Sans parcours scolaire connu, ne parlant ne le français, ni l’anglais – les deux langues officielles du TPIR, Uwinkindi est né dans la commune de Rutsiro, près de la Crête Congo-Nil, dans le nord-ouest du Rwanda.
Après avoir été catéchiste de son église de pentecôte dans la région natale, il est promu pasteur, un ministère dont l’exercice le conduira d’abord dans la préfecture de Kibungo, puis au Bugesera, dans la préfecture de Kigali rural. En 1994, en tant que pasteur responsable de la paroisse de Kayenzi, il était le principal responsable de son église dans cette région. Selon l’acte d’accusation émis par le procureur du TPIR et que le parquet général rwandais devra réadapter, Uwinkindi est poursuivi pour génocide et extermination, pour des meurtres de Tutsis qu’il aurait supervisés ou commis en personne.
Le plus haut religieux jamais mis en accusation par le TPIR, l’évêque anglican Samuel Musabyimana, est décédé en janvier 2003 avant même l’ouverture de son procès. Samuel Musabyimana, qui était poursuivi pour crimes de génocide et crimes contre l’humanité perpétrés dans son diocèse de Shyogwe (centre), a vu le jour le 6 juillet 1956, dans la commune Mwendo (préfecture de Kibuye nord-ouest). Contrairement à Uwinkindi, le prélat avait fait de solides études de Théologie, au Rwanda et en Suisse. Il avait été ordonné pasteur en 1985, puis sacré évêque en 1991. Il a laissé une veuve, Bernadette Mukafaranswa, médecin de formation. L’homme d’église avait été arrêté au Kenya en avril 2001. Lors de sa comparution initiale le mois suivant, il avait protesté de son innocence.
Fils de Kibuye comme Uwinkindi et Musabyimana, le pasteur adventiste Elizaphan Ntakirutimana est décédé à 83 ans, en janvier 2007,un peu plus d’un mois après avoir purgé les 10 ans de prison auxquels il avait été condamné. Premier ecclésiastique jugé par le TPIR et premier condamné à terminer sa peine, le pasteur est mort, selon des proches, d’un cancer dont il souffrait depuis plusieurs années. Arrêté aux Etats-Unis en 1996, Ntakirutimana avait été reconnu coupable de massacres de Tutsis en 1994 dans le complexe adventiste de Mugonero (ouest du Rwanda) dont il était responsable. Condamné dans la même affaire, son fils Gérard, un médecin, est encore en prison.
Les autres ecclésiastiques mis en accusation par le TPIR appartiennent tous à l'église catholique. Le plus connu est l’abbé Athanase Seromba, premier prêtre catholique jugé par le TPIR. Cet ancien vicaire de Nyange (ouest), aujourd’hui emprisonné au Bénin, a été condamné définitivement à la prison à vie. Il a été jugé coupable d’avoir ordonné en avril 1994 la destruction de son église dans laquelle des Tutsis avaient cherché refuge. L’édifice religieux fut rasé par un bulldozer à la mi-avril 1994, ensevelissant près de 2.000 Tutsis. L’abbé Seromba, qui vivait en Italie sous un faux nom, s’était rendu aux responsables du TPIR en février 2002 après avoir appris qu’il était recherché.
Le deuxième est l'ex-aumônier militaire, Emmanuel Rukundo condamné à 23 ans de réclusion. Selon le jugement, le prêtre catholique a participé, en avril 1994, en collaboration avec des militaires et des miliciens Interahamwe, à l'enlèvement et aux tueries de Tutsis qui avaient cherché refuge au Petit séminaire Saint Léon de Kabgayi dans la préfecture de Gitarama (centre). Il a par ailleurs été condamné pour avoir « agressé sexuellement » une femme tutsie ; un acte qui, selon les juges, « a porté atteinte à l’intégrité mentale » de la dame. L'homme d'église, actuellement détenu au Mali, avait été arrêté en Suisse en juillet 2001 et transféré au centre de détention du TPIR deux mois plus tard.
Le seul religieux à avoir été acquitté par le TPIR, l'abbé Hormisdas Nsengimana, était recteur du Collège Christ-Roi de Nyanza (sud), l’une des écoles les plus prestigieuses du Rwanda. L’homme d’église, qui enseignait le latin et disait quotidiennement la messe dans son établissement, était accusé d’avoir supervisé les tueries de Tutsis au collège et dans les environs. La poursuite soutenait, en particulier, qu'il avait été impliqué dans le meurtre de plusieurs femmes et prêtres tutsis. Mais la chambre de première instance a conclu, en novembre 2009, à l'unanimité, que les moyens de preuve présentés par l'accusation n'étaient pas suffisamment crédibles pour prouver au-delà de tout doute raisonnable la culpabilité de l'abbé. Le procureur n'a pas jugé utile de faire appel. Hormisdas Nsengimana a alors rejoint un diocèse du nord de l’Italie, en mars 2010. Il avait été arrêté huit ans plus tôt au Cameroun.
Le dernier prêtre catholique inculpé par ce tribunal, l'abbé Wenceslas Munyeshyaka, devrait être jugé en France, conformément à une décision de dessaisissement du TPIR. Le renvoi de cet ancien vicaire de la paroisse de la Sainte Famille à Kigali diffère de celui d’Uwinkindi. En effet, dans le cas du prêtre catholique, seul le dossier a été remis aux autorités judiciaires de la France où vit l’accusé qui n’a jamais mis les pieds au siège du T¨PIR à Arusha. Son dossier a été transféré en novembre 2007 en même temps que celui de l’ancien préfet de Gikongoro (sud) Laurent Bucyibaruta. Selon l’acte d’accusation émis par le TPIR, Munyeshyaka est poursuivi pour génocide, viols, assassinats et extermination pour des exactions commises à son église et ses environs. Si Paris mène encore ses propres enquêtes, Kigali a, de son côté, déjà condamné par contumace Munyeshyaka à la réclusion criminelle à perpétuité, en novembre 2006.
ER/GF