Devant la CPI, l'Ivoirien Blé Goudé s'affirme comme "un homme de paix" un "pacifiste dans l'âme", affirme sa défense

2 min 35Temps de lecture approximatif

Charles Blé Goudé, ancien chef du mouvement des Jeunes patriotes fidèles à l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, a assuré mardi devant la CPI être innocent des crimes contre l'humanité dont il est accusé, se présentant comme un "homme de paix" n'ayant "aucune goutte de sang" sur les mains.

Les deux hommes comparaissent devant la Cour pénale internationale de La Haye pour leurs rôles présumés dans la crise née du refus de l'ex-chef de l'Etat de céder le pouvoir à Alassane Ouattara, reconnu vainqueur par la France, les Etats-Unis et l'Union européenne de la présidentielle de fin 2010.

Les violences avaient fait plus de 3.000 morts en cinq mois, des deux côtés du conflit, transformant en champ de bataille certaines zones du premier producteur mondial de cacao, moteur économique de l'Afrique de l'Ouest.

M. Blé Goudé et son mentor sont accusés de quatre chefs de crimes contre l'humanité: meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains, présumés commis notamment par les Jeunes patriotes.

Petites lunettes noires rectangulaires, costume bleu et chemise blanche, Charles Blé Goudé, 44 ans, s'est exprimé avec éloquence devant les juges, se tournant régulièrement vers ses partisans réunis dans la galerie du public.

"Jamais, je n'ai commis de crimes, jamais", a assuré celui qui était surnommé le "général de la rue" pour sa capacité à mobiliser les partisans de Laurent Gbagbo, assurant: "dans mes relations avec mes concitoyens, aucune goutte de sang ne crie contre moi".

"Au cours de la crise, j'ai pris des risques énormes, de village en village, dans les campagnes, pour sensibiliser les populations à la paix, j'ai lancé des appels à la retenue", a-t-il affirmé.

L'accusé avait épinglé sur le revers de sa veste un pin's du Cojep, le Congrès panafricain des Jeunes patriotes, qu'il a fondé en 2001. Ce groupe était le fer de lance de violentes manifestations antifrançaises en janvier 2003 et novembre 2004.

Mais selon sa défense, en 2007, Charles Blé Goudé a parcouru le pays avec sa "caravane de la paix", appelant à "tendre la main à l'ennemi". Des vidéos de cette époque montrées aux juges ont ému les partisans de l'ex-chef de milice présents dans le public, qui ont versé quelques larmes.

- Rien à se reprocher -

Très charismatique, Charles Blé Goudé est considéré par ses détracteurs et les ONG internationales comme un de ceux ayant le plus contribué aux violences de 2010-2011.

"La justice, il ne faut pas la fuir, surtout quand on ne se reproche rien, a-t-il ajouté. C'est pourquoi je me tiens devant vous avec confiance".

Auparavant, son avocat, le Néerlandais Geert-Jan Knoops, l'avait comparé au champion des droits civiques Martin Luther King, affirmant que M. Blé Goudé était "un pacifiste dans l'âme".

L'avocat a également présenté une vidéo montrant l'accusé avec Jesse Jackson, un proche du pasteur américain.

MM. Gbagbo et Blé Goudé avaient plaidé non-coupable jeudi à l'ouverture du procès. L'accusation assure que l'ancien président, âgé de 70 ans, s'est accroché au pouvoir "par tous les moyens".

La défense de Laurent Gbagbo a, elle, accusé lundi Alassane Ouattara de s'être emparé du pouvoir "par la force", avec l'aide de la France, l'ex-puissance coloniale.

Laurent Gbagbo, dont la santé est "fragile", selon ses avocats, avait été livré à la CPI en 2011. Charles Blé Goudé l'avait été en 2014.

La peine maximale encourue devant la CPI est de 30 ans de prison, mais les juges peuvent prononcer une peine plus lourde s'ils estiment que les crimes commis sont exceptionnellement graves.

Mercredi, l'accusation appellera à la barre ses premiers témoins.

Bien que le procureur ait promis d'intensifier ses efforts et appelé à la patience, aucun membre du camp Ouattara n'a encore été inquiété par la CPI, ce qui lui vaut parfois d'être taxée de "justice des vainqueurs".

"Je ne suis pas un homme de guerre et j'appelle à la réconciliation dans mon pays, j'appelle à la paix", a conclu M. Blé Goudé, applaudi par ses partisans, souhaitant être "jugé sur mes actes en tant qu'individu et non sur ce qu'on aurait voulu que je sois".