Le génocidaire rwandais présumé Ladislas Ntaganzwa, détenu par Kinshasa, a été remis dimanche au Comité de suivi des tribunaux pénaux internationaux de l'ONU par les autorités de la République démocratique du Congo et conduit au Rwanda.
Âgé de 53 ans, Ladislas Ntaganzwa, ancien maire de Nyakizu, dans le sud du Rwanda, est un des neuf génocidaires rwandais présumés recherchés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), créé pour juger les responsables du génocide de 1994 au Rwanda qui, selon l'ONU, a fait 800.000 morts, principalement Tutsi.
"M. Ladislas Ntaganzwa, accusé d'avoir participé au génocide au Rwanda, est entre les mains de nos services depuis décembre 2015, nous avons décidé de le remettre au Mécanisme de suivi des tribunaux pénaux de l'ONU", a déclaré à la presse le ministre congolais de la Justice Alexis Thambwe Mwamba.
"Nous ne sommes pas dans un cadre bilatéral avec le Rwanda, mais nous exécutons une décision du Conseil de sécurité des Nations unies", a-t-il précisé.
Embarqué dans un avion onusien, M. Ntaganza a été amené à Kigali au Rwanda, où il est mis à la disposition de la police.
M. Ntaganzwa, a été transféré à Kinshasa au mois de décembre après son arrestation dans la province troublée du Nord-Kivu (est de la RDC), frontalière du Rwanda.
Kigali s'est dit "très heureux" que le Mécanisme de suivi des tribunaux pénaux de l'ONU ait réussi à faire sortir M. Ntaganzwa de la RDC.
Ladislas Ntaganzwa est poursuivi pour "entente en vue de commettre le génocide, génocide, complicité de génocide, incitation directe et publique à commettre le génocide et crimes contre l'humanité". Il est également accusé d'avoir orchestré le viol de plusieurs femmes et doit être jugé par la justice rwandaise, à qui le TPIR a transféré son dossier en mai 2012.
- Menace stratégique -
Pour Kinshasa, M. Ntaganzwa est un des chefs des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), dont les dirigeants et les combattants les plus anciens sont présents au Congo depuis 1994.
Selon l'armée congolaise, il a été arrêté à la suite d'une opération contre les FDLR dans le cadre d'une offensive militaire lancée fin février 2015 par la RDC sans le soutien des Casques bleus de la Mission de l'ONU au Congo (Monusco). La communauté internationale dit être incapable de vérifier les résultats de l'opération annoncés par Kinshasa, selon qui la milice compterait aujourd'hui moins de 400 combattants.
Au tournant de l'année, les autorités de la RDC ont annoncé une reprise sous conditions de la coopération pour combattre les FDLR, mais les résultats continuent à se faire attendre.
Opposé au régime du président rwandais Paul Kagame, cette milice hutu rwandaise continue à déstabiliser l'Est congolais où elle est accusée de nombreuses atrocités contre des civils.
La RDC entretient des relations diplomatiques difficiles avec son petit voisin rwandais, qui a envahi le pays par deux fois, directement ou par milices interposées lors des deux guerres du Congo (1996-1997 et 1998-2003).
Après ces deux conflits qui ont laissé la RDC exsangue, Kigali a soutenu une succession de rébellions à dominantes tutsi dans l'est congolais et Kinshasa accuse régulièrement le Rwanda de déstabiliser sa façade orientale.
Le gouvernement rwandais, de son côté, accuse Kinshasa de ne rien faire pour mater les FDLR, qu'il considère toujours comme une menace stratégique majeure, en dépit du fait que ce mouvement rebelle n'a pas lancé d'offensive majeure sur le sol rwandais depuis des années.