Aujourd'hui âgé de 59 ans, Grégoire Ndahimana dirigeait la commune de Kivumu, dans la préfecture de Kibuye (ouest) pendant le génocide des Tutsis de 1994.
« La majorité de la chambre de première instance, la juge (Florence) Arrey ayant une opinion dissidente, condamne Ndahimana à une peine unique de quinze ans d'emprisonnement », a déclaré Mme Arrey alors que l'ancien responsable administratif, resté de marbre durant toute la lecture du jugement, était debout.
« Cette peine annule toute autre peine infligée à Grégoire Ndahimana par tout autre Etat ou institution », a ajouté la présidente Arrey.
Cette magistrate camerounaise s'est opposée aux deux autres juges, le Turc Aydin Akay et le Russe Bakhtiyar Tuzumkhamedov sur de nombreuses conclusions factuelles. Mais en dépit de son opposition, le jugement a invalidé l'essentiel de l'acte d'accusation pour ne retenir que la responsabilité pénale de Ndahiman, pour omission et soutien passif aux tueurs.
Il a été retenu à charge le fait que l'ancien maire n'aie pas puni les policiers communaux qui avaient été impliqués le 15 avril 1994 dans l'attaque contre les Tutsis qui s'étaient réfugiés à l'église catholique de Nyange, dans sa commune. D'autre part, les juges l'ont condamné pour sa présence à l'église le lendemain lorsque l'édifice religieux a été détruit par un bulldozer, ensevelissant ainsi près de 2.000 Tutsis qui s'y trouvaient. « Cette présence de l'accusé au théâtre du crime a eu un effet encourageant pour les principaux auteurs, en particulier parce que l'accusé était une autorité », a expliqué la chambre.
Le procureur avait pour sa part allégué que l'ancien maire avait planifié, ordonné le massacre de Nyange et ouvert le feu lui-même pour donner le coup d'envoi.
Toutes ces allégations ont été balayées par les juges qui ont estimé, dans leur majorité, qu'elles n'avaient pas été prouvées au-delà de tout doute raisonnable.
Interrogé à sa sortie du prétoire, Maître Chadha Bharat, l'avocat principal de l'ex-maire a déclaré : « Le jugement n'est pas mauvais ; j'espère qu'il y a une bonne chance d'obtenir un acquittement en appel ».
Le procureur, Hassan Bubacar Jallow, a également annoncé qu'il allait faire appel. « Au bureau du procureur, nous ne sommes pas satisfaits de certains aspects du jugement et de la peine trop clémente. Nous allons faire appel », a-t-il déclaré à la presse.
Ndahimana a été arrêté le 10 août 2009 dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) et transféré au centre de détention des Nations Unies à Arusha 11 jours plus tard. Son procès s'est ouvert le 6 septembre 2010.
ER/GF
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