C'est la première fois dans l'histoire du TPIR qu'un défenseur est frappé d'une telle sanction.
Me Turner, toujours sur la brèche, défend un avocat rwandais, Léonidas Nshogoza, poursuivi devant le TPIR pour subornation de témoins.
« La chambre sanctionne le conseil de la défense, en lui imposant une amende de 5.000 dollars et ordonne, en conséquence, au greffier de récupérer ledit montant », indique une décision rendue mercredi et dont une copie a été transmise à l'agence Hirondelle jeudi.
Le greffe doit, par ailleurs, selon cette ordonnance, « requérir l'approbation du président (du TPIR) pour que le mauvais comportement d'Allison Turner soit signalé au corps professionnel chargé de la régulation du comportement des avocats dans son Etat d'enregistrement ».
L'avocate canadienne avait protesté par voie écrite et même devant les juges contre une décision de la chambre réduisant le nombre des témoins de Nshogoza. Suite à ce désaccord, la défense n'a pas pu démarrer lundi comme prévu.
Alors que le procureur n'avait cité que 5 témoins, la partie adverse avait, de son côté, envisagé dans un premier temps, d'en présenter une quarantaine.
Mais la chambre, usant de son pouvoir discrétionnaire, lui avait ordonné, dans une décision datée du 23 février dernier, de ne pas dépasser 10 témoins. Deux jours plus tard, Me Turner revenait à la charge, en demandant aux juges de reconsidérer leur décision. Le lendemain, dans une brève décision écrite, la chambre maintenait la liste de 10 témoins, mais en accordant à l'accusé la possibilité de déposer comme onzième témoin s'il le souhaitait.
Lundi, alors que la chambre s'attendait au début de la présentation des moyens de défense, l'avocate a indiqué qu'elle n'avait réduit sa liste qu'à 18 témoins.
Les débats ont alors été reportés de deux jours pour permettre à Me Turner de déposer la liste des 10 témoins. Mais lorsque juges et parties se sont retrouvés mercredi matin, l'avocate n'avait pas encore obtempéré.
Ce manquement constitue « un flagrant mépris » qui « obstrue la procédure et va à l'encontre de l'intérêt de la justice », selon les trois juges qui, dans leur ordonnance, trouvent par ailleurs « inacceptables » « le ton et le langage » de l'avocate lorsqu'elle s'adresse à eux à l'audience.
Me Nshogoza, du barreau de Kigali, est accusé d'avoir suborné 5 témoins alors qu'il travaillait comme enquêteur au sein de l'équipe de défense de l'ex-ministre de l'Enseignement supérieur Jean de Dieu Kamuhanda, condamné par le TPIR à la prison à vie.
Les faits se seraient déroulés à Kigali et à Gasabo (banlieue de Kigali) ainsi qu'à Arusha, entre le 1er mars 2004 et le 31 mai 2005.
Le procureur a cité, à l'appui de ces accusations contre Me Nshogoza, 5 témoins à charge qui ont été entendus du 9 au 19 février.
L'accusé encourt une peine maximale de cinq ans de prison ou une amende de 10.000 dollars américains, voire les deux.
ER/GF
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