Deux ministres tchadiens ont réitéré mercredi à Dakar l'engagement de leur pays pour un bon déroulement du procès de leur ex-président Hissène Habré, assurant vouloir "que justice soit rendue" aux victimes de son régime et se défendant de tout "règlement de comptes".
Le procès de M. Habré pour "crimes de guerre, crimes contre l'humanité et tortures", ouvert lundi et ajourné dès le lendemain au 7 septembre, se déroule à Dakar devant un tribunal spécial créé en vertu d'un accord entre le Sénégal et l'Union africaine (UA).
L'accusé ne reconnaît pas cette juridiction - les Chambres africaines extraordinaires (CAE) - et refuse de s'exprimer et de se défendre devant elle.
Le Tchad "a mis tout en oeuvre pour la comparution" de M. Habré, il a participé au financement des CAE "à hauteur de 2 milliards de francs CFA (plus de 3 millions d'euros)", a déclaré son ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hassan Sylla Bakari, lors d'une conférence de presse.
Selon ce tribunal spécial, son budget "avoisine les 6 milliards de FCFA", financés par plusieurs bailleurs.
"Ce procès est également l'affirmation de la Justice africaine", mais il n'aurait pas eu lieu "si le Tchad n'avait pas levé l'immunité de Hissène Habré" et s'il n'avait pas accepté les commissions rogatoires, a rappelé le ministre de la Justice, Mahamat Issa Halikimi.
N'Djamena a par ailleurs mis diverses données à la disposition des enquêteurs, dont le travail s'est fondé sur les conclusions d'une commission tchadienne d'investigation selon laquelle la répression sous Hissène Habré (1982-1990) a fait 40.000 morts, a rappelé M. Issa Halikimi.
"Si le Tchad fait tous ces efforts, c'est pour les victimes", selon lui. "Nous avons pris l'engagement de leur rendre justice. (...) Ce n'est pas par vengeance", ni "pour faire des règlements de comptes", a insisté le ministre du président Idriss Deby Itno, qui a renversé Hissène Habré en 1990.
N'Djamena n'a exercé aucune pression sur les CAE, n'a pas l'intention d'influencer leur travail et respectera leur décision, "quelle qu'elle soit", ont par ailleurs soutenu les deux ministres.
Ils ont rappelé que ce tribunal a débouté le Tchad de sa demande de constitution de partie civile pour poursuivre pour crimes économiques l'ex-président Habré.
Selon eux, en fuyant le Tchad pour le Sénégal, Hissène Habré a emporté "8 milliards de FCFA - avant la dévaluation du FCFA [en 1994]", de "l'argent public" que, selon le ministre de la Justice, le Tchad a "le droit de réclamer".