Musulmans recrutés comme auxiliaires civils de l'armée française durant la guerre d'Algérie (1954-1962), les harkis ont mené de longues années de combat afin d'obtenir une "réparation" effective par la France des dommages liés à ce passé.
En avril 2024, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné la France pour les conditions de vie "non compatibles avec le respect de la dignité humaine" dans les camps d'accueil où les harkis ont passé des années après leur arrivée d'Algérie dans les années 1960 et 1970. Elle avait aussi jugé insuffisants les montants des réparations accordées.
Pendant la guerre, l'armée française avait recruté localement jusqu'à 250.000 de ces Algériens qui tiraient leur nom du mot "harka" ("groupe mobile" en arabe). Mais après les accords d'Evian, le 18 mars 1962, consacrant la défaite française en Algérie, le gouvernement français avait refusé leur rapatriement massif.
Seuls 42.000 harkis sont alors évacués en France par l'armée. D'autres y parviennent clandestinement et, au total, environ 90.000 personnes arrivent dans l'Hexagone entre 1962 et 1965, dont la moitié atterrit dans des camps aux conditions de vie déplorables, où certains enfants perdront la vie faute de soins.
Ceux qui restent au pays, considérés comme des traîtres par le nouveau régime algérien, sont victimes de terribles représailles, qui font dans leurs rangs 10.000 à 25.000 morts selon l'historien Benjamin Stora, 150.000 selon certaines associations, qui portent plainte sans succès en 2001 pour crime contre l'humanité.
Les harkis et leurs descendants formeraient aujourd'hui une communauté de plusieurs centaines de milliers de personnes en France.
- Tombes de fortunes -
Depuis 1974, plusieurs de leurs enfants ont mené des grèves de la faim, et des associations ont régulièrement manifesté pour la reconnaissance de leur drame. Leurs parents ont connu une intégration difficile en France, à la fois assimilés à des immigrés et rejetés par les immigrés eux-mêmes. En 2000, le président algérien Abdelaziz Bouteflika les avait qualifiés de "collaborateurs", excluant leur retour en Algérie.
Le 25 septembre 2001, Jacques Chirac célèbre la première journée d'hommage national aux harkis, officialisée par un décret de 2003. En 2005, une loi prévoit une allocation de reconnaissance pour les harkis ou leurs orphelins.
François Hollande reconnaît en 2016 les "responsabilités des gouvernements français dans l'abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditions d'accueil inhumaines des familles transférées dans les camps en France".
En 2018, un "plan harkis" débloque 40 millions d'euros sur quatre ans pour revaloriser notamment les pensions des anciens combattants. Une somme jugée bien insuffisante par les associations.
La même année, le Conseil d'Etat condamne l'Etat à indemniser un fils de harki ayant subi des "séquelles" liées à sa vie dans un camp.
Le 20 septembre 2022, Emmanuel Macron demande "pardon" aux harkis au nom de la France et promet une "réparation" actée dans la loi le 15 février 2022. Cinquante millions d'euros doivent abonder le fonds d'indemnisation.
En 2023, le gouvernement annonce que des milliers de harkis ou descendants vont être éligibles à de nouvelles indemnisations.
La même année, des fouilles entreprises par l'Etat dans un ancien camp de harkis dans le Gard mettent au jour des tombes de fortune. A l'automne 2024, sur le camp de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), des tombes d'enfants harkis décédés entre 1962 et 1964 sont aussi découvertes mais dépourvues d'ossements. Selon le maire de la commune, les ossements avaient été transférés en 1986 dans un cimetière de la commune.