Le procès en appel de l'ancien gendarme rwandais Philippe Manier, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en juin 2023 pour sa participation au génocide des Tutsi au Rwanda, s'est ouvert lundi devant la cour d'assises de Paris.
Philippe Hategekimana, 67 ans, naturalisé Français sous le nom de Philippe Manier, avait été reconnu en première instance coupable de génocide et crime contre l'humanité pour quasiment tous les chefs d'accusation qui pesaient à son encontre, au terme de sept semaines de procès.
Incarcéré depuis sa condamnation, M. Manier a rejoint lundi le box des accusés escorté par des gendarmes, un masque sanitaire dissimulant une partie de son visage.
"Il attend beaucoup de ce nouveau procès", a déclaré Me Emmanuel Altit, l'un de ses avocats. "Il espère que la vérité sortira cette fois des débats."
Surnommé Biguma à l'époque des faits, l'ancien adjudant-chef est accusé d'avoir participé ou encouragé le meurtre de dizaines de Tutsi en avril 1994 dans la préfecture de Butare (sud du Rwanda), dont celui du bourgmestre de Ntyazo qui résistait à la mise en oeuvre du génocide dans sa commune.
Selon l'accusation, M. Manier avait notamment ordonné et supervisé l'érection de plusieurs "barrières", des barrages routiers "destinés à contrôler et à assassiner les civils tutsi".
L'accusation reproche également à M. Manier d'avoir participé en donnant des ordres, voire en étant directement impliqué sur le terrain, à trois massacres.
Avant l'ouverture du procès en appel, la défense de Philippe Manier a mis en cause auprès de l'AFP les témoins présentés par l'accusation, comme elle l'avait fait en première instance: "Il s'agit de témoins détenus non fiables", a déclaré Me Altit, laissant entendre que ces personnes étaient "briefées" par Kigali.
"Ce ne sont pas des témoins qui sortent de nulle part", a répondu Me Domitille Philippart, avocate du collectif des parties civiles pour le Rwanda, avant l'ouverture du procès en appel. "La cour saura apprécier ces paroles qui ont passé le filtre de l'instruction, des auditions et des confrontations."
Le génocide au Rwanda a fait plus de 800.000 morts selon l'ONU, essentiellement des Tutsi exterminés entre avril et juillet 1994.
Le verdict est attendu le 17 décembre.
Le 30 octobre dernier, Eugène Rwamucyo, un ex-médecin rwandais a été condamné à 27 ans de réclusion criminelle, notamment pour complicité de génocide. Ses avocats ont fait appel.