Par une froide journée de mars 2023, Angelina Dovbnya, 20 ans à l'époque, se promène à Kremenchuk avec un gros ours en peluche dans les mains. Elle enregistre joyeusement une vidéo dans laquelle elle remercie son interlocuteur pour ce cadeau. L'argent pour le jouet lui a en fait été envoyé par un agent spécial russe. À sa demande, elle documente des infrastructures et des installations militaires. Alors qu'elle est en train d’accomplir l'une de ces "tâches", la jeune fille est appréhendée par les services de renseignement ukrainiens, le SBU. Elle est accusée de trahison.
Angelina est originaire de Pavlysh, une ville située près de Svitlovodsk dans l'oblast de Kirovohrad, dans le sud de l'Ukraine. Elle étudie dans une école secondaire de la ville voisine de Kremenchuk, dans l'oblast de Poltava, où elle vit pendant ses études. Elle étudie ensuite à la faculté de droit, mais est renvoyée au bout de deux ans. Au moment de l'invasion par la Russie en février 2022, elle n’a pas d’activité et vit à Kremenchuk et à Kyiv, où elle passe son temps avec des amis.
En février 2023, elle reçoit un message d'un individu qui se présente comme un officier russe nommé Igor Ruskikh. Il lui propose de l'argent en échange de vidéos et de coordonnées d'installations militaires et d'infrastructures. Selon l'enquête, la jeune femme accepte. Elle ne cache pas ses opinions pro-russes. Elle a nommé son profil sur TikTok "Damerusse" et stocke des vidéos de soldats russes et du président russe.
L'enquête classe ses actions sous deux articles : haute trahison selon la loi martiale et justification de l'agression armée de la Russie. L'affaire est entendue par le tribunal de district de la ville de Svitlovodsk. Depuis mars dernier, elle est incarcérée dans un centre de détention provisoire, sur ordre du tribunal. L'acte d'accusation est déposé en août. Entre août et octobre, le tribunal examine les preuves du dossier, entend les témoins et la déposition de l'accusée.
Cette affaire peut permettre de comprendre comment des jeunes gens qui ont grandi dans l'Ukraine indépendante et n'ont apparemment pas été affectés par le "génome soviétique" peuvent décider de collaborer avec l'ennemi et de trahir leur patrie. Elle reflète également une tendance qui semble avoir émergé dans le travail des organes judiciaires ukrainiens. La jeune femme a en effet plaidé coupable et signé une déclaration pour être incluse dans les listes d'échange entre l'Ukraine et la Russie. Cette proposition lui a apparemment été faite dans le centre de détention provisoire, où il lui a été expliqué que l'échange n'était possible qu'après le verdict, et que le procès serait rapide en cas d’aveu de culpabilité. Les personnes accusées de trahison sont souvent disposées à échanger un plaidoyer de culpabilité contre leur inscription sur les listes d'échange afin de pouvoir partir pour la Russie après leur condamnation. Certains considèrent cette procédure comme juridiquement douteuse, car les civils ukrainiens ne sont pas des prisonniers de guerre, qui sont généralement échangés contre du personnel militaire.
Filmer des "châteaux de sable"
Le 12 septembre, le tribunal examine la correspondance entre l'accusée et le Russe, ainsi que les fichiers de son téléphone portable. En février et mars, le contact d'Angelina lui a demandé de filmer des infrastructures et des installations militaires à Pavlysh, Svitlovodsk et Kremenchuk. L'enquête met en évidence au moins dix occasions où elle a pris des photos ou transmis des informations au Russe.
Angelina documente notamment une station électrique, des unités militaires, des bâtiments administratifs, des points de contrôle près d'une installation de défense et un pont stratégique à Kremenchuk. Elle se rend sur les sites en personne et trouve également des informations sur le canal Telegram. Elle transfère en particulier un fichier contenant un fragment de carte indiquant l'emplacement des points de contrôle près de la raffinerie de pétrole de Kremenchuk ; une flèche indique les endroits où il est possible de passer, et un cercle indique les endroits où le passage est restreint.
Dans sa ville natale de Pavlysh, elle documente une gare ferroviaire et les entrepôts voisins, et à Svitlovodsk, le bâtiment d'une entreprise de défense. Ce dernier lieu a peut-être été enregistré par accident. Il semblerait que le bus de Kremenchuk qu'elle a pris pour rentrer chez elle soit tombé en panne et soit resté bloqué à Svitlovodsk. Saisissant cette occasion, elle prend une photo de la façade du bâtiment depuis la fenêtre du bus.
La jeune femme déclare avoir trouvé les photos du site de stockage de pétrole d'Oleksandria sur Internet. Afin d'obtenir de l'argent d'Igor, elle a modifié la date du fichier et le lui a envoyé. "J'ai suivi une voie frauduleuse, j'ai écrit que j'étais là, mais j'ai simplement trouvé les photos sur Internet. Oui, il m'a crue", déclare-t-elle. Igor demande aussi de vérifier les carrières du coin que, pour les besoins du complot, il appelle "châteaux de sable".
Le tribunal examine les vidéos réalisées par l'accusée. Outre les installations enregistrées qui intéressent le Russe, elles contiennent également les pensées personnelles d'Angelina. Par exemple, en mars, elle enregistre un message dans lequel elle lui dit que tout le monde la juge et qu'elle déteste les services de sécurité ukrainiens. Elle dit à Igor que "tout le monde sait ce qui est bien et ce qui est mal". Elle dit aussi qu'elle a dépensé tout l'argent qu'il lui a envoyé, car elle n'a "jamais pu vivre à bas prix". En arrière-plan, on entend le grondement d'un générateur. Le mois de mars a été marqué par de longues coupures d'électricité dues aux attaques russes.
"Une fille bizarre et idiote"
Une autre partie du dossier judiciaire montre qu'Angelina a enregistré une vidéo pour Igor près de l'ancien centre commercial "Amstor", à Kremenchuk. "On ne sait pas encore qui l'a bombardé. Mais ils sont déjà en train de construire une sorte d'entrepôt ici", commente-t-elle. 22 personnes ont été tuées lors de l'attaque russe sur ce centre commercial, le 27 juin 2022.
Outre les dossiers mentionnés, le tribunal examine la page de la femme sur la plateforme TikTok. Elle y a posté des vidéos sur l'armée russe et Vladimir Poutine. Selon les conclusions de l'expert du tribunal, les messages justifient l'agression armée de la Russie, ce qui constitue une infraction pénale en Ukraine. Angelina insiste sur le fait que ces vidéos n'étaient pas accessibles au public et qu'elles étaient uniquement destinées à son usage privé. Elle confirme toutefois qu'à la demande de deux de ses amis, elle leur a montré ce qui se trouvait sur sa page.
Les deux amis témoignent devant le tribunal. L'une déclare avoir cessé de communiquer avec Angelina lorsqu'elle a vu qu’elle avait pris des selfies devant des soldats et des drapeaux russes. Un autre ami déclare qu’Angelina disait avoir une sorte de travail à Kremenchuk et s’être rendue en Russie, où elle avait des amis. Il la décrit comme une "fille bizarre et idiote".
Un autre témoin déclare qu'en mars, Angelina lui a demandé de la conduire de Kremenchuk à Pavlysh parce qu'elle avait acheté un gros ours en peluche. En chemin, il doit s'arrêter dans une carrière pour des raisons professionnelles. Plus tard, il découvrira qu'elle avait pris une photo du site.
Recrutement à Marioupol
Un interrogatoire de l'accusée a lieu le 27 septembre. Au cours de celui-ci, Volodymyr Leshchenko, procureur au parquet régional de Kirovohrad, obtient des informations supplémentaires sur la manière dont Angelina s'est engagée sur la voie de la trahison. Elle déclare qu'un mois avant l'invasion russe à grande échelle, elle s’est rendue en Crimée - une partie de l'Ukraine annexée par la Russie en 2014 - avec des amis pour passer des vacances. Sur le chemin du retour, elle se retrouve à Marioupol, la principale ville ukrainienne sur la mer Noire qui a été attaquée et finalement envahie par la Russie au début de la guerre de 2022. Angelina raconte s’être cachée dans des sous-sols à cause des combats. Un jour, l'armée russe la trouve et l'emmène pour vérification. Elle passe un certain temps à Marioupol à faire du "bénévolat". Puis elle commence à demander l'autorisation de rentrer chez elle. Elle est libérée après avoir signé un document confidentiel de coopération.
Selon l'accusée, alors qu'elle se trouve déjà à Pavlysh, elle reçoit un appel du susnommé Igor, qui lui dit l’avoir vue à Marioupol. Il lui demande de coopérer avec la Russie. Elle refuse dans un premier temps. Peu après, il la rappelle, mais à partir d'un numéro de téléphone ukrainien, lui évoque le document signé et lui dit qu'elle est désormais une collaboratrice et qu'elle doit coopérer.
La femme admet qu'elle a travaillé pour gagner de l'argent. Au début, Igor lui envoie 2 à 3 000 hryvnias (entre 50 et 80 euros), puis 20 à 30 000 hryvnias pour chaque lieu documenté. Au total, elle a reçu environ 150 000 hryvnias (environ 3 900 euros).
- "Vous comprenez les conséquences de vos actes et ce qui se passe dans notre pays ? demande le procureur Leshchenko.
- Je comprends les conséquences et je les ai comprises à l'époque. Tout ce que j'avais à l'esprit, c'était ces finances. Je craignais que mon père ne meure et je lui ai demandé de prendre des jours de congé puisque je faisais ce travail", répond l'accusée.
Elle déclare également qu'elle communiquait avec Igor par vidéo et qu'il lui montrait les zones à vérifier sur des cartes. Elle indique que la plupart des lieux qu'elle filmait ne disposaient pas de personnel ou d'équipement militaire et qu'elle envoyait "au moins un peu de matériau pour obtenir l'argent". Elle voulait "gagner sa confiance pour qu'il l'apprécie et lui envoie plus d'argent".
Essayer de comprendre Angelina
L'avocat de la défense Viktor Pogribnyi, engagé dans le cadre d'un contrat avec le Centre d’aide juridique gratuite, interroge sa cliente sur ses motivations. Elle répète qu'elle voulait gagner de l'argent. L'avocat veut également savoir si les lieux dont elle a envoyé les coordonnées ont été frappés par des missiles. Angelina le nie. Cependant, le procureur insiste pour que le tribunal retire cette question, car l'accusée n'est peut-être pas en possession de toutes ces informations.
Le panel de trois juges aborde un certain nombre de questions anthropologiques pour comprendre comment l'accusée s'est retrouvée dans le box. Le tribunal s'intéresse à l'éducation de la jeune fille et à son état d'esprit. Cette dernière déclare que lorsqu'elle était au lycée à Kremenchuk, tout le monde parlait russe et que "ce n'était pas un problème". Elle raconte qu'elle partait souvent en vacances avec sa tante en Crimée annexée, ainsi que pour rendre visite à des amis à Saint-Pétersbourg.
- "Quand avez-vous développé l'idée que la Russie est une bénédiction et que vous avez commencé à agir contre l'Ukraine ? demande la juge Tamara Harmash en entamant l'interrogatoire.
- Eh bien, c'est arrivé comme ça, je préférais ça, répond Angelina.
- Rien n'arrive tout seul. Peut-être avez-vous été influencée ? Vous êtes une jeune fille. Nous avons toutes sortes de personnes dans ce cas. Il y a ceux qui sont nostalgiques de l'Union soviétique et de leur jeunesse. Quelles sont vos raisons ?
- Eh bien, j'ai quelques amis en Russie.
- Où et à quel âge étiez-vous en Russie ?
- À Saint-Pétersbourg, quand j'avais 18 ans, et j'y suis retournée plus tard.
- Écoutez, lorsque les hostilités dans le Donbass [à l'est de l'Ukraine, où la guerre a commencé en 2014] étaient en cours, il y avait encore un moyen direct de se rendre en Russie. Pourquoi n'êtes-vous pas partie à ce moment-là si vous êtes une telle patriote de la Russie ?
- Je voulais être plus souvent avec ma mère. Rien ne m'empêchait de faire des allers-retours.
- Vous savez très bien ce qui s'est passé à "Amstor". Peut-être que quelqu'un que vous connaissez y était ?
- Oui, mes amis sont morts.
- Probablement qu'un coordinateur des frappes comme vous était en train de filmer là. Et si c'était vous, ou votre mère, celle que vous aimez tant ? Dans la vidéo que vous avez tournée près de l'endroit où les gens sont morts, vous expliquez à Igor que [le lieu] "a été pulvérisé", bien que vous utilisiez un autre mot. Vous le dites avec une certaine satisfaction. Qu'est-ce qui se passe dans votre esprit, quel genre de personne êtes-vous ?
- Non, je ne peux pas expliquer.
- Votre mère vit-elle à Pavlysh ?
- Oui, avec mon beau-père. Nous avons une bonne relation.
- Vous avez donc filmé différents sites, y compris à Pavlysh, où vit votre mère. À quoi pensiez-vous en filmant ? Que vous ne seriez pas touchée, ou est-ce Igor qui vous l'a dit ? Avez-vous réalisé qu'il n'y avait pas de marche arrière possible : vous transmettez, et demain la mort arrive. Que peut-être elle viendra pour vous. Étiez-vous prête à mourir pour la Russie ?
- Non."
L’espoir d’un échange de prisonniers
- "Vous voulez aller en Russie dans le cadre d'un échange [de prisonniers]. Nous le voulons aussi, car nous préférons que nos soldats nous protègent. Que ferez-vous là-bas ? Qui a besoin de vous là-bas ? poursuit la juge.
- Je ne sais pas comment les choses vont se passer : certains sont renvoyés en mission, d'autres sont libérés.
- Vous venez de dire qu'Igor vous a versé de l'argent, mais que vous lui avez envoyé des photos provenant d'Internet. En fait, vous avez commis une fraude. Ne craignez-vous pas de devoir répondre de vos actes en Russie ?
- Non, et comment le sauraient-ils ?
- Vous êtes si intelligente et expérimentée. Pensez-vous aller voir votre homme chéri ? (c’est-à-dire probablement Igor).
- Non, j'ai des gens à voir là-bas, beaucoup de connaissances.
- Lorsque vous vous êtes intéressée à ces événements politiques, vous avez dû voir l'interview de Poutine, qui a déclaré qu'il ne pardonnait pas la trahison. Donc, pour lui, vous êtes aussi une traître.
- Eh bien, qu'il en soit ainsi. Je veux toujours procéder à l'échange.
- Et vous êtes prête à devenir un soldat russe ?
- Oui, je le suis.
- Et de tirer sur nos soldats ?
- Et s'ils me tirent dessus ?
- Mais vous aviez le choix. Vous étiez en Ukraine, mais vous avez continué vos activités.
- Il y avait les conditions que j'avais signées à Marioupol.
- Oui, vous avez peut-être été recrutée. Vous aviez peur de mourir ou vous vouliez l'argent ?
- J'avais peur de mourir.
- Vous n'aviez pas le choix ?
- Eh bien, si j'ai le choix, je ferai les choses différemment."
"Je tirerai sur mes amis bien sûr"
Le juge Yuriy Melnychyk poursuit l'interrogatoire. Il lui demande comment elle s’est rendue en Crimée. Angelina lui dit que peu avant l'invasion de 2022, son petit ami, qui servait dans les forces armées, lui avait envoyé "une grosse somme d'argent". Elle ajoute qu'il est mort au cours d'un entraînement, peu avant le début de la guerre.
Le juge lui demande également d'expliquer pourquoi elle conservait des vidéos de militaires russes. L'accusée répond que c'est difficile à expliquer, affirmant qu'elle aimait simplement les militaires.
- "Selon l'expertise, ces vidéos justifient l'agression de la Fédération de Russie. Êtes-vous d'accord avec cela ? demande le juge.
- Oui et non. Je ne peux pas ne pas la soutenir et je ne peux pas la soutenir.
- Est-ce que vous aimez ce qui se passe actuellement dans le pays ?
- Non, qui peut l'aimer ?
- Vous repentez-vous de vos actes ? Pouvez-vous l’expliquer ?
- Oui, je me repens. Cela aurait pu avoir des conséquences pour les gens. Je ne me repens pas du reste de ce que j'ai fait.
- Si vous étiez maintenant libre et qu'on vous demandait de filmer des installations similaires, le feriez-vous ?
- Non."
Le juge Vitaliy Ivashchenko reprend :
- "Il est possible qu'après votre condamnation, vous ne soyez pas échangée, vous en êtes consciente ?
- Oui, je n'en ai pas peur.
- Vous n'avez pas peur de la prison à vie ?
- Non, qu'est-ce que je devrais faire, pleurer ? Ou nier ? Je ne peux rien changer.
- Comprenez que vous êtes accusée non seulement d'avoir enregistré des vidéos, mais aussi de trahison. Plaidez-vous coupable du fait que vous ne reconnaissez pas l'Ukraine en tant qu'entité ?
- Oui.
- Si je vous comprends bien, tout ce que vous avez fait, vous l'avez fait pour que l'Ukraine cesse d'exister en tant qu'État et ne voir que la Russie en face de vous ? Et que vous aimez les militaires russes et l'argent qu'ils vous ont versé ?
- Je veux voir l'Ukraine comme l'Ukraine et la Russie comme la Russie. Et ce que j'ai fait n'était pas dans l'intérêt de la Russie, mais seulement pour l'argent. Je ne voulais pas détruire l'Ukraine.
- Igor vous a-t-il expliqué pourquoi il avait besoin de ces coordonnées ?
- Il a dit que c'était pour détruire les usines.
- Cela ne veut-il pas dire la même chose ? Vous avez dit que si vous étiez envoyée au front depuis la Russie et que vous deviez tirer, vous réalisiez que vos amis pourraient se trouver sur le champ de bataille ?
- Et si mes amis pointent une arme sur moi ? Dois-je me contenter de regarder ?
- Alors, quel choix ferez-vous ?
- [Je tirerai] sur mes amis, bien sûr..."
Peine maximale
Les plaidoiries finales dans cette affaire sont entendues le 11 octobre. Le procureur Leshchenko demande que l'accusée soit déclarée coupable des deux chefs d'accusation et condamnée à la prison à vie, avec confiscation des biens. Il note que, dans le journal intime saisi sur Angelina au centre de détention provisoire, elle a écrit qu'Igor lui manquait. Cela montre, selon lui, qu'elle n'a pas emprunté la voie de la rédemption.
"Depuis la fin de l'année 2022, des bombardements massifs ont eu lieu sur des infrastructures et tout ce qui existe. Nous voyons les crimes que la Russie commet. Pour ce faire, ils emploient de tels agents. Récemment, des faits terribles se sont produits dans l'oblast de Kharkiv lorsqu'ils ont commencé à tuer des villages entiers. Je pense que le bien doit être fait avec les poings et que la punition pour ce genre de personnes doit être sévère", déclare le procureur.
L'avocat de la défense, Pogribnyi, demande à la Cour de déclarer irrecevables un certain nombre de preuves et de documents relatifs à des actes d'enquête secrets, car, selon lui, ils ont été préparés de manière inappropriée. Il souligne que l'accusée reconnaît avoir commis une haute trahison et nie avoir glorifié l'occupant, cette vidéo étant privée. Il demande que sa cliente soit condamnée à la limite inférieure de la sanction prévue par la loi.
Lors de son discours final, Angelina déclare, à propos du journal mentionné par le procureur, qu'elle l'a écrit au cours des premières semaines de sa détention, alors qu'elle était désorientée.
"Je ne suis pas une fonctionnaire et je n'ai pas prêté serment d’allégeance à ce pays. Je n'ai pas le grand honneur d'afficher des slogans tels que "navire de guerre russe", etc., sur des affiches dans les villes ukrainiennes [référence à un acte de résistance des marines ukrainiens sur l'île aux serpents, au début de la guerre, et qui est aujourd'hui le thème de cartes postales et d'affiches en Ukraine]. Je ne suis pas un soldat ukrainien qui crie "Gloire à l'Ukraine". Je ne suis pas un soldat russe qui crie "Gloire à la Russie". Juste gloire à Dieu. J'en ai terminé", dit l'accusée.
Le 13 octobre, le tribunal prononce une peine d'emprisonnement à vie avec confiscation des biens. Les parents d'Angelina sont venus assister à la sentence. Tout le monde accepte la décision du tribunal en silence. Selon son avocat, Angelina s'est opposée à la présence de sa famille au procès. Lorsqu'on lui demande pourquoi, il suggère qu'"elle a simplement honte".
Ce reportage fait partie d’une couverture de la justice sur les crimes de guerre réalisée en partenariat avec des journalistes ukrainiens. Une première version de cet article a été publiée sur le site d’information « Sudovyi Reporter ».