Le parquet du TPIR lui impute la responsabilité des massacres commis à Bisesero (province Kibuye, ouest du Rwanda) et ailleurs dans le pays, entre le 6 avril et le 17 juillet 1994.
Le substitut australien du procureur, Kenneth Fleming, a déclaré qu'en tant que ministre, l'accusé avait le devoir D'accomplir loyalement ses tâches et avait prêté serment de promouvoir les intérêts du peuple rwandais, conformément à la Constitution.
Kenneth Fleming a soutenu qu'au contraire "nous le retrouvons dans les collines de Bisesero en train de conduire des attaques contre des Tutsis. On pourrait dire cyniquement que l'accusé en mai 1994 était occupé à ce que l'on décrirait comme des tirs contre des pigeons", a-t-il poursuivi. Le parquet a allégué que les Tutsis réfugiés à Bisesero étaient armés de bâtons, tandis que l'accusé disposait D'une arme à feu.
"Ce crime est si pernicieux que quiconque connaissait une sympathie quelconque avec l'ennemi principal, en l'occurrence [la rébellion à dominante tutsie] le FPR était l'ennemi du Rwanda", quelque soit son âge, selon Kenneth Fleming.
Il est notamment reproché à Eliézer Niyitegeka D'avoir dirigé ou ordonné des massacres de civils et D'avoir personnellement pris part à des attaques dans l'intention de détruire en tout ou en partie le groupe ethnique tutsi.
Le parquet affirme que dès la formation du gouvernement intérimaire le 8 avril 1994, plusieurs membres du cabinet, dont Eliézer Niyitegeka, ont adhéré au plan D'extermination des Tutsis mis en place, et pris les moyens nécessaires pour l'exécuter. "Les charges retenues contre cet accusé, c'est qu'il était présent, il distribuait des armes, il encourageait le génocide. En fait, il en était partie prenante", a dit Kenneth Fleming.
Le procureur a en outre évoqué une réunion dirigée par le premier ministre Jean Kambanda à Kibuye le 3 mai 1994 à laquelle aurait assisté l'accusé. Au cours de cette réunion, un médecin a sollicité la protection de 74 orphelins rescapés des massacres de l'église catholique et du home Saint-Jean de Kibuye mais "a été envoyé faire paître, il a été ridiculisé. Il lui a dit qu'il ne savait pas qui était l'ennemi", a indiqué Kenneth Fleming. Au bout de vingt-quatre heures, ces orphelins ont été tués, a dit le procureur.
Le parquet considère par ailleurs qu'en sa qualité de ministre de l'information, Eliézer Niyitegeka, "était l'autorité de tutelle de tous les organes de presse opérant au Rwanda. Pendant cette période la RTLM, qui relevait de sa tutelle, a mené une campagne de haine et D'incitation au meurtre des Tutsis et des personnes spécifiquement identifiées. Eliézer Niyitegeka a échoué ou a ignoré ses obligations D'arrêter la diffusion de ces émissions ou de punir les auteurs", lit-on dans l'acte D'accusation.
Eliézer Niyitegeka est également accusé de viols. "Ainsi le ou vers le 20 mai 1994 des militants politiques et des miliciens travaillant sous la supervision D'Eliézer Niyitegeka ont forcé une fille à monter dans le véhicule de ce dernier où Eliézer Niyitegeka l'a violée; quand la victime sortit du véhicule, Eliézer Niyitegeka lui-même la tua D'un coup de feu", dit l'acte D'accusation.
"Egalement vers le 28 juin 1994, Eliézer Niyitegeka s'est servi de son véhicule pour pousser un autre véhicule hors la chaussée. Les occupants du véhicule, un homme et une femme, ont été tués à l'arme à feu. Eliézer Niyitegeka s'est approché du véhicule et a ordonné aux miliciens qui s'étaient rassemblés autour de déshabiller la fille, de couper un morceau de bois et de l'introduire dans sa partie génitale", poursuit le document.
l'accusé plaide non coupbale. Il est défendu par Me Sylvia Hannah Geraghty du Royaume-Uni et Me Feargal Kavanag D'Irlande. Eliézer Niyitegeka a D'abord été journaliste à Radio Rwanda, puis parlementaire, cadre dans une usine textile et hommes D'affaires, avant D'être nommé ministre. Il était membre D'un parti D'opposition à l'ancien président Juvénal Habyarimana, le Mouvement démocratique républicain (MDR).
Le parquet allègue qu'il s'était identifié avec l'aile "power", opposée au partage du pouvoir avec le FPR.
Le premier témoin dans ce procès a été un enquêteur du parquet, le policier hollandais Antonio Leucassen, qui a présenté des photographies des sites de massacres allégués. Des témoins des faits seraient retenus à Kigali en raison D'un conflit latent entre le TPIR et les associations rwandaises de rescapés du génocide. Au mois de janvier, les principales associations de rescapés ont suspendu leur coopération avec la juridictionde l'ONU alléguant notamment le harcèlement des témoins de l'accusation par des équipes de défense.
AT/GF/FH (ni-0617a )