L'ancien président roumain Ion Iliescu est poursuivi pour "crimes contre l'humanité" dans le cadre de l'enquête sur la violente expédition punitive des mineurs de 1990, a annoncé mercredi le Parquet général.
"M. Iliescu a été informé de l'ouverture de poursuites à son encontre", a indiqué à l'AFP un porte-parole du Parquet.
L'ex-président âgé de 85 ans, qui a passé une heure dans la matinée au Parquet général, a refusé de répondre aux questions des journalistes l'attendant à la sortie.
Il est accusé d'avoir appelé des milliers de "gueules noires" à Bucarest pour mater un mouvement d'opposition qui avait bloqué le centre-ville pendant plusieurs semaines à la mi-1990, six mois après la chute du régime communiste.
"La répression violente de la manifestation organisée place de l'Université a fait quatre morts et un millier de blessés, dont trois par balles", a indiqué le Parquet.
Le chef du service roumain de renseignements (SRI) de l'époque, Virgil Magureanu, a pour sa part été auditionné mercredi par les procureurs sur son rôle dans ces événements qui avaient profondément terni l'image de la Roumanie.
Les procureurs avaient décidé en mars de rouvrir l'instruction de cette affaire, suite à la condamnation en septembre 2014 de Bucarest par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour une enquête "lacunaire et déficiente", marquée par de "longues périodes d'inactivité".
M. Iliescu avait déjà été mis en examen en 2005 pour "meurtre et tentative de meurtre" mais en 2007 le Parquet avait infirmé cette inculpation, estimant que l'enquête avait été entachée de vices de procédure, et ordonné qu'elle reparte à zéro.
L'ancien président, qui a dirigé la Roumanie à deux reprises, entre 1990-1996 puis entre 2000-2004, avait assuré en 2005 n'avoir "rien à (se) reprocher" dans cette affaire et affirmé que son inculpation "serait une honte nationale".
En 2008, les procureurs avaient décidé d'un non-lieu en sa faveur, estimant que les faits qui lui étaient reprochés "n'existaient pas".
La CEDH avait été saisie par l'épouse de l'une des victimes, un homme tué par un coup de feu tiré du ministère de l'Intérieur, ainsi que par un homme maltraité par des policiers et des hommes en civil dans le sous-sol du bâtiment de la télévision publique.
En septembre 2014 elle a décidé d'accorder 30.000 euros de dommage moral à la veuve du manifestant tué et 15.000 euros au manifestant maltraité.