Le Liban accuse Israël de "crime de guerre" après la mort de trois journalistes

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Le Liban a accusé vendredi Israël de "crime de guerre" après la mort de trois journalistes tués en pleine nuit dans une frappe qu'il a qualifiée de "délibérée", au moment où l'armée israélienne intensifie son offensive contre le Hezbollah, soutenu par l'Iran.

La frappe a visé Hasbaya, une localité du sud du Liban située dans une région à majorité druze jusque-là épargnée, où s'étaient installées les équipes de plusieurs médias il y a un mois pour couvrir la guerre.

Le Premier ministre libanais, Najib Mikati, a dénoncé un "crime de guerre" et une attaque "délibérée" visant à "terroriser les médias pour dissimuler les crimes et les destructions".

Israël n'a pas commenté cette frappe.

La chaîne pro-iranienne Al Mayadeen a annoncé qu'un cameraman, Ghassan Najjar, et un ingénieur de radiodiffusion, Mohammad Reda, avaient été tués.

La chaîne du Hezbollah Al-Manar a également annoncé la mort de son vidéojournaliste Wissam Qassem.

Selon le ministre de l'Information, Ziad Makari, 18 journalistes représentant sept médias étaient présents dans la résidence.

Vers 03H30 du matin, les journalistes se sont réveillés dans la panique au milieu des flammes, d'une épaisse fumée et de cris.

"Je me suis réveillée au son du sifflement du missile, pour découvrir la porte de la maison grande ouverte, et une épaisse fumée qui s'échappait du jardin", a raconté à l'AFP Darine el-Helwe, grand reporter de Sky News Arabia.

"L'ennemi israélien a visé le lieu de résidence des journalistes à Hasbaya", a affirmé un journaliste de la chaîne locale Al-Jadeed, Mohammad Farhat, filmé le visage recouvert d'une couche de poussière grisâtre, devant son lit enfoui sous les décombres de son bungalow.

- "Course contre la montre" -

Des frappes ont également touché la banlieue sud de Beyrouth, un fief du Hezbollah, où l'armée a annoncé avoir visé "des entrepôts d'armes et des centres de commandement" du mouvement chiite, "enfouis sous des immeubles habités".

Dans le sud du Liban, où Israël mène depuis le 30 septembre des opérations au sol, l'armée a annoncé avoir perdu dix soldats en deux jours.

Le Hezbollah a revendiqué des attaques contre les soldats israéliens dans le sud du Liban et le nord d'Israël.

L'armée a aussi a annoncé vendredi avoir mené une frappe sur un poste-frontière entre le Liban et la Syrie, utilisé selon elle par le Hezbollah pour faire passer des armes. L'ONU a dénoncé une attaque contre une route empruntée par les Libanais qui fuient vers la Syrie.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a affirmé qu'il était "vraiment urgent" de parvenir à une "solution diplomatique" au Liban, où la guerre qui fait rage depuis plus d'un an dans la bande de Gaza s'est propagée en septembre entre Israël et le Hezbollah, un allié du Hamas.

Antony Blinken, qui a rencontré vendredi à Londres le Premier ministre libanais, a rappelé la nécessité de mettre en oeuvre la résolution 1701 de l'ONU, datant de 2006, "afin qu'il puisse y avoir une véritable sécurité le long de la frontière" israélo-libanaise.

Les Casques bleus de l'ONU déployés dans le sud du Liban ont affirmé vendredi être confrontés à une situation "extrêmement difficile" après de nouveaux tirs israéliens cette semaine sur une de leurs positions.

Israël mène depuis le 23 septembre des frappes aériennes contre le Hezbollah, affirmant vouloir neutraliser le mouvement chiite dans les régions frontalières du sud du Liban et permettre le retour dans le nord d'Israël de 60.000 habitants déplacés par les tirs de roquettes incessants depuis un an.

Au moins 1.580 personnes ont été tuées au Liban depuis le 23 septembre, d'après un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

L'ONU a recensé quelque 800.000 déplacés.

- "Les heures les plus sombres" -

Dans le sud de bande de Gaza, deux frappes aériennes ont fait au moins vingt morts à Khan Younès, dont l'une a tué 14 personnes dont neuf enfants, selon les secours.

L'armée israélienne a indiqué avoir "éliminé plusieurs terroristes depuis les airs et le sol et démantelé de nombreuses infrastructures terroristes".

Depuis le 6 octobre, Israël concentre son offensive principalement dans le nord du territoire palestinien, affirmant que les combattants du Hamas tentent de s'y regrouper.

Le Haut commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk, a dénoncé vendredi de possibles "crimes atroces" qui seraient pepétrés par Israël dans cette région, où se déroulent selon lui "les heures les plus sombres" de la guerre.

La guerre à Gaza a été déclenchée par l'attaque sans précédent menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur les données officielles israéliennes, incluant les otages tués ou morts en captivité.

Sur les 251 personnes alors enlevées, 97 restent otages à Gaza, dont 34 ont été déclarées mortes par l'armée.

En représailles, Israël a lancé une offensive contre le mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qui a tué au moins 42.847 Palestiniens, majoritairement des civils, d'après les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l'ONU.

Les pourparlers sur une trêve pourraient reprendre après un appel lancé par les Etats-Unis à Israël, à saisir l'occasion créée par la mort du chef du Hamas, Yahya Sinouar, tué par des soldats israéliens le 16 octobre.

Les précédentes négociations indirectes menées sous l'égide du Qatar, des Etats-Unis et de l'Egypte n'ont pas abouti.

Le Hamas s'est dit "prêt à un arrêt des hostilités" mais a exigé d'Israël un "engagement à un cessez-le-feu", un "retrait de la bande de Gaza" et un "accord sérieux pour un échange" entre des otages israéliens et des prisonniers palestiniens détenus par Israël, selon un responsable du mouvement.

Ces conditions ont toujours été rejetées par Israël.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, va, selon son bureau, envoyer au Qatar le chef du renseignement extérieur, le Mossad, David Barnea, qui doit rencontrer dimanche le chef de la CIA, Bill Burns, et le Premier ministre qatari.