« Nous sommes dans les préparatifs, je ne saurais vous donner le calendrier précis pour l'instant, mais le lancement aura lieu bientôt », a assuré Ntanyungu. La CVR est prévue par l'Accord d'Arusha (Tanzanie) d'août 2000. Elle aurait théoriquement du être mise en place en 2001.
Cet accord prévoit diverses mesures d’ordre politique et juridique, mais aussi relatives à la réconciliation. Dans ce cadre, une Commission internationale d'enquête judiciaire (CIEJ) doit enquêter et établir les faits, avant de décider si ces faits tombent sous la qualification de génocide, de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité. En ce cas, leurs auteurs seront traduits devant un Tribunal spécial (TS). La CVR est quant à elle chargée de qualifier les autres crimes commis depuis 1962.
Après la visite au Burundi en mai dernier de Louise Arbour, Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, la consultation de la population avait été annoncée pour ce mois de septembre. Cette consultation devait aussi porter sur l'opportunité et l 'existence du TS.
Ancien ministre de la fonction publique, M. Ntanyungu a été nommé président de la CVR le 10 août dernier. Son vice président est Françoise Ngendahayo, ancienne ministre des droits de l'homme et ex collaboratrice du greffier au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).
Selon le président de la CVR, ce retard n’est pas du à la crise qui prévaut au sein de l'Assemblée nationale. Pour Ntanyungu la raison est plus ancienne. « Les problèmes liés au fonctionnement de la CVR ne datent pas d'aujourd'hui car l'Accord d'Arusha prévoit que ce mécanisme devait démarrer avec la première année de la transition (qui a commencé en novembre 2001) », a-t-il dit avant de rappeler que le processus devait être déjà fonctionnel pendant les élections de 2005. «Il faut de la patience, ce sont des problèmes qui durent depuis longtemps mais qui sont en passe de trouver une solution », a-t-il insisté.
Pour sa part, Jean Marie Ngendahayo, ancien ministre des affaires étrangères et ex-haut cadre du parti au pouvoir, aujourd'hui démissionnaire, regrette lui aussi que le gouvernement n'ait pas initié la campagne d'explication à temps : « Les autorités auraient du adopter une attitude pro-active depuis longtemps», a-t-il souligné lors d'un entretien avec l’agence Hirondelle.
Depuis l'Accord d'Arusha et les accords de cessez-le-feu ayant conduit aux élections démocratiques de 2005, les autorités burundaises ont affiché une attitude plutôt ambiguë vis à vis de l'existence et du fonctionnement des deux mécanismes de justice transitionnelle, tendant plutôt à privilégier la confession et le pardon. Une position différente de celle de l'ONU.
Au cours de sa visite au Burundi en mai dernier, Louise Arbour a levé la confusion en déclarant que « du point de vue de l'ONU, l'existence de la CVR et du TS ne sont plus une question à discuter », mais que des consultations étaient toujours en cours sur l'interaction entre les deux. Elle a sans équivoque affirmé que « le procureur du TS doit être indépendant ». Le génocide, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité étant des crimes « imprescriptibles », ils sont par conséquent « in-amnistiables » a-t-elle insisté.
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