Soudan: plus de 70 morts en deux jours, selon des groupes prodémocratie et des secouristes bénévoles

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Des secouristes bénévoles et des groupes prodémocratie ont fait état mardi de la mort de plus de 70 personnes en trois jours au Soudan, où s'affrontent l'armée et les paramilitaires.

Le pays est le théâtre depuis avril 2023 d'une guerre entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), dirigés par le général Mohamed Hamdane Daglo, et l'armée menée par le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan.

Les FSR ont pris en grande partie le contrôle de Khartoum au début du conflit, forçant le gouvernement à se réfugier à Port-Soudan (est). Mais plus tôt cette année, l'armée a regagné de larges secteurs de la ville voisine d'Omdourman et se bat ces dernières semaines pour prendre des quartiers de la capitale.

Des secouristes ont trouvé "vingt corps carbonisés, dont ceux de quatre enfants et deux femmes", après un raid aérien de l'armée mardi sur Khartoum, a affirmé dans un communiqué le réseau de "Cellules d'intervention d'urgence" du quartier de South Belt de la capitale, dirigé par des jeunes.

Vingt-sept personnes ont été blessées, "dont des femmes et des enfants", ont ajouté ces bénévoles qui gèrent depuis le début de la guerre des cuisines communautaires, distribuent des colis alimentaires, organisent des évacuations et fournissent une assistance médicale.

Dans la ville de Wad Madani (centre), une frappe aérienne de l'armée sur une mosquée a tué au moins 31 personnes dimanche, a déclaré mardi dans un communiqué transmis à l'AFP le Comité de résistance local, un groupe prodémocratie qui organise l'entraide entre habitants.

L'attaque s'est produite "après les prières du soir" dans cette localité située dans l'Etat d'Al-Jazira, au sud de Khartoum, a indiqué le Comité, accusant l'armée d'avoir utilisé des barils remplis d'explosifs.

Plus de la moitié des victimes n'ont pas été identifiées, les secouristes s'efforçant d'identifier "des dizaines de restes de corps carbonisés et mutilés", a précisé la même source.

Le Comité de résistance de la ville de Rufaa, située à 50 kilomètres au nord de Wad Madani, dans l'est de l'Etat d'Al-Jazira, a affirmé de son côté qu'au moins 20 personnes avaient été tuées dans des attaques des paramilitaires dans plusieurs villages du secteur depuis dimanche.

- "Attaques vengeresses" -

L'Etat agricole d'Al-Jazira est sous le contrôle des paramilitaires depuis fin 2023.

Dimanche, l'armée a annoncé que le commandant des FSR à Al-Jazira, Abou Aqla Kaykal, avait abandonné les paramilitaires, "un grand nombre de ses forces" rejoignant le camp adverse, dans ce qu'elle a qualifié de première défection de haut niveau au sein des FSR.

Un porte-parole du général Abdel Fattah al-Burhane a déclaré que M. Kaykal et les autres personnes l'ayant suivi bénéficieraient d'une "amnistie".

Mardi, les FSR ont "repoussé une tentative de l'armée" de reprendre la ville de Tamboul, à 75 kilomètres au nord de Wad Madani, a déclaré à l'AFP une source paramilitaire qui a requis l'anonymat.

Selon des témoins, les paramilitaires étaient "déchaînés". Ils ont "tiré au hasard en l'air" et forcé les civils à transporter des marchandises pillées, a indiqué l'un d'eux à l'AFP sous le couvert de l'anonymat.

Dans le secteur de Rufaa, les FSR ont mené "opérations (...) contre des civils sans défense" pour se venger de la défection de M. Kaykal, a pour sa part accusé le Comité de résistance local.

Un groupe de bénévoles nommé "l'Observatoire central des droits humains" a indiqué qu'au moins sept villes et villages du secteur avaient été touchés par des "attaques vengeresses (...) en violation de tous les accords visant à protéger les civils et du droit international humanitaire".

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, les estimations allant de 20.000 à 150.000, la plupart des victimes n'étant pas recensées, selon les médecins.

Elle a également entraîné le déplacement de plus de dix millions de personnes, soit un cinquième de la population du pays, et créé l'une des pires crises humanitaires de mémoire récente, selon les Nations unies.

Les belligérants ont été accusés de crimes de guerre pour avoir visé délibérément des civils et bloqué l'aide humanitaire.

Une dizaine de pays, dont le Royaume-Uni, les Etats-Unis, la France et l'Allemagne, avaient appelé vendredi les deux camps à assurer l'accès de l'aide humanitaire à des millions de personnes ayant besoin d'une "assistance urgente".