Des responsables de l'UNESCO et de pays arabes réunis mercredi en Egypte ont appelé à lutter contre les "destructions sans précédent" de vestiges de l'Antiquité par le groupe Etat islamique (EI), qu'ils accusent notamment de s'adonner au trafic d'antiquités pour financer ses activités.
Ces appels sont intervenus à l'ouverture d'une conférence internationale de deux jours organisée pour "combattre ceux qui détruisent notre Histoire commune", a commenté à la tribune Deborah Lehr, présidente de Antiquities Coalition, un groupe d'experts et d'archéologues rassemblés pour lutter contre les destructions du patrimoine à travers le monde.
Organisée par l'Egypte, la conférence réunit des ministres et responsables du patrimoine culturel de 11 pays arabes ainsi que des experts étrangers et de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO).
Elle se tient un mois après une nouvelle destruction de vestiges en Irak. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux on voit les jihadistes de l'EI détruire à coups de bulldozers, de pioches et d'explosifs le site archéologique de Nimroud, joyau de l'empire assyrien fondée au 13e siècle.
Ils s'en étaient déjà pris à Hatra --une cité de la période romaine vieille de 2.000 ans-- et au musée de Mossoul, nord de l'Irak.
"Les pillages et destructions de sites archéologiques ont atteint une échelle sans précédent" cette année, a déclaré la directrice générale de l'UNESCO Irina Bokova, estimant que l'EI "y a recours comme tactique de guerre pour terroriser les populations".
"C'est un crime contre l'Humanité", a-t-elle martelé.
"Des tentatives se font jour pour détruire le patrimoine de l'Humanité dans la région, que ce soit en Irak, en Libye, au Yémen ou en Egypte", a commenté Mamdouh Damaty, le ministre égyptien des Antiquités.
De son côté, le ministre irakien du Tourisme et des Antiquités Adel Fadh al-Shirshab a accusé les jihadistes de l'EI d'avoir "pillé et volé des antiquités" dans son pays pour financer leur guerre.
"Nous devons couper leurs sources de financement, et (le trafic) d'antiquités en est une", a-t-il indiqué à des journalistes en marge de la conférence.
La conférence du Caire, intitulée "Propriété culturelle sous la menace: l'impact culturel, économique et sécuritaire du pillage d'antiquités au Moyen-Orient", a pour objectif d'"unifier les efforts pour contrer cette menace", selon Mme Lehr.
"Ces deux dernières années, aux Etats-Unis seulement, l'importation légale d'antiquités a augmenté de 1.000% (...) Imaginez ce qu'il doit en être du trafic illicite", a-t-elle indiqué à l'AFP.
Plus tard dans la journée, lors d'une visite à la prestigieuse université islamique d'Al-Azhar au Caire, Mme Bokova a réitéré son appel à la protection des antiquités.
"Pouvons-nous concevoir l'Egypte sans les pyramides, la Vallée des rois, ou des reines (..) sans Karnak?", a affirmé Mme Bokova, faisant référence aux imposants vestiges pharaoniques de l'Egypte.
"Je ne pense pas que nous puissions concevoir une telle chose", a-t-elle souligné.