Le chef du Hezbollah a reconnu jeudi que la formation pro-iranienne avait reçu un coup "sans précédent", après les explosions meurtrières de ses appareils de transmission au Liban, promettant une "terrible" riposte à cette attaque spectaculaire qu'il attribue à Israël.
Israël va recevoir "un terrible châtiment et une juste rétribution", a prévenu Hassan Nasrallah.
Dans un discours télévisé, il a annoncé l'ouverture d'une enquête interne sur les explosions qui ont fait mardi et mercredi 37 morts et près de 3.000 blessés, exacerbant les craintes d'une guerre à grande échelle au Proche-Orient.
Israël n'a pas commenté cette attaque survenue juste après qu'il a annoncé étendre ses objectifs de guerre à Gaza contre le Hamas palestinien jusqu'à la frontière avec le Liban pour permettre le retour chez eux des habitants du nord du pays, déplacés par les affrontements transfrontaliers, quasi-quotidiens depuis octobre entre le Hezbollah et l'armée israélienne.
"Vous ne pourrez pas ramener les habitants du nord" chez eux, a rétorqué le chef du Hezbollah en s'adressant aux dirigeants israéliens.
"Le front du Liban avec Israël restera ouvert jusqu'à la fin de l'agression à Gaza", a poursuivi Hassan Nasrallah. Le Hamas s'est dit "très reconnaissant" de ce soutien.
Le Hezbollah a revendiqué depuis jeudi matin au moins 17 attaques contre 14 positions militaires israéliennes.
Côté israélien, l'armée a annoncé la mort de deux soldats "tombés au combat" dans le nord d'Israël et a annoncé jeudi soir de nouvelles frappes, visant une trentaine de lanceurs de roquettes et des sites d'infrastructures du Hezbollah.
Les opérations militaires contre le Hezbollah "vont continuer", a affirmé jeudi soir le ministre de la Défense, Yoav Gallant.
Selon l'agence de presse libanaise (Ani, officiel), un "drone hostile" survolait en soirée plusieurs zones du sud du Liban, diffusant par haut-parleur des "discours incitatifs" contre le chef du Hezbollah et l'accusant de "causer une destruction totale".
Dans la soirée, l'armée israélienne a indiqué avoir mené de nouveaux raids aériens au Liban contre des systèmes lances-roquettes du Hezbollah "prêts à être utilisés immédiatement pour tirer sur le territoire israélien".
- Bipeurs et talkies-walkies interdits -
Mardi, des explosions simultanées de bipeurs, un système de radiomessagerie utilisé par le Hezbollah, se sont produites dans ses bastions en banlieue sud de Beyrouth ainsi que dans le sud et l'est du Liban, faisant douze morts et des centaines de blessés, selon le ministère libanais de la Santé.
Le lendemain, une deuxième vague d'explosions visant cette fois-ci des talkies-walkies a fait 25 morts, selon le ministère, portant à 37 morts et 2.931 blessés le nombre de victimes sur deux jours.
Qatar Airways a annoncé avec effet immédiat, l'interdiction pour les passagers au départ de l'aéroport international de Beyrouth de transporter des bipeurs et des talkies-walkies, jusqu'à nouvel ordre, conformément aux directives de l'Aviation civile au Liban.
Le ministre israélien de la Défense a affirmé mercredi que le "centre de gravité" de la guerre se déplaçait "vers le nord", où les échanges de tirs meurtriers avec le Hezbollah ont entraîné le déplacement de dizaines de milliers d'habitants des deux côtés de la frontière avec le Liban.
Les principaux objectifs affichés jusqu'à présent par Israël étaient la destruction du Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, et le retour des otages retenus dans le territoire palestinien.
- Résolution diplomatique -
"Nous menons nos tâches simultanément" dans le nord et le sud, a souligné M. Gallant, en référence à Gaza, et "notre tâche est claire: assurer le retour des habitants du nord sains et saufs chez eux".
Selon un responsable libanais de la sécurité, "les appareils (de transmission du Hezbollah) étaient préprogrammés pour exploser et contenaient des matériaux explosifs".
Une enquête préliminaire des autorités libanaises montre que les appareils qui ont explosé ont été piégés avant d'entrer dans le pays, selon une lettre de la mission libanaise à l'ONU vue jeudi par l'AFP.
Le chef de la diplomatie libanaise, Abdallah Bou Habib, a annoncé le dépôt d'une plainte auprès du Conseil de sécurité de l'ONU suite à "l'agression cyberterroriste israélienne qui constitue un crime de guerre".
La Turquie a accusé "Israël d'étendre la guerre au Liban", l'ONU et Washington ont mis en garde contre une "escalade" tandis que Londres a exprimé sa "profonde préoccupation" face à la "montée des tensions".
Les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique d'Iran, ont promis "une réponse écrasante du front de la résistance", qui regroupe des formations armées de la région hostiles à Israël.
Le président américain Joe Biden pense néanmoins "faisable" une résolution diplomatique du conflit entre Israël et le Hezbollah et c'est "la meilleure option", a déclaré jeudi la porte-parole de la Maison Blanche.
- Blinken à Paris -
Sur le plan diplomatique justement, le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, devait participer à Paris à une réunion sur le Proche-Orient avec les représentants de la diplomatie française, allemande, italienne et britannique. Objectif: faire le point sur l'état des négociations pour une trêve à Gaza et la situation au Liban.
Dans la soirée, le président français Emmanuel Macron a adressé un message vidéo aux Libanais, leur assurant qu'un "chemin diplomatique existe" et que "la guerre n'est pas inéluctable".
Et la Maison Blanche a fait savoir que pour le président américain Joe Biden une résolution diplomatique du conflit entre Israël et le Hezbollah est "faisable".
La veille, Antony Blinken avait appelé Israël et le Hamas à faire preuve de "volonté politique" en vue d'un cessez-le-feu, après des mois de négociations infructueuses.
Pendant ce temps, la guerre ne connaît pas de répit à Gaza, assiégée et plongée dans une crise humanitaire majeure.
Selon la Défense civile gazaouie, cinq Palestiniens ont été tués dans une frappe nocturne à Gaza-ville, deux autres dans le bombardement d'une maison à Jabaliya (nord).
Le 7 octobre 2023, des commandos du Hamas ont mené une attaque sans précédent sur le sol israélien, qui a entraîné la mort de 1.205 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les chiffres officiels israéliens qui inclut les otages morts ou tués en captivité dans la bande de Gaza.
Sur les 251 personnes enlevées pendant l'attaque, 97 sont toujours retenues à Gaza, dont 33 ont été déclarées mortes par l'armée.
Plus de 41.272 Palestiniens ont été tués dans la campagne militaire israélienne de représailles sur la bande de Gaza, essentiellement des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.