Les viols, y compris collectifs, sont "généralisés" au Soudan après 18 mois de guerre civile, selon un rapport d'enquête de l'ONU publié mardi, qui cible notamment les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
"L'ampleur des violences sexuelles que nous avons constatées au Soudan est stupéfiante", a déclaré le président de la mission d'établissement des faits sur le Soudan, Mohamed Chande Othman, dans un communiqué.
Les enfants ne sont pas épargnés, et des femmes et filles sont enlevées à des fins d'esclavage sexuel, souligne ce nouveau rapport.
"Il n'y a plus d'endroit sûr au Soudan", a souligné M. Othman, dont la mission a été créée à la fin de l'année dernière par le Conseil des droits de l'homme pour documenter les violations commises dans le pays depuis le début du conflit.
Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, a lui affirmé mardi que l'escalade des violences dans l'État d'Al-Jazira, au sud de Khartoum, exacerbait encore le risque d'atrocités, et ses services ont déjà documenté des cas de violences sexuelles.
Après 18 mois de guerre entre le chef de l'armée soudanaise, le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) de son ex-adjoint, le général Mohamed Hamdane Daglo, "la souffrance grandit de jour en jour" et "25 millions de personnes" ont désormais besoin d'aide, a déploré lundi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.
"Toutes les guerres sont brutales, mais le bilan de celle-ci est particulièrement horrifiant", a déclaré mardi la directrice générale de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), Amy Pope, lors d'un point de presse, depuis Port-Soudan.
Onze millions de personnes sont déplacées à l'intérieur du Soudan, dont environ 8,3 millions depuis la guerre, qui a également poussé 3,1 millions d'autres à fuir le pays, selon les données fournies mardi par l'ONU.
Les belligérants soudanais ont été accusés à plusieurs reprises de crimes de guerre pour avoir visé délibérément des civils et bloqué l'aide humanitaire.
En septembre, la mission d'établissement des faits avait réclamé le "déploiement sans délai" d'une force "indépendante et impartiale" afin de protéger les civils.
Elle avait conclu dans un premier rapport les parties en guerre avaient "commis une série effroyable de violations des droits de l'homme et du droit international, dont beaucoup peuvent être qualifiés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité".
- "Cycle de haine et violence" -
Dans leur nouveau rapport, les enquêteurs onusiens les accusent une nouvelle fois d'avoir "commis des violations massives des droits humains et du droit international humanitaire, dont beaucoup peuvent être assimilées à des crimes de guerre et/ou à des crimes contre l'humanité", y compris la torture, le viol, l'esclavage sexuel et la persécution fondées sur l'appartenance ethnique et le genre.
Les FSR sont en particulier "responsables de violences sexuelles à grande échelle dans les zones qu'elles contrôlent", indique le communiqué.
"La grande majorité des cas de viols et autres formes de violence sexuelle documentés" dans le rapport sont attribués aux FSR et, pour la région du Darfour, à leurs alliés, les Janjawid, une milice, souligne-t-il.
Le rapport fait aussi état de "quelques cas" impliquant l'armée, y compris les services de renseignement militaire. Il relève que les civils déplacés à l'intérieur du pays ont tendance à fuir vers les zones contrôlées par l'armée, "d'où il leur est plus difficile de dénoncer" les violations commises par les militaires.
La mission d'enquête a également reçu des "informations crédibles" concernant des viols d'hommes et de garçons.
"Sans obligation de rendre des comptes, le cycle de haine et de violence se poursuivra. Nous devons mettre un terme à l'impunité", a souligné Joy Ngozi Ezeilo, membre de la mission.
Les enquêteurs demandent aussi que l'embargo sur les armes visant le Darfour soit étendu à l'ensemble du pays. Ils demandent aussi aux autorités de coopérer avec la Cour pénale internationale et de lui remettre l'ex-dictateur Omar el-Béchir.