Le président de la chambre, le juge Bruno Cotte, a longuement interrogé Germain Katanga sur les liens hiérarchiques entre les différents groupes de combattants dans la région d'Aveba, en Ituri, et tenté de déterminer le niveau d'autorité de l'accusé.
Au cours de sa déposition, commencée le 27 septembre, Germain Katanga a affirmé qu'il n'était pas présent à Bogoro, le jour de l'attaque. L'opération aurait été décidée par Blaise Koka, commandant dans l'Armée patriotique congolaise (APC), une milice soutenue par Kinshasa et chargée de reprendre les territoires tombés aux mains de l'Union des patriotes congolais (UPC), appuyée alors par l'Ouganda.
Conduite dans le cadre d'une offensive visant à reprendre Bunia, chef-lieu de l'Ituri, l'attaque de Bogoro était planifiée, a expliqué l'accusé. « Tout était prévu : les munitions, les armes, les rations, les médicaments, les hommes, les uniformes ». A Aveba, où il résidait alors, Germain Katanga « gardait les Thuraya [téléphones satellitaires] » grâce auquel les chefs de l'APC pouvaient contacter les combattants d'Aveba avant chaque attaque. « Nous étions là, à leur disposition », a affirmé Germain Katanga, qui avait rassemblé 60 hommes pour l'auto-défense.
A l'époque, Germain Katanga comptait parmi les gardes du corps de Kasaki Bandro, un féticheur d'Aveba. C'est lui qui, en dernier ressort, donnait le feu vert aux demandes de l'APC. L'accusé a reconnu avoir eu une certaine influence sur lui. A au moins une occasion, Germain Katanga est parvenu à le dissuader de conduire une attaque sur Getty. « Malgré sa grande autorité, vous étiez en mesure de discuter avec lui et éventuellement de le convaincre ? a interrogé le président de la chambre. « Je l'ai fait parce que c'était notre objectif », a expliqué Germain Katanga, qui rappelle qu'il devait avant tout défendre sa population.
Pour le juge, l'accusé se pose en homme de confiance de Kasaki Bandro. Interrogé, Germain Katanga raconte, dans un français hésitant, que « parfois, le vieux Papa prenait un peu la bière, ça lui arrivait. Et quand il trouvait de la bière, il oubliait même la mission. Sans vous mentir, je devais dire parfois à Kasaki ‘allons-y, il faut qu'on arrive à temps' ».
Braconnier, lorsqu'il n'était pas au combat, Germain Katanga explique n'avoir jamais distribué le produit de ses chasses aux combattants. « Pardonnez- moi si je dis des bêtises, avance le juge président, la viande d'Okapi était-elle conservée par votre famille, ou vous arrivait-il d'en distribuer aux combattants qui se battaient contre les Ougandais ? » Non, répond l'accusé, « ce n'était pas légal, et ce qui m'intéressait, c'était ce qui rapportait de l'argent », comme les défenses d'éléphants.
Pour l'accusé-témoin, il n'existait aucune hiérarchie au sein de la Force patriotique de l'Ituri (FPRI), créée pour regrouper les forces d'auto-défense. Et s'il y avait acquis une réputation de commandant, c'était grâce à ses victoires sur le terrain. « Les Ougandais savaient que s'ils viennent à Aveba, il y aura un résistant, qui a ses hommes à lui. »
Co-accusé, Mathieu Ngudjolo doit commencer à déposer la semaine prochaine. Le procès des deux miliciens congolais a commencé en novembre 2009.
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