La Mauritanie a adopté un décret créant trois cours criminelles spécialisées en matière de lutte contre l'esclavage, a-t-on appris vendredi de source officielle, quatre mois après le vote d'une nouvelle loi durcissant la répression de cette pratique et doublant les peines prévues contre ses auteurs.
Ce décret "fixant les sièges et ressorts territoriaux des Cours criminelles spécialisées en matière de lutte contre l'esclavage" instituées par la loi votée en août dernier a été validé par le Conseil des ministres réuni jeudi, a rapporté l'Agence mauritanienne d'information (AMI, officielle).
D'après ce texte, ces cours siègeront à Nouakchott, Néma (sud-est) et Nouadhibou (extrême nord-ouest), chacune ayant compétence pour les régions voisines.
Les magistrats membres de ces institutions régies par le Code de procédures pénales mauritanien seront nommés dans les prochaines semaines par le Haut conseil de la magistrature, a expliqué le ministre de la Justice, Me Brahim Ould Daddah, cité par l'AMI.
Me Ould Daddah a précisé que ces cours criminelles spécialisées connaîtront des crimes aussi bien de l'esclavage moderne que "des cas qui se manifesteraient de l'esclavage traditionnel".
"L'esclavage traditionnel n'existe plus dans le pays" a-t-il affirmé, appelant ses compatriotes à "en dénoncer" les cas résiduels et affirmant qu'en la matière, la loi "sera appliquée dans toute sa rigueur".
"Ces pratiques esclavagistes anachroniques ne sont plus tolérées, ni dans le présent, ni dans le futur", a-t-il souligné.
Officiellement, l'esclavage a été aboli en 1981 dans ce pays de 3,8 millions d'habitants d'origine arabo-berbère - les Maures - et d'Afrique subsaharienne - les Négro-Africains.
Une loi qui criminalisait le phénomène depuis 2007 a été remplacée par un nouveau texte voté par le Parlement (Assemblée nationale et Sénat) le 11 août, faisant désormais de l'esclavage un "crime contre l'Humanité". Les peines maximales encourues passent à 20 ans de prison ferme assorties d'amendes, contre cinq à dix ans auparavant.
La nouvelle loi incrimine de nouvelles formes d'esclavage, dont le mariage forcé d'une esclave présumée moyennant une contrepartie, sa cession à un tiers, ou son legs à un tiers. Elle institue aussi des juridictions spécialisées pour les infractions relatives à l'esclavage.
Des ONG soutiennent que le phénomène persiste dans le pays. Le 28 novembre, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz a accusé ces organisations de "faire de l'esclavage un fonds de commerce" et de porter atteinte à l'unité et à la stabilité du pays.