21.04.11 - CPI/SOUDAN - «JE SUIS LE PRESIDENT, DONC RESPONSABLE DE TOUT CE QUI SE PASSE» AU SOUDAN

La Haye, 21 avril 2011 (FH) - Dans un entretien publié le 20 avril par le quotidien britannique The Guardian, le président du Soudan, Omar Al-Bachir, reconnaît sa responsabilité dans la guerre du Darfour, en qualité de chef d'Etat. « Je suis le président et je suis donc responsable de tout ce qui se passe dans le pays », déclare-t-il.

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Poursuivi par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Omar Al-Bachir fait l'objet de deux mandats d'arrêt pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, délivrés en mars 2009 et juillet 2010.

Selon les estimations des Nations unies, le conflit au Darfour, qui a débuté en 2002, aurait fait 300 000 morts et près de 2,7 millions de déplacés, tandis que Khartoum évoque 10 000 morts et 70 000 déplacés. Pour le chef de l'Etat soudanais, le chiffre énoncé par New York « n'est pas exact ». « Il y avait des personnes armées qui ont attaqué l'Etat, attaqué les gens, attaqué les villes, et c'est donc le devoir du gouvernement de lutter contre les insurgés, mais nous n'avons pas lutté contre le peuple du Darfour », se justifie-t-il.

Omar Al-Bachir critique le « comportement » du procureur de la CPI, Luis Moreno Ocampo. « C'était clairement le comportement d'un activiste politique, non celui d'un professionnel du droit », estime-t-il. A plusieurs reprises, Ocampo a dénoncé le régime de Khartoum, qu'il avait notamment comparé, peu avant l'élection présidentielle d'avril 2010, à l'Allemagne de Hitler, en 1933. L'Union africaine, qui s'est, jusqu'à présent, opposée à l'inculpation d'Omar Al-Bachir par la Cour, avait dénoncé, dans une résolution, le comportement « grossier et condescendant » du procureur.

Dans son entretien au Guardian, Omar Al-Bachir, affirme que le procureur conduit une campagne de mensonges. « Le plus gros mensonge était quand il a dit que j'avais 9 milliards de dollars dans l'une des banques britanniques, et Dieu merci, la banque a nié ».

Selon un télégramme diplomatique américain révélé par Wikileaks, Luis Moreno Ocampo aurait suggéré, lors d'une rencontre avec la diplomate Susan Rice, le 20 mars 2009, que « si le magot de Bachir était révélé (...), cela changerait l'opinion publique soudanaise envers lui ». Il serait qualifié, non plus comme  un « croisé », mais comme un « voleur ». La Lloyd avait nié abriter un tel compte bancaire. Le procureur, dans un entretien à la BBC, avait, finalement affirmé qu'il s'agissait d'une confusion et qu'aucune banque du Royaume Uni n'abritait des fonds secrets du président soudanais.

Pour Omar Al-Bachir, l'affaire est « politique » et la Cour pénale internationale fait du « double standard ». « Il y a des crimes évidents en Palestine, en Irak, en Afghanistan qui ne sont pas devant la Cour pénale internationale et par ailleurs, la décision de transférer l'affaire à la Cour établit que les soldats américains ne seraient pas questionnés par la Cour », s'indigne le numéro un soudanais.

La CPI a été saisie par le Conseil de sécurité  le 31 mars 2005 des crimes commis au Darfour. La résolution prévoit une immunité pour tout ressortissant d'un pays, travaillant au Soudan, qui n'a pas ratifié le traité de la Cour, comme c'est le cas des Etats-Unis.

Le procureur présentera son prochain rapport d'étape sur le Darfour devant le Conseil de sécurité des Nations unies à New York, le 7 juin 2011.

SM/ER/GF

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