Au centre de la conférence de lundi, se trouvera l'état de santé de l'ancien président du MRND, Mathieu Ngirumpatse, dont la maladie paralyse les débats depuis août 2008 alors qu'un seul accusé, l'ancien vice-président du parti, Edouard Karemera, avait commencé à présenter ses témoins. Dans cette affaire considérée comme l'une des plus importantes du TPIR, le procureur veut prouver la réalité d'une entreprise criminelle commune entre Ngirumpatse, Karemera et Joseph Nzirorera, ancien secrétaire général de l'ex-parti présidentiel. Ainsi, chaque accusé a tout intérêt à suivre dans le moindre détail chaque déposition. Certes, ils sont assistés par des avocats mais la jurisprudence du tribunal a consacré leur droit d'être physiquement présent. A moins qu'ils n'y aient renoncé expressément.
Lundi prochain, la chambre, après avoir entendu les parties, déterminera, sur la base du rapport du docteur Marie- Françoise Epée- Hernandez, médecin attitré du tribunal, si l'ex-président du MRND est en état ou non de se présenter à l'audience. En cas d'incapacité pour Ngirumpatse d'être physiquement présent au procès, les discussions de lundi porteront alors sur l'éventualité de poursuivre son procès sans lui, mais tout en garantissant le respect de ses droits et de ceux de ses co-accusés.
Perturbée par la maladie de Ngirumpatse, la défense de Karemera a déjà donné le ton. « Le procès ne peut continuer sans la présence » de l'ancien président du parti, « comme le confirme une constante jurisprudence », écrivent Dior Diagne et Moussa Félix Sow, les deux avocats de Karemera, dans une requête datée du 26 janvier.
En novembre dernier, Ngirumpatse avait exceptionnellement autorisé l'audition, en son absence, de témoins de Karemera qui étaient restés bloqués au siège du tribunal. Cette dérogation était assortie d'un certain nombre de conditions : la possibilité pour l'accusé malade de disposer de l'enregistrement vidéo des débats ainsi que d'un délai suffisant entre les audiences pour discuter avec son équipe de défense.
Ces conditions ont-elles pu être respectées ? Il n'a pas été possible de recueillir la réponse des défenseurs de Ngirumpatse qui n'étaient pas encore de retour à Arusha vendredi.
Mais ceux de Karemera, dans leur requête évoquée plus haut, ont, quant à eux, déjà dressé un bilan négatif de cet exercice. « Cette solution s'est avérée inefficace puisque les audiences se sont poursuivies au rythme habituel, et que le temps nécessaire à Ngirumpatse pour exploiter les données d'audience fût insuffisant. Il fut submergé par les documents à exploiter et les supports audio à visionner».
« Face à cet échec, poursuivent les avocats de Karemera, l'unique solution serait de suspendre la procédure jusqu'à une nouvelle évaluation de l'état de santé de Ngirumpatse. En l'absence de toute certitude que M.Ngirumpatse ne pourra pas revenir au procès, la suspension s'impose », conclut l'équipe de défense de Karemera.
Les juges, conduits par Dennis Byron, également président du TIPR, décideront lundi.
Les trois hommes comparaissent depuis septembre 2005. Un premier procès dans lequel ils étaient jugés avec une autre personnalité avait été annulé par la chambre d'appel en octobre 2004 après une année d'audiences. Les vicissitudes de ce procès portent un coup dur à la stratégie de fin de mandat de ce tribunal auquel le Conseil de sécurité a demandé avec insistance de terminer les procès en première instance d'ici à la fin de l'année.
ER/GF
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