"Nous sommes allés à l’ESO [Ecole des sous officiers] pour nous faire recruter aux entraînements au maniement des armes et c’est Alphonse Nteziryayo qui assurait ces entrainements", a indiqué M. FAM.
Le septième témoin de l’accusation a précisé que ces entraînements ont été menés bien avant la mort de l’ex-président rwandais Juvénal Habyarimana, qui a déclenché le génocide anti-tutsi et les massacres d’opposants en 1994.
M. FAM a indiqué que les personnes entraînées ayant réussi un test D'aptitude se voyaient remettre un fusil des mains de Nteziryayo.
Le témoin a affirmé que ceux qui avaient reçu des fusils ont, par la suite, été responsables des barrages routiers auxquels des Tutsis étaient "triés et tués" pendant le génocide. Nteziryayo serait venu récupérer ces armes en juillet 1994, "quand le FPR venait d’envahir tout le pays, donc avant de fuir".
Le témoin a en outre allégué que l’accusé leur avait donné l'ordre de tuer environ soixante-dix refugiés tutsis.
On nous a demandé de les tuer
"Nous étions au barrage, et des refugiés tutsis, dont certains avaient des jarrets et des bras coupés sont arrivés. Nous leur avons dit de s’asseoir. Peu après, Nteziryayo est arrivé comme s’il les poursuivait. Il nous a ordonné de les conduire à Rango […] On nous a demandé de les tuer et nous les avons tués. C’est Alphonse Nteziryayo qui nous en a donné l’ordre" a déclaré FAM, qui s’exprimait en sa langue maternelle, le kinyarwanda.
Le témoin a par ailleurs affirmé avoir vu l’accusé en compagnie de militaires au site dit Kabakobwa, où environ deux-mille-cinq-cent Tutsis auraient été tués. Au cours du contre-interrogatoire, l’avocat burkinabé de Nteziryayo, Me Frédéric Titinga Pacere, a relevé plusieurs incohérences dans les déclarations du témoin. Me Pacere a en outre voulu démontrer que son client n’était pas un responsable militaire à Butare, qui pouvait diriger des entraînements dans un camp militaire local.
Le parquet allègue qu‘"avant d’être préfet, Alphonse Nteziryayo a exercé les fonctions de responsable de la défense civile pour la préfecture de Butare. A ce titre, il aurait bien exercé une autorité sur les miliciens Interahamwe et des civils de la préfecture". Nteziryayo et ses coaccusés plaident non coupables.
Sont concernés par ce procès outre Alphonse Nteziryayo, son prédécesseur à la préfecture de Butare Sylvain Nsabimana, l'ex-ministre de la famille et de la promotion féminine, Pauline Nyiramasuhuko, première femme à être inculpée par une juridiction internationale ainsi que son fils Arsène Shalom Ntahobali, et deux ex-maires : celui de Ngoma, Joseph Kanyabashi, et de Muganza, Elie Ndayambaje.
Le procès du groupe Butare se déroule devant la deuxième chambre de première instance du TPIR présidée par le juge tanzanien William Hussein Sekule, et composée en outre des juges, malgache Arlette Ramaroson, et lesothan Winston Churchill Matanzima Maqutu. Le procès se poursuivra lundi prochain avec le contre-interrogatoire du témoin par la défense de Joseph Kanyabashi.
BN/AT/GF/FH(BT-0307A)