Claude Muhayimana, 52 ans, est accusé par Kigali d'avoir participé au massacre de Tutsis dans la ville de Kibuye (Ouest), tandis qu’Innocent Musabyimana, 41 ans, est poursuivi pour des massacres dans la province de Gisenyi (Nord-Ouest), à la frontière congolaise.Contrairement au Canada, aux Etats-Unis et à la Norvège qui ont déjà procédé chacun à au moins une extradition vers le Rwanda, la justice française a toujours rejeté les demandes rwandaises.
Muhayimana et Musabyimana présentent la particularité d'avoir déjà été confrontés à des juridictions compétentes en matière d'extradition. Les cours d'appel de Dijon et de Rouen avaient initialement rendu un avis favorable à leur extradition dans deux arrêts annulés par la Cour de cassation, qui a renvoyé l'examen des requêtes rwandaises devant la cour d'appel de Paris.Dans les deux cas, la Cour de cassation avait invoqué deux principes fondamentaux, ceux de la «légalité des délits et des peines » et de la « non-rétroactivité de la loi pénale », qui stipulent qu'on ne peut être jugé pour une infraction qui n'était pas définie par la loi au moment où les faits auraient été commis. La loi rwandaise sur le génocide est postérieure à 1994.
A l'audience mercredi, l’avocat général a demandé l’extradition de Musabyimana et Muhayimana, rompant ainsi avec une tradition du parquet de Paris. Il a soutenu que les crimes de génocide et les crimes contre l’humanité, du fait de leur extrême gravité, devraient faire exception.Abondant dans le même sens, l'avocat du Rwanda, Gilles Paruelle, a rappelé que la France avait pu juger Maurice Papon ou Paul Touvier pour des faits datant de l'Occupation alors même que la première loi française punissant les crimes contre l'humanité ne date que de 1964.L'avocat des deux Rwandais, Me Philippe Meilhac, s'est insurgé, pour sa part, contre « le revirement à 180 degrés du ministère public » sur les extraditions vers le Rwanda.Le premier procès en France lié au génocide des Tutsis se tiendra en février et mars 2014. L'ex-capitaine Pascal Simbikangwa sera jugé par les assises de Paris.ER