Un important chef rebelle tchadien, qui avait tenté en 2008 de renverser le défunt président Idriss Déby Itno, a bénéficié en France d'un non-lieu pour crimes contre l'humanité, au terme d'une enquête sur des accusations d'enrôlement d'enfants soldats, a appris l'AFP mercredi de source proche du dossier.
Le parquet national antiterroriste (Pnat), compétent en matière de crimes contre l'humanité, a confirmé à l'AFP qu'une ordonnance de non-lieu a été rendue le 15 novembre au bénéfice du général Mahamat Nouri.
Le Pnat avait requis un non-lieu en février 2023.
Les éléments à charge recueillis n'étaient pas suffisants pour le renvoyer devant une cour d'assises, selon une source proche du dossier.
Mahamat Nouri, leader de l'Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD) et ancien ministre de la défense d'Idriss Déby, avant de faire défection, avait été mis en examen à Paris en 2019 pour "crimes contre l'humanité" et "participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime contre l'humanité".
Le ministère public avait alors expliqué qu'il était soupçonné "d'avoir diligenté des opérations de recrutements forcés de combattants, dont des mineurs", au Tchad et dans la province frontalière soudanaise du Darfour entre décembre 2005 et juillet 2010, des faits qu'il a toujours contestés.
"C'est un vrai soulagement pour le général Mahamat Nouri. C'est une décision que nous attendions depuis longtemps", a commenté auprès de l'AFP son avocate, Me Véronique Massi.
"Je me suis toujours posé la question de l'origine politique de cette mise examen mais les magistrats ont fait leur travail qui a abouti à cette ordonnance de non-lieu", a-t-elle ajouté.
Selon une autre source proche du dossier, la justice tchadienne n'a pas répondu aux demandes des magistrats français.
Incarcéré en France en juin 2019, Mahamat Nouri avait été remis en liberté en mars 2020 pour raisons de santé.
Après des années d'exil, il est rentré au Tchad en 2022 après avoir participé à des négociations sur l'accord de paix de Doha, entre les factions rebelles tchadiennes et le pouvoir de N'djamena.
Un second opposant, Abakar Tollimi, avait été placé sous le statut intermédiaire de témoin assisté et ne pouvait donc pas être renvoyé en procès.
Né en 1947, le général Mahamat Nouri, considéré comme l'un des plus influents chefs rebelles au régime du président tchadien, avait été interpellé à son domicile du Val-de-Marne, à proximité de Paris.
Les arrestations avaient été effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet le 10 mai 2017, à la suite d'un signalement de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).
C'est auprès de cet organisme que le chef rebelle avait déposé une demande d'asile, qui avait été rejetée.
Le pôle crimes contre l'humanité et crimes de guerre du tribunal de Paris s'était saisi de ce dossier en vertu d'une compétence universelle qui l'autorise à poursuivre des suspects s'ils sont sur le territoire français.
Début 2008, l'UFDD, avec d'autres mouvements rebelles, était arrivée aux portes du palais présidentiel à N'Djamena mais l'offensive avait été repoussée.