Yvonne Ntacyobatabara fait l’objet de six chefs d’accusation pour génocide et incitation au génocide. Le ministère public l’accuse notamment pour sa participation au massacre de l’église des Pallotines de Gikondo, début avril 1994. Elle aurait incité les milices de son quartier au génocide, par des « cadeaux, des promesses, des abus d’autorité et des menaces ». Selon son acte d’accusation, elle aurait usé de son autorité au sein de la CDR. Mais elle affirme n’avoir jamais appartenu à ce parti. Depuis le début de l’enquête en 2007, soixante-et-onze témoins ont été entendus par le juge d’instruction à la demande du procureur et de la défense.
« Les preuves viennent d’un petit groupe de personnes » qui souhaitent retirer « des gains » de ce procès, a affirmé maître Viktor Koppe, défenseur de l’accusée, à l’ouverture des audiences. La défense a plaidé l’irrecevabilité de l’affaire, reprochant au procureur de ne pas avoir divulgué l’une des pièces à décharge : un jugement rendu en 2003 par le tribunal de première instance de Kigali. Selon la défense, les magistrats rwandais mettent en doute, dans ce jugement, la crédibilité de nombreux témoins, dont ceux qui accusent aussi Yvonne Ntacyobatabara. Mais cette requête a été rejetée.
Au terme de cette première journée d’audience, l’accusée a elle-même plaidé sa cause, affirmant être « innocente ». « Le parquet général du Rwanda a fait des listes [de suspects de génocide] et je ne figure pas dans ces listes », a-t-elle affirmé, rappelant que les autorités néerlandaises lui ont accordé la nationalité néerlandaise après avoir fait leur propre enquête.
Cette enquête avait d’abord ciblé son mari, Augustin Basebya, avant d’être réorientée sur son épouse. En mai 2010, le domicile d’Yvonne Ntacyobatabara avait été perquisitionné. Elle avait ensuite été placée en détention provisoire jusqu’en juin 2012.
C’est la seconde fois que la justice néerlandaise se penche sur le drame rwandais. En 2009, Joseph Mpambara, milicien interahamwes, avait été reconnu coupable de crimes de guerre pour le massacre de l’église de Mugonero, puis condamné à la perpétuité par un tribunal néerlandais. A l’époque, les Pays-Bas n’avaient pas compétence pour poursuivre le crime de génocide.
SM/GF