A l'approche du prononcé du jugement contre Radovan Karadzic, le procureur du TPIY a invité mercredi les hommes politiques des Balkans à abandonner les discours qui divisent les communautés et évoquent ceux utilisés pendant les guerres des années 90.
Beaucoup d'hommes politiques "utilisent encore des discours qui sont proches de ceux du passé", aujourd'hui utilisés en tant qu'élément de preuve pour poursuivre les suspects de crimes de guerre, a déclaré le procureur, Serge Brammertz, lors d'une rencontre avec la presse.
"C'est vraiment l'aspect le plus frustrant et le plus décevant : malgré tout le travail accompli, malgré les millions de pages qui démontrent ce qu'il s'est passé, il y a encore tellement de personnes qui refusent d'accepter qu'ils suivaient des hommes politiques ou militaires qui tiraient avantage de leur naïveté", a-t-il également déclaré.
"Ce n'est pas ce que j'attends de la part d'hommes politiques responsables qui espèrent rejoindre le projet européen", a poursuivi le procureur.
Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) prononcera son jugement le 24 mars contre l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic.
Voir les criminels de guerre reçus de retour au pays "comme des héros" ou certains hommes politiques nier le génocide de Srebrenica "ne peut avoir qu'un impact négatif sur l'ensemble du processus de réconciliation", a-t-il ajouté.
Les forces serbes de Bosnie avaient massacré près de 8.000 hommes et garçons musulmans à Srebrenica en juillet 1995, le pire massacre commis en Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale.
La Bosnie et la Serbie espèrent rejoindre l'Union européenne, qui garde un oeil sur leur coopération avec le tribunal de La Haye.
Les juges du TPIY avaient critiqué la Serbie le mois dernier pour avoir manqué à son obligation d'arrêter trois hommes suspectés de subordination de témoins.
"Un pays qui veut rejoindre l'Union européenne doit respecter un certain nombre de règles, notamment celles du droit", a ajouté le procureur : "le respect des décisions judiciaires en est une autre".
Si M. Karadzic est derrière les barreaux depuis 2008, la question est de savoir si l'ultranationaliste serbe Vojislav Seselj reviendra à La Haye pour le prononcé du jugement à son encontre, le 31 mars.
"Aussi longtemps qu'il y a en Bosnie plusieurs livres d'histoire utilisés pour les communautés serbes, croates ou bosniaques avec une analyse différente non seulement des guerres mais aussi des 200 dernières années, si une société ne peut se mettre d'accord sur l'histoire, comment avancer ?", s'est-il interrogé.