Entre 3.000 et 5.000 militants, selon les estimations de la police et des organisateurs, ont participé samedi à Abidjan à un meeting de la coalition contre le chef de l'Etat ivoirien, Alassane Outtara, seul candidat d'envergure déclaré avant la présidentielle d'octobre, a constaté l'AFP.
Les cris de "Libérez (Laurent) Gbagbo" ont émaillé la manifestation, qui s'est tenue de 11H30 à 14H00 (locales et GMT) à Yopougon, une commune d'Abidjan considérée comme favorable à l'ex-président ivoirien, détenu depuis trois ans par la Cour pénale internationale (CPI), où son procès pour "crimes contre l'humanité" débutera le 10 novembre.
"Ce rassemblement n'est pas encore suffisant pour faire peur à Ouattara", a convenu Mamadou Koulibaly, ancien président de l'Assemblée nationale sous Laurent Gbagbo et instigateur de la Coalition nationale pour le changement (CNC), qui a appelé à entreprendre une démarche de "séduction" des militants pro-Ouattara avant la présidentielle.
"Ouattara, son bilan politique, économique et social est mauvais, a affirmé M. Koulibaly. La CNC offre une alternative."
Officiellement lancée le 15 mai, la coalition réunit désormais une vingtaine de personnalités politiques ivoiriennes issues de la majorité comme de l'opposition, dont la plus illustre est l'ex-Premier ministre Charles Konan Banny (majorité).
"Nous sommes la nouvelle Côte d'Ivoire", a lancé ce dernier, vêtu d'un élégant habit traditionnel gris, appelant les militants à "aller s'inscrire sur les listes électorales".
Les chances de la CNC de s'imposer au vu de ses difficultés à rassembler ses militants paraissent toutefois "très faibles", estime un bon connaisseur de la vie politique ivoirienne, qui voit le président Outtara réélu "haut la main".
D'autant que les leaders de la coalition ne sont toujours pas mis d'accord sur une candidature unique. Alors que M. Banny demandait samedi à ses soutiens de se manifester dans le public, des remarques grinçantes se faisaient entendre parmi les militants, très majoritairement issus de l'opposition pro-Gbagbo.
"Banny, il se croit à la Bcéao", la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'ouest (la zone franc CFA), doit il fut gouverneur de 1994 à 2005, a ironisé l'un d'entre eux.
"Même si c'est un bout de bois qui représente la CNC contre Ouattara, on votera pour lui", a toutefois commenté Luc Gnahoré, 39 ans, un sympathisant de Laurent Gbagbo présent au rassemblement samedi.
La Côte d'Ivoire vivra en octobre une présidentielle qualifiée de cruciale pour la stabilisation du pays, après la crise post-électorale de 2010-2011. Plus de 3.000 Ivoiriens étaient morts en cinq mois de violences causées par le refus de Laurent Gbagbo de reconnaître la victoire d'Alassane Ouattara.
"En cinq ans, Alassane Ouattara n'a rien fait", a harangué Bertin Konan Kouadio, député de la majorité et figure de la CNC. "Nous sommes nombreux, nous sommes une force. Nous sommes capables de le chasser du pouvoir", a-t-il lancé, sous les vivats de la foule.
La CNC exige la dissolution de la Commission électorale indépendante (CEI), qu'elle considère favorable au président sortant, et demande la libération des "prisonniers politiques", notamment de Laurent Gbagbo.
Alassane Ouattara est considéré comme le grand favori du scrutin à venir. Son bilan économique et social est loué par la communauté internationale, qui se montre plus sceptique quant à la réussite de la réconciliation qu'il prône.