06.12.11 - TPIR/TRANSFERTS - LE CAS D'UN PASTEUR DE CAMPAGNE TIENT LE TPIR EN HALEINE (ANALYSE)

Arusha, 6 décembre 2011 (FH) - Le pasteur pentecôtiste Jean Uwinkindi, un homme discret qui ne parle ni français ni anglais, n'avait, a priori, pas de place au panthéon des plus célèbres  détenus du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Mais son nom a fait le tour du monde depuis qu'il a été, en juin dernier, l'objet d'une décision de renvoi vers la justice rwandaise, une première dans l'histoire du TPIR.

2 min 31Temps de lecture approximatif

L'arrêt attendu de la chambre d'appel dans cette affaire tient en haleine tous les acteurs au TPIR, comme le laisse entendre le dernier rapport adressé par le tribunal au Conseil de sécurité. Si le transfert du pasteur de campagne est confirmé, il ouvrira la voie à trois autres renvois demandés par le procureur, dont celui de l'ancien chef milicien présumé Bernard Munyagishari, également entre les mains du tribunal. Les deux autres requêtes visent des accusés en fuite - l'ex-inspecteur de police judiciaire Fulgence Kayishema et l'ancien maire Charles Sikubwabo.

Une telle décision aiderait le TPIR à « franchir une nouvelle étape importante vers sa fermeture », espère, selon ce texte, la juge Khalida Rachid Khan, présidente de la juridiction. Dans le cas contraire, « le résultat sera une augmentation du volume du travail que le tribunal devra terminer avant de passer le témoin au Mécanisme résiduel » qui entrera en vigueur au 1er juillet 2012, explique la magistrate pakistanaise. Dans cette hypothèse, en effet, l'homme d'église et le chef milicien présumé devraient être jugés par le TPIR.

Mais la portée de l'arrêt attendu dépasse de loin le seul cadre du TPIR. Les autorités rwandaises, qui affirment depuis plusieurs années que leur système judiciaire peut garantir des procès équitables à des accusés transférés du TPIR, attendent impatiemment le résultat de l'appel. Certaines capitales occidentales gênées par la présence sur leur sol d'anciennes personnalités rwandaises accusées d'avoir joué un rôle dans le génocide des Tutsis, pourraient également, en cas de confirmation de la décision de première instance, extrader les suspects vers le Rwanda en s'appuyant sur la jurisprudence TPIR.

A l'exception de la France à laquelle le TPIR a confié fin 2007 les dossiers de deux accusés vivant sur son territoire - l'abbé Wenceslas Munyeshyaka et l'ex-préfet de Gikongoro (sud), Laurent Bucyibaruta-, seul le Rwanda a manifesté un intérêt pour juger des accusés du TPIR.

Le TPIR recherche encore neuf inculpés dont trois, considérés par l'accusation comme ayant une très lourde responsabilité dans le génocide, devraient être jugés, s'ils sont arrêtés, par le Mécanisme résiduel. Il s'agit de l'homme d'affaires Félicien Kabuga présenté par l'accusation comme l'argentier du génocide, de l'ex-ministre de la Défense Augustin Bizimana et du major Protais Mpiranya qui commandait la garde de l'ex-président Juvénal Habyarimana.

Pour les six autres, le principe est que le Mécanisme résiduel, les renvoie, s'ils sont appréhendés, vers des juridictions nationales. La nouvelle structure qui sera d'une très petite taille, ne pourra se résoudre à juger un accusé qu'après avoir épuisé toutes les possibilités de renvoi.

ER/GF

 © Agence Hirondelle