DE LA PREMIERE, IL PASSE A LA DEUXIEME CATEGORIE ET ECHAPPE A LA PEINE DE MORT

Kayonza/Kigali, 15 mars 2002 (FH) – Le Tribunal de première instance de Kibungo, siégeant à Kayonza, vient de condamner à la prison à perpétuité le nommé Juvénal Nyamabumba pour génocide et crimes contre l'humanité, alors qu'il l'avait rangé dans la première catégorie. Juvénal Nyamabumba était jugé depuis deux semaines avec onze autres co-accusés pour crimes commis en avril 1994 dans leur cellule d'origine de Kabuye, une entité administrative de la commune de Kayonza (aujourd'hui district de Kabarondo), dans la préfecture de Kibungo, au sud-est du Rwanda.

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Outre le génocide et les crimes contre l'humanité, les douze prévenus étaient également poursuivis pour constitution de groupe de malfaiteurs, vols et pillages.

Juvénal Nyamabumba, qui était le chef de la cellule Kabuye, était considéré par le parquet comme le leader de ce groupe, responsable des massacres systématiques et ciblés contre leurs voisins de la minorité tutsi. De ce fait, il avait été classé dans la première catégorie des "génocidaires", constituée des planificateurs du génocide et des auteurs des viols et autres tortures sexuelles utilisés comme armes de génocide (loi organique de 1996 sur l'organisation des poursuites du génocide et des crimes contre l'humanité).

Au terme de cette loi, Juvénal Nyamabumba devait être condamné à mort. Mais les juges l'ont classé dans la deuxième catégorie, et l'ont condamné à la prison à vie, appliquant la loi organique de janvier 2001 instituant les juridictions populaires Gacaca.

Cette loi de janvier 2001, plus clémente que celle de 1996, stipule en effet que les personnes rangées dans la première catégorie en raison de leurs crimes, mais qui plaident coupable sans que leurs noms aient été préalablement publiés dans la journal officiel de la République, seront reclassés dans la deuxième catégorie. Elles encourent une peine d'emprisonnement allant de 25 ans à la perpétuité. Or, Juvénal Nyamabumba était dans ce cas : il a recouru à la procédure d'aveu et de plaidoyer de culpabilité et son nom ne figure sur aucune des listes de la première catégorie publiées jusqu'ici, ont constaté les juges.

C'est la première fois qu'un tribunal rwandais, dans son jugement, applique la loi sur les Gacaca avant leur démarrage effectif. Les formateurs des juges de ces juridictions populaires sont actuellement en formation. Ce n'est qu'après la formation des juges eux-mêmes que les procès devraient commencer.

Dans ce procès de Kayonza, trois prévenus ont été condamnés à 18 ans de prison, six autres à seize ans, un à douze ans de prison. Tous les dix, et leur leader Nyamabumba, ont été condamnés subsidiairement à la déchéance civique perpétuelle. Ils devront par ailleurs payer conjointement une somme de 28.223.000 francs rwandais (environ 61.335 dollars américains) de dommages-intérêts, frais de justice et droits proportionnels au profit du trésor public. Enfin, la seule femme du groupe, Agnès Mukarukwaya, a été acquittée. Les frais de justice qui vont avec son cas ont été mis sur le compte de l'Etat, a décidé le tribunal.

Depuis le début des procès de génocide et crimes contre l'humanité en décembre 1996 jusqu'à la fin de l'année 2001, la justice rwandaise a condamné environ 660 personnes à la peine de mort, selon la Ligue rwandaise pour la défense et la promotion des droits de l'homme (LIPRODHOR). Seules 24 d'entre elles ont réellement été exécutées jusqu'ici. 1.795 ont été condamnées à la prison à perpétuité, et 2.566 acquittées. Tout cela fait un total de 6.454 accusés jugés au cours de cette période, précise la LIPRODHOR.

Quelque 115.000 personnes accusées de génocide sont détenues dans les prisons rwandaises. Les juger toutes au rythme actuel des procès mettrait plusieurs décennies. Les autorités rwandaises espèrent réduire ces délais à moins de dix ans seulement, grâce aux juridictions Gacaca.
WK/GF/FH (RW0315A)