Les deux hommes ont été élus au premier tour, en mars dernier, en dépit des accusations de crimes contre l’humanité portées contre eux. La procureure de la CPI, Fatou Bensouda, les accuse d’avoir joué un rôle important dans les violences post-électorales de fin 2007 à début 2008 dans leur pays.
S’exprimant lundi à la clôture du sommet, le premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, président en exercice de l’organisation continentale, a accusé la Cour de se livrer à « une sorte de chasse raciale » aux Africains. Lors de la création de la CPI, « l’objectif était d’éviter toute sorte d’impunité, mais désormais le processus a dégénéré en une sorte de chasse raciale », a affirmé le dirigeant éthiopien. « La CPI doit bien comprendre qu’elle ne devrait pas pourchasser des Africains (…) les dirigeants africains ne comprennent pas les poursuites contre » Kenyatta et Ruto, a ajouté le chef du gouvernement éthiopien.
La présidente de la Commission de l’UA, la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, a abondé dans le même sens. « Maintenant que le Kenya a réformé sa justice, les choses devraient être laissées aux tribunaux » kényans, a-t-elle recommandé.
Le procès du président Kenyatta doit s’ouvrir le 9 juillet tandis que le début du procès de Ruto a été reporté sine die début mai. Les deux dirigeants ont jusqu’à présent comparu librement devant leurs juges de la CPI mais la procureure a averti que des mandats d’arrêt seraient lancés s’ils ne coopéraient pas.
La magistrate gambienne a cependant dû renoncer en mars dernier aux poursuites contre un autre dirigeant kényan, l’ancien directeur de cabinet de la présidence, Francis Muthaura, suite notamment au revirement du principal témoin de l’accusation et au sentiment de peur chez d’autres témoins.
La résolution de l’UA n’aura aucune force contraignante sur la CPI, une cour indépendante. Seul le Conseil de sécurité de l’ONU, auquel elle est liée par un accord de coopération, peut demander une suspension des procédures, mais pas l’abandon définitif.
« Dans tous les cas, la tâche s’annonce ardue pour Bensouda », a commenté sous couvert de l’anonymat, un juriste kényan travaillant au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) basé à Arusha, en Tanzanie. « Il ne lui sera pas facile de convaincre des témoins kényans de venir déposer contre leur président et leur vice-président démocratiquement élus, et cela, dès le premier tour», a-t-il estimé.
ER