Le président français François Hollande, invité d'honneur de l'Egypte jeudi pour l'inauguration du nouveau Canal de Suez, a résolument placé la lutte contre le terrorisme au coeur de la relation franco-égyptienne, tout en affirmant avoir défendu la vision française des droits de l'Homme.
Son hôte, le président Abdel al-Sissi, qui a destitué son prédécesseur l'islamiste Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu d'Egypte, est accusé de "crimes contre l'humanité" par des organisations de défense des droits de l'Homme.
"Aujourd'hui, les relations entre la France et l'Egypte sont fondées sur des intérêts communs, c'est la lutte contre le terrorisme et pour la sécurité", a martelé le chef de l'Etat devant la presse, à l'issue d'un entretien bilatéral avec le raïs égyptien.
Sa présence à Ismaïlia, aux côté du président égyptien qui tient son pays d'un main de fer, été épinglée par certains médias en France.
L'organisation Human Rights Watch a accusé le président Sissi de "tuerie de masse qui s'apparente probablement à un crime contre l'Humanité", après la mort de quelque 1.400 partisans de M. Morsi.
Mais "cela n'empêche pas qu'il y ait de la franchise entre nous", Français et Egyptiens, s'est défendu M. Hollande. "Nous l'avons toujours dit à travers les processus électoraux que nous souhaitons voir dans un court délai", a-t-il ajouté.
Les élections législatives sont d'ailleurs "prévues, ça m'a été confirmé (par M. Sissi), à la fin de l'année", a ajouté M. Hollande.
"Cette coopération va se poursuivre et se renforcer. Il y a déjà eu des livraisons d'une frégate, il y en aura d'autres, parce que nous avons la volonté de faire en sorte que l'Egypte puisse se défendre face au terrorisme", a souligné M. Hollande.
Il faut que "nous puissions donner à l'Egypte les moyens d'agir, et aussi à la France les moyens d'être protégée", a insisté M. Hollande. "C'est le sens de la livraison des premiers Rafale".
L'Egypte est le premier pays à avoir acheté l'avion de combat français. Trois sur les 24 commandés ont d'ailleurs participé à la parade militaire jeudi à Ismaïlia.
ll a également assuré que les relations économiques entre Paris et Le Caire étaient "solides". Selon lui, "la nouvelle configuration" du canal de Suez "va permettre à des entreprises françaises de venir s'installer" dans le pays.
"Je suis préoccupé par la situation dans la région: Libye, Syrie, Irak, Yémen, et les actes terroristes ici même en Egypte, notamment dans le Sinaï", a affirmé le président français. Un jeune Croate travaillant pour l'entreprise française CGG a été enlevé fin juillet par l'organisation Etat islamique, qui menace de le décapiter si des femmes musulmanes emprisonnées ne sont pas libérées.
"Ce cas-là est particulièrement douloureux" et "les Egyptiens font tout pour retrouver" ce père de famille de 30 ans, a-t-il assuré.
"Face à cette menace (du terrorisme islamiste), nous devons trouver des partenaires, que ces partenaires puissent à la fois avoir les moyens de se défendre contre le terrorisme et de contribuer à chercher avec nous des solutions pour la paix dans la région. Telle est le sens de ma présence ici et des entretiens avec le président égyptien et les chefs d'Etat et de gouvernement présents à cette cérémonie", a martelé M. Hollande.
L'émir du Koweït, les présidents yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi et soudanais Omar el-Béchir étaient notamment présents.
Il a promis que la relation franco-égyptienne allait "demeurer à haut niveau sur la coopération que nous devons avoir en matière de sécurité".
Plus de 15.000 partisans de l'ex-président Morsi, essentiellement des membres de sa confrérie des Frères musulmans, ont été emprisonnés et des centaines condamnés à morts dans des procès de masse expéditifs qualifiés par l'ONU de "sans précédent dans l'histoire récente" du monde.
La répression, d'abord limitée à l'opposition islamiste, s'est ensuite élargie aux mouvements laïcs et de gauche, fers de lance de la révolte de 2011.
A la veille de la visite de M. Hollande en Egypte, Reporters sans frontières avait alerté le président français "sur l'état inquiétant de la liberté de la presse en Egypte".