Le tribunal de grande instance de Paris avait déclaré fin février avoir perdu l’original du dossier, attribuant l’incident à un dysfonctionnement au sein du greffe.
« Ils ne se soucient pas des conséquences de la perte d’un dossier contenant des déclarations de témoins, dont certains sont protégés. Ils ne se soucient pas de la sécurité de ces témoins », a accusé Martin Ngoga dans un entretien avec l’agence Hirondelle.
« Comment pouvez-vous expliquer la perte d’un tel dossier ? », s’est interrogé le magistrat rwandais, reprochant à la justice française de ne pas prendre au sérieux les affaires liées au génocide des Tutsi de 1994 au Rwanda.
Lors d’une conférence de presse la semaine dernière au siège du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) à Arusha, en Tanzanie, Ngoga avait menacé de revoir la coopération de ses services avec la justice française qu’il avait accusée de ne pas « faire sérieusement son travail ».
Il avait fait remarquer qu’aucun procès en rapport avec le génocide de 1994 n’avait encore été ouvert en France, en dépit de nombreuses missions rogatoires effectuées au Rwanda.
Ngoga avait déclaré que son pays avait expulsé la dernière mission d’enquête française, pour prouver à la justice française qu’elle faisait « perdre son temps » à la partie rwandaise.
«Des officiers judiciaires sont allés au Rwanda dans le cadre d'une commission rogatoire internationale, ils ont effectué leur mission, ils sont rentrés à l'issue de cette mission, il n'y a pas eu d'expulsion », avait démenti Fabienne Mansencal, adjointe du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, interrogée par l'agence Hirondelle.
Plusieurs sources judiciaires françaises ont cependant reconnu que la mission avait été perturbée et finalement écourtée.
« Nous sommes prêts à dialoguer avec eux », a déclaré Ngoga mardi matin sans renoncer à ses griefs : « Ils nous font perdre notre temps ainsi que le leur d’ailleurs ».
Le procureur général a par ailleurs critiqué le retard dans le traitement des deux dossiers remis fin 2007 à la France par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). « Ces dossiers auraient dus être retirés à la France il y a longtemps », a estimé Ngoga.
Le TPIR s’est dessaisi au profit de la France des dossiers de l’abbé Wenceslas Munyeshyaka et de l’ex-préfet de Gikongoro (sud) Laurent Bucyibaruta dans une décision du 20 novembre 2007. Le procureur en chef du TPIR, Hassan Bubacar Jallow impute cette lenteur au système judiciaire français, où le juge d’instruction mène ses propres enquêtes en plus de celles du procureur.
ER/GF