02.11.2000 - TPIR/APPEL - DEUX AFFAIRES MISES EN DELIBERE CETTE SEMAINE PAR LA CHAMBRE D'APPEL

Arusha 2 novembre 2000 (FH) - La chambre D'appel du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a mis deux affaires en délibéré au cours de cette semaine. Il s'agit du jugement contre l'ancien maire de Taba (préfecture Gitarama, centre du Rwanda), Jean-Paul Akayesu, examiné mercredi et jeudi à Arusha, ainsi que celui contre l'ancien préfet de Kibuye (ouest du Rwanda), Clément Kayishema, et de l'homme D'affaires, Obed Ruzindana, étudié lundi et mardi.

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Clément Kayishema et Obed Ruzindana ont été jugés conjointement en première instance.

Dans l'affaire Akayesu, la défense a plaidé l'annulation de son jugement de culpabilité et la mise en liberté de l'accusé. l'ancien maire de Taba a été condamné à l'emprisonnement à vie en octobre 1998 après avoir été reconnu coupable de génocide et de crimes contre l'humanité.

Les avocats canadiens de Jean-Paul Akayesu, Me John Philpot et Me André Tremblay, ont affirmé que le Tribunal a commis des erreurs de droit et de faits en déclarant leur client coupable, expliquant que cela devrait invalider le jugement.

Le procureur a également fait appel du jugement contre Akayesu. Le parquet estime notamment que la chambre de première instance a commis une erreur de fait et de droit en ne déclarant pas Jean-Paul Akayesu coupable de certains chefs de violations des conventions de Genève applicables en temps de guerre et de complicité dans le génocide. l'accusation considère que Jean-Paul Akayesu en tant que bourgmestre (maire) était mandaté en tant que représentant du gouvernement, pour soutenir l'effort de guerre. Le parquet affirme en outre que la chambre de première instance a commis une erreur de fait en concluant qu'il n'avait pas été prouvé au cours du procès, au delà de tout doute raisonnable, "que les actes perpétrés par Akayesu dans la commune Taba à l'époque des faits allégués dans l'acte D'accusation l'ont été en rapport avec le conflit armé". Il y avait, au Rwanda en 1994, un conflit armé entre l'ancien gouvernement et le Front patriotique rwandais (FPR), aujourD'hui au pouvoir à Kigali.

Le parquet indique qu'il serait aberrant si un civil ne pouvait être poursuivi pour des violations des conventions de Genève. Ces conventions relèvent, selon lui, du "jus cogens", c'est à dire le droit obligatoire, applicable en temps de guerre comme en temps de paix.

Dans le procès conjoint Kayishema-Ruzindana, les avocats ont fait valoir que leurs clients ont fait l'objet D'un procès inéquitable, entaché de nombreuses erreurs juridiques et factuelles.

La défense de Clément Kayishema a notamment plaidé que la deuxième chambre de première instance n'a pas pris correctement en compte le contexte chaotique qui régnait au moment des faits et "qu'on a jugé le préfet plutôt que l'homme Kayishema".

La défense a ajouté que la chambre n'a pas retenu le témoignage des experts qui estimaient que Kayishema n'avait pas un pouvoir prépondérant sur les maires de sa préfecture et qu'il n'avait ni les moyens légaux, ni les moyens pratiques de réquisitionner des forces de sécurité.

Clément Kayishema est défendu par les avocats français, Me André Ferran, et Me Philippe Moriceau. La défense avait fait remarquer, au cours du procès, que le préfet rwandais en 1994 était "un personnage, déconcentré, coupé de sa hiérarchie et sans moyens D'actions".

La défense D'Obed Ruzindana a, quant à elle, soutenu que le parquet du TPIR n'a pas apporté la preuve que l'accusé avait l'intention ou les moyens de commettre le génocide. l'accusé "n'était qu'un épicier " n'ayant ni les ressources matérielles (armes, logistique) ni les moyens intellectuels (autorité, influence sur la population) pour commettre un génocide, selon la défense.

Obed Ruzindana est défendu par l'avocat français, Me Pascal Besnier, et un confrère néerlandais, Me Willem van der Griend.

Le parquet a également fait appel de la décision rendue par la chambre de première instance. La poursuite a demandé que les coaccusés soient tous deux reconnus coupables des chefs D'accusation écartés par la chambre et soient condamnés à l'emprisonnement à perpétuité.

Clément Kayishema répondait de 24 charges de génocide, crimes contre l'humanité, et violations sérieuses des Conventions de Genève alors que Ruzindana répondait de 6 chefs D'accusation.
l'ancien préfet Kayishema a été condamné à l'emprisonnement à vie après avoir été reconnu coupable de quatre chefs de génocide tandis que l'homme D'affaires Ruzindana a été condamné à vingt-cinq ans D'emprisonnement après avoir été reconnu coupable D'un chef de génocide.

AT/MBR/FH (AP%1102A)