L'accord visant à mettre fin à 20 mois de guerre civile au Soudan du Sud "n'est plus négociable et il ne reste qu'à le signer", a affirmé tard mardi le chef de la médiation est-africaine, Seyoum Mesfin, à Addis Abeba.
Chef des rebelles qui affrontent l'armée sud-soudanaise depuis décembre 2013, l'ancien vice-président Riek Machar a signé lundi le document, à l'inverse du président Salva Kiir qui s'est vu accorder le délai de 15 jours qu'il réclamait. Le gouvernement sud-soudanais a ensuite estimé ne "pas pouvoir accepter" cet accord, qualifié de "capitulation", faisant naître des doutes sur une future signature.
Voici les principaux points de l'accord publié par la médiation:
- CESSEZ-LE-FEU -
Un "cessez-le-feu permanent" entre en vigueur dans les 72 heures de la signature de l'accord par les parties au conflit.
Dans les 30 jours, elles procèdent "à la séparation, au rassemblement et au cantonnement" de leurs forces combattantes en vue notamment de l'enregistrement et du stockage des "armes, munitions et autres équipements" et de mesures de "désarmement, démobilisation et réintégration".
L'accord prévoit à terme "l'unification" des forces belligérantes au sein des Forces nationales de défense du Soudan du Sud (NDFSS).
- DÉPART DES FORCES ÉTRANGÈRES -
Les forces régulières étrangères - essentiellement l'armée ougandaise qui combat au côté des troupes gouvernementales sud-soudanaises - doivent avoir quitté le territoire sous 45 jours après la signature.
Les forces non-gouvernementales étrangères - principalement des milices soudanaises - doivent elles être "désarmées, démobilisées et rapatriées" dans un délai de 90 jours.
A l'issue de ces mêmes 90 jours, aucune force militaire ne doit subsister dans un rayon de 25 km autour de la capitale Juba. Seules la garde présidentielle, les unités surveillant les infrastructures militaires et la police sont autorisées dans la capitale.
Les enfants-soldats et les prisonniers de guerre doivent être libérés et le libre accès des organisations humanitaires garanti.
- PARTAGE DU POUVOIR -
Une "période transitoire" de 30 mois, durant laquelle Salva Kiir reste président, s'ouvre 90 jours après la signature.
Au côté de l'actuel vice-président, un poste de "Premier vice-président" est attribué aux rebelles. Il est probable que Riek Machar récupère ce poste, dont il avait été limogé par M. Kiir, six mois avant que n'éclate le conflit, qui plonge ses racines dans la rivalité entre les deux dirigeants à la tête du régime.
Durant la période transitoire les décisions doivent être "collégiales" et le président exerce ses pouvoirs "en consultation avec le vice-président en vue de parvenir à une entente et un accord mutuel". Un mécanisme, renvoyant au Conseil des ministres, est prévu en cas de blocage.
Un "gouvernement transitoire d'union nationale" est formé et entre en fonction à l'ouverture de la "période transitoire". Il compte 30 ministres: 16 attribués au gouvernement actuel, dix à la rébellion et quatre "autres forces politiques".
Une Assemblée transitoire comprend les 332 députés actuels, auxquels s'ajoutent 50 députés de la rébellion et 18 d'autres forces politiques.
Dans sept des dix Etats qui composent le pays, le gouvernement actuel récupère 85% des postes des exécutifs locaux contre 15% pour les rebelles. Ceux des trois Etats d'Unité, du Haut-Nil et du Jonglei, principaux champs de bataille du conflit, sont répartis à 46% pour le gouvernement et 40% pour les rebelles, le reste allant aux autres forces politiques.
Des élections doivent être organisées au plus tard 60 jours avant la fin de cette "période transitoire". Soit début 2018, si M. Kiir signe l'accord à l'issue du délai de 15 jours.
- CRIMES DE GUERRE -
Les signataires "s'excusent sans réserves auprès du peuple sud-soudanais pour les souffrances et la détresse" causées par le conflit, marqué par des massacres et atrocités, qui a fait des dizaines de milliers de morts et chassé de chez eux quelque 2,2 millions de Sud-Soudanais.
Une "Commission vérité, réconciliation et guérison" est chargée de "recenser les violations des droits humains, les transgressions de l'Etat de droit et les abus de pouvoir" depuis 2005, signature d'un accord de paix avec Khartoum ayant abouti à l'indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011. Elle recevra les plaintes des victimes et identifiera les auteurs des violations et crimes.
Un "Tribunal hybride pour le Soudan du Sud" (HCSS), indépendant, sera mis en place par la Commission de l'Union africaine pour enquêter et poursuivre les "crimes graves" commis durant le conflit, notamment les possibles actes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre.
Les individus inculpés ou condamnés par ce tribunal ne pourront participer au gouvernement de transition et à ses successeurs, et aucune immunité n'est recevable.