exhortant à un cessez-le-feu bilatéral rapide.

Le prend-il pour un avertissement au moment où le chef de l'Etat colombien espère concrétiser la création en Europe d'un fonds pour le post-conflit ? "Tout le contraire", sourit-il depuis le palais présidentiel à Bogota, y voyant plutôt un message de la communauté internationale en direction des Farc.

"Je crois que de l'extérieur, les gens perçoivent peut-être mieux la réalité du pays dans lequel nous vivons", souligne M. Santos, attendu la semaine prochaine à Bruxelles pour le sommet de l'UE et de la Communauté des Etats latino-américains et des Caraïbes (Celac), avant des visites en Italie, en Suède et en Norvège.

- 'Réconciliation entre ennemis' -

Artisan du dialogue avec la principale rébellion, ce dirigeant de centre-droit, réélu l'an dernier pour un second mandat jusqu'en 2018, affirme pour sa part qu'il ne compte pas "jouer avec les règles du jeu", celles de négociations sans trêve militaire avant un accord final.

"Tout processus de paix est complexe, ce n'est pas un chemin facile", admet-t-il dans sa première interview à une agence de presse internationale depuis l'annonce le 22 mai par la guérilla de la fin de la trêve qu'elle observait depuis six mois.

Pour le président colombien, fortement critiqué par l'opposition conservatrice, la "réponse" consiste à "accélérer" les négociations" qui ont déjà abouti à plusieurs accords sur une réforme agraire, la lutte antidrogue, la participation des ex-guérilleros à la vie politique, ou encore un plan de déminage dans ce pays frappé par le fléau des mines antipersonnel.

Dernier acquis en date, l'annonce jeudi de la création d'une "Commission de la Vérité" chargée de recueillir, sans les exposer à des poursuites judiciaires, les confessions des acteurs du conflit le plus vieux d'Amérique latine, qui a fait officiellement quelques 220.000 morts en plus d'un demi-siècle.

"La vérité va aider à cicatriser ces blessures et à nous réconcilier", prédit M. Santos, qui salue un "pas très important" pour "garantir les droits des victimes" et promet "le maximum de justice que nous permet la paix", tout en refusant de s'exprimer sur la possibilité de peines de prison pour les Farc, une option que rejette fermement la guérilla.

Lors de son passage en Italie, le président colombien compte se rendre au Vatican dans l'espoir d'une "réunion fructueuse" avec le pape argentin François, "un motif d'inspiration et d'union". "Il saura comment nous aider, le moment venu".

Plus polémique peut-être, M. Santos n'exclut pas, pour hâter les pourparlers de paix, de croiser l'ennemi numéro un, le dirigeant suprême des Farc, connu sous le nom de guerre de Timoleon Jimenez alias "Timochenko", qu'il a autorisé à se rendre à plusieurs reprises à Cuba.

"Tôt ou tard, nous allons devoir nous rencontrer car il s'agit précisément d'une réconciliation entre ennemis", affirme M. Santos. "Ils ont été les ennemis de l'Etat colombien depuis plus de 50 ans".