Karim Khan a été choisi face à trois autres candidats européens au 2e tour de scrutin, remportant 72 voix sur les 122 exprimées. Spécialiste des droits humains, cet avocat a récemment dirigé une enquête spéciale de l'ONU sur les crimes du groupe Etat islamique.
Lors de cette enquête, il avait appelé à des procès semblables à celui qu'ont connu les dirigeants nazis à Nuremberg.
Il succédera le 16 juin à la procureure générale sortante, la Gambienne Fatou Bensouda, qui a mené des enquêtes controversées, notamment sur le conflit israélo-palestinien ou encore l'Afghanistan.
Karim Khan a été avocat de la défense dans de nombreuses affaires de la CPI, y compris pour le fils de l'ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, Seif al-Islam. Il a d'abord fait ses armes en droit international à l'ancien Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, où il a été conseiller juridique au bureau du procureur. Il est ensuite passé à la défense et a représenté le vice-président kényan William Ruto devant la CPI.
Ce Britannique a aussi été avocat de la défense de l'ex-président libérien Charles Taylor devant un tribunal spécial pour la Sierra Leone et avocat au Tribunal spécial pour le Liban basé à La Haye, créé pour traduire en justice les assassins de l'ex-Premier ministre libanais Rafic Hariri en 2005.
La CPI compte au total 123 membres sur les 193 qui composent les Nations unies. Les Etats-Unis, la Russie, la Chine, ou encore Israël, ne font pas partie de la CPI.
Le mandat du procureur est de neuf ans. La CPI est basée à La Haye.
Celui qui sera le troisième procureur de la Cour depuis sa création en 2002 aura en charge des dossiers volumineux et des affaires complexes, dans un tribunal dont la légitimité est en permanence remise en cause.
"Il y a beaucoup d'endroits dans le monde où la Cour pourrait agir", estime toutefois un ambassadeur sous couvert d'anonymat. C'est "une institution jeune" et "nous n'avons pas besoin de moins (de justice internationale) mais de davantage" de mise en responsabilité, ajoute-t-il.
Sanctions "inacceptables"
Les premières responsabilités du nouveau procureur consisteront à décider des prochaines étapes de l'enquête sur les crimes de guerre en Afghanistan et de l'enquête particulièrement controversée sur le conflit israélo-palestinien de 2014 à Gaza.
L'an dernier, l'administration de l'ex-président républicain américain, Donald Trump, avait pris pour cible Fatou Bensouda et un autre haut responsable de la CPI, leur imposant des sanctions, notamment une interdiction de voyager et un gel de leurs avoirs, en raison d'une enquête sur des crimes de guerre américains présumés en Afghanistan.
Israël et les Etats-Unis se sont également fermement opposés à une autre enquête sur des crimes de guerre présumés par les forces israéliennes et les groupes armés palestiniens.
La semaine dernière, les juges de la CPI ont cependant déclaré la Cour compétente pour les faits survenus dans les territoires palestiniens occupés, ce qui ouvre la voie à une enquête pour crimes de guerre.
L'administration du nouveau président démocrate Joe Biden n'a pas encore dit si elle comptait abandonner les sanctions à l'égard de Fatou Bensouda, qualifiées par cette dernière "d'inacceptables".
Mme Bensouda laisse derrière elle un bilan mitigé, même si, selon des spécialistes, elle a élargi la portée de la CPI.
Sous sa direction, l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo a été innocenté de crimes contre l'humanité, tandis que l'ex-vice-président de la République démocratique du Congo, Jean-Pierre Bemba, a été acquitté en appel.
Le Kényan Uhuru Kenyatta a également vu des accusations de crimes contre l'humanité abandonnées.
Mais Mme Bensouda a récemment obtenu des condamnations très médiatisées à l'encontre de Dominic Ongwen, un enfant soldat ougandais devenu commandant de l'Armée de résistance du Seigneur, et du chef de guerre congolais Bosco Ntaganda.
La CPI est la seule cour permanente pour les crimes de guerre au monde. Elle a souvent été critiquée pour avoir essentiellement pris en charge des affaires de pays africains.