06.08.13 - TPIR/KAMBANDA - CONDAMNE A LA PERPETUITE, L’EX- PREMIER MINISTRE JEAN KAMBANDA DRESSE UN REQUISITOIRE CONTRE LE TPIR

Arusha, 05 août 2013 (FH) - Sous le titre « Rwanda face à l’apocalypse », l’ancien Premier ministre du gouvernement rwandais en place pendant le génocide des Tutsis 1994, Jean Kambanda, vient de publier depuis sa prison de Koulikoro au Mali, un réquisitoire contre le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).

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Ce témoignage de quelque 400 pages est publié aux éditions E.M.E. « Sources d’Homme » en Belgique. Condamné à la peine maximale, en dépit de ses aveux, l’ancien patron des Banques Populaires du Rwanda clame aujourd’hui avoir été victime d’une supercherie savamment orchestrée par le procureur.Après son arrestation, à Nairobi le 18 juillet 1997, Kambanda est acheminé par avion au siège du tribunal à Arusha, en Tanzanie. Il est alors installé dans « une somptueuse villa », pour reprendre ses propres termes. Selon son récit, il va passer dans la villa une quinzaine de jours au cours desquels il sera quotidiennement soumis à 16 heures d’interrogatoire par une équipe du procureur. Le 3 août, il est transféré au centre de détention du TPIR. « Du 3 au 27 août 1997, je suis resté dans ma cellule sans jamais sortir, ne serait-ce qu’une seule minute. Ce supplice a provoqué des séquelles physiques et physiologiques que je garde toujours », témoigne Kambanda.Le lendemain, départ pour  Dodoma dans le centre de la Tanzanie, toujours en présence de ceux qu’il appelle, par antiphrase, « mes deux anges gardiens », Pierre Duclos et Marcel Desaulniers, deux enquêteurs du bureau du procureur. Jusque- là toujours pas d’acte d’accusation, s’indigne-t-il.« Depuis mon arrestation jusqu’à ma comparution initiale, près de neuf mois après, je suis resté sous la responsabilité exclusive du bureau du procureur, au su et au vu des juges. Pourtant mon avocat et certaines organisations, comme Amnesty International, les avaient alertés ». Selon ce témoignage, le greffe refusera de lui commettre d’office le défenseur de son choix, le Belge Johan Scheers, pourtant inscrit sur la liste. « Celui qu’on a appelé mon avocat, Maître Oliver Michael Inglis, m’a, en fait, été imposé par le Procureur adjoint Bernard Muna », accuse le condamné soulignant que lors de ses rares séances de travail avec Maître Inglis, l’enquêteur Pierre Duclos, s’asseyait tout près et tenait à recevoir à la fin un compte-rendu de l’entretien.Ainsi « otage du bureau du procureur », en « conflit avec le greffe », sans véritable assistance judiciaire et face au « laisser-aller des juges », l’universitaire n’avait d’autre choix, selon lui, que de plaider coupable. Surtout, explique-t-il, que le procureur adjoint Bernard Muna lui avait promis d’obtenir des juges une réduction de peine et de relocaliser sa famille qui vivait alors en Côte d’Ivoire. A en croire l’ex-Premier ministre, le bureau du procureur est allé jusqu’à faire pression sur sa famille après qu’elle fut arrivée en Egypte, pour qu’il ne revienne pas sur ses aveux. Il affirme que des représentants du bureau du procureur ont menacé d’abandonner sa femme et ses enfants dans le désert s’il revenait sur sa décision de plaider coupable.« Que pouvais-je ? (…) J’estimais et j’estime toujours que je devais tout céder afin de pouvoir, un jour, livrer librement, mon propre témoignage, juste pour l’Histoire. Si j’ai plaidé coupable sur l’ensemble des chefs d’accusation, c’est pour ce seul motif ». Le grand événement eu lieu le 01 mai 1998. Kambanda plaida coupable de tous les six chefs d’accusation qui avaient été portés contre lui. Il fut cependant condamné à la perpétuité le 4 septembre 1998.Déçu, il fit appel et cessa de coopérer avec le bureau du procureur. Après le dépôt de son recours, accuse-t-il, deux émissaires du bureau du procureur, Gilbert Morizette et France Thibodeau sont allés voir sa famille qui venait d’obtenir l’asile aux Etats-Unis, pour une nouvelle pression. Ils auraient tenté de convaincre son épouse de lui téléphoner pour lui dire de maintenir le plaidoyer de culpabilité devant la chambre d’appel. « Proposition que j’ai rejetée. J’en ai profité pour informer la Procureure générale du TPIR que si de telles pressions continuaient à être exercées sur ma famille, je lui demanderais de s’adresser à la justice de son pays d’accueil pour solliciter sa protection. Ce fut cette menace qui mit fin à toutes ces pressions du bureau du procureur sur ma famille », écrit le condamné.Aujourd’hui, il reconnaît seulement l’échec de son gouvernement à assurer la sécurité de tous les Rwandais à l’époque. «L’homme que je suis n’a commis aucun crime contre aucun individu. Je plaide coupable d’avoir dirigé un gouvernement qui n’a pas été capable de protéger son peuple, l’ensemble de son peuple, et non pour un quelconque acte criminel que j’aurais personnellement commis ou commandité ». « Ce gouvernement a fait tout ce qu’il pouvait », assure-t-il.ER