L'ONU a appelé mercredi, dans un rapport, à la mise en place d'un tribunal spécial "hybride" associant juges locaux et internationaux pour juger les crimes commis au Sri Lanka lors du conflit avec les Tigres tamouls, dénonçant en particulier des "dizaines de milliers de disparitions forcées".
Publié mercredi à Genève, ce rapport recommande la constitution d'"un tribunal spécial hybride intégrant des juges, des procureurs, des avocats et des enquêteurs internationaux", considérant qu'un tribunal national n'aurait "aucune chance de surmonter les suspicions alimentées par des décennies" de conflit.
Le rapport, rédigé par des experts mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, note de "graves violations entre 2002 et 2011" avec de "fortes indications que des crimes de guerre et contre l'humanité ont été probablement commis par les deux parties en conflit".
La guerre civile au Sri Lanka, qui a duré" 37 ans, a fait plus de 100.000 morts, et a pris fin en 2009 avec l'écrasement de la rébellion séparatiste des Tigres tamouls.
"Les disparitions forcées ont affecté des dizaines de milliers de Sri Lankais pendant des décennies (...) Il y a des éléments raisonnables pour croire que ces disparitions forcées ont été menées dans le cadre d'une attaque large et systématique contre la population civile", dénonce ce rapport de 250 pages dont la publication était très attendue.
Il évoque notamment la disparition de nombreuses personnes qui s'étaient rendues dans la phase finale de la guerre et n'ont toujours pas été retrouvées. Il dénonce aussi "l'étendue des violences sexuelles commises contre les détenus, extrêmement brutales" et touchant aussi bien les hommes que les femmes.
Le recrutement d'enfants, parfois de moins de 15 ans, parmi les combattants des Tigres tamoul mais aussi par le groupe paramilitaire Karuna, qui soutenait le gouvernement, est également dénoncé dans ce rapport.
Les enquêteurs, parmi lesquels des experts militaires, n'ont pu se rendre sur place et des témoins avaient été intimidés par les autorités mais ils ont fondé leur enquête sur des témoignages, des documents, des images satellite confidentielles.
Les recommandations du rapport vont nettement plus loin que la proposition formulée lundi devant le Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU par le nouveau gouvernement du Sri Lanka, qui a annoncé la prochaine mise en place d'un bureau des réparations de guerre et d'une commission vérité.
Le président sri-lankais Maithripala Sirisena, élu en janvier, a promis d'encourager la réconciliation et d'enquêter sur les crimes qu'aurait commis l'armée lors de la campagne militaire ayant mis fin à la rébellion tamoule en 2009, quand l'ancien homme fort, Mahinda Rajapakse, était au pouvoir
La semaine dernière un député tamoul a pris la direction de l'opposition au parlement du Sri Lanka pour la première fois en 32 ans.