Souvent raillés ou injuriés dans leur pays où leur message d’amour et de paix se heurte parfois à l’intolérance et à l’extrémisme, l'Archevêque catholique de Bangui, Mgr. Dieudonné Nzapalainga, le président du Conseil islamique de Centrafrique, l'Imam Oumar Kobine Layama et le président de l'Alliance évangélique, le pasteur Nicolas Guérékoyaméné-Gbangou trouvent plus de reconnaissance de leur travail auprès des étrangers.
Les trois ecclésiastiques qui luttent, sans répit, pour le retour à la paix dans leur Centrafrique déchirée par des conflits intercommunautaires, ont reçu mercredi à Genève, au nom de leur Interfaith Peace Platorm, le Prix Sergio de Mello 2015. Il s’agit d’une reconnaissance des « efforts accomplis en vue de la réconciliation des groupes religieux dans l'espoir de parvenir à une paix durable en République centrafricaine (RCA), pays dévasté par une guerre entre fractions », indique un communiqué de la Fondation Sergio de Mello.
Ce prix est remis tous les deux ans à une personne, un groupe ou une organisation ayant fait quelque chose de spécial et d’unique pour réconcilier des personnes et des parties en conflit afin de perpétuer l’idéal du Brésilien Sergio Vieira de Mello. Alors représentant spécial du secrétaire général des Nations unies à Bagdad, le diplomate brésilien a été tué le 19 août 2003 dans une attaque à la voiture piégée.
Créée en 2013, en plein conflit armé, la plateforme animée par les trois leaders religieux centrafricains prône le dialogue interreligieux à titre de mesure préventive contre la violence religieuse pour construire la paix en RCA.
En véritables croisés, les trois hommes sillonnent inlassablement leur pays pour dialoguer avec les communautés sur la nécessité de promouvoir la paix, le respect mutuel, la tolérance et la confiance.
Sur le plan international, ils ont plaidé avec succès pour l’envoi de troupes des Nations unies en Centrafrique.
Le prix de l’ONG Search for Common Ground
« Interfaith Peace Platform est un exemple de ce qu'il peut être fait en cas de crise majeure dans un pays victime de fractures sociales, culturelles et religieuses conduisant à la violence », a déclaré Laurent Vieira de Mello, président de la Fondation Sergio Vieira de Mello. « Interfaith Peace Platform peut servir de modèle et être reproduit dans de nombreux autres pays touchés par des conflits. Leur action démontre que la prévention par le dialogue est la clé pour résoudre les crises de réfugiés et de déplacés dans le monde », a-t-il ajouté.
Ce n’est pas la première reconnaissance de l’œuvre des trois dirigeants religieux. A la fin de l’année dernière, ils étaient à New York pour la réception d’un prix de l'organisation américaine Search for Common Ground. Cette ONG honore chaque année une personnalité ou des personnalités ayant accompli un travail exceptionnel dans la résolution des conflits. Au palmarès des lauréats de ce prestigieux prix, se trouve notamment l’Archevêque noir sud-africain Desmond Tutu, également Prix Nobel de la Paix.
En Centrafrique, le combat quotidien pour la tolérance et la coexistence pacifique n’est pas l’apanage de hauts responsables religieux. En témoigne le jeune prêtre catholique de campagne Bernard Kinvi, co-lauréat, en 2014, du Prix Alison Des Forges, du nom de l’ancienne conseillère senior à Human Rights Watch (HRW) durant près de vingt ans, décédée le 12 février 2009 lors d’un accident d’avion dans l’état de New York.
Historienne et militante des droits de l’homme, Alison Des Forges faisait incontestablement partie des principaux spécialistes mondiaux du Rwanda, du génocide des Tutsis de 1994 et de ses conséquences.
Le père Kinvi, qui dirige l'hôpital de la mission catholique de Bossemptele, en République centrafricaine, a sauvé en 2014 les vies de centaines de musulmans assiégés, qu'il est allé chercher à leurs domiciles pour leur donner refuge à la mission catholique, au péril de sa propre vie.