Les juges de la Cour pénale internationale ont décidé mercredi de tenir un procès contre l'Ougandais Dominic Ongwen, les preuves rassemblées par le procureur contre cet ancien chef de la sanguinaire rébellion de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) étant suffisantes.
Les juges ont confirmé l'ensemble des 70 accusations de crimes de guerre et crimes contre l'humanité, "renvoyant M. Ongwen en procès devant une chambre de première instance", a indiqué la CPI dans un communiqué.
Il existe en effet "des motifs substantiels de croire" qu'il est responsable, en tant qu'auteur et en tant que commandant, de meurtres, viols, esclavage sexuel, torture et pillages.
Surnommé la "Fourmi Blanche", Dominic Ongwen était un des commandants les plus redoutés de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) menée par Joseph Kony, rendu célèbre par la campagne "Kony 2012".
Selon l'ONU, la LRA a tué plus de 100.000 personnes et enlevé plus de 60.000 enfants d'abord dans le nord de l'Ouganda, puis au gré de son exil dans les pays voisins.
Selon l'accusation, M. Ongwen s'est rendu coupable de crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis dans le nord de l'Ouganda sur la période 2002-2005. Lors des audiences, qui se sont tenues en janvier, le procureur avait assuré que M. Ongwen était le "fer de lance" de la LRA.
Les preuves sont donc suffisantes pour croire que les troupes de Dominic Ongwen ont attaqué les camps de déplacés de Pajule, Odek, Lukodi et Abok en 2003 et 2004. Ces attaques, selon l'accusation, ont provoqué la mort de plus de 130 personnes, dont des enfants.
Lors d'une de ces attaques, "un individu a été forcé à tuer un homme avec une massue et forcé à inspecter des corps en décomposition, dont celui de son père", avait assuré le procureur.
-Enfant soldat-
Dominic Ongwen, lui même ancien enfant soldat, "avait pour but commun d'enlever des filles et des femmes pour en faire des servantes, des épouses forcées à se marier et des esclaves sexuelles", selon la même source.
Les juges ont confirmé ces accusations, ainsi que la conscription et l'utilisation d'enfants soldats dans le nord du pays.
La décision a été rendue sur la base des éléments de preuve présentés par l'accusation et la défense, dont des "témoignages ou transcriptions d'entretiens avec un total de 123 témoins, des enregistrements de communications radio et des témoignages oraux de sept témoins", a précisé la Cour.
Une chambre de première instance doit être désignée et décidera plus tard de la date d'ouverture du procès.
Selon les experts, Dominic Ongwen, transféré à La Haye en janvier 2015, s'était livré après être tombé en disgrâce aux yeux de Joseph Kony et avoir échappé de peu à la mort.
Créée en 1987 avec l'objectif de renverser le président ougandais Yoweri Museveni pour le remplacer par un régime fondé sur les Dix commandements, la LRA s'est forgé une effroyable réputation au fil de ses exactions en Ouganda, au sud du Soudan, dans le nord-est de la République démocratique du Congo et en Centrafrique.
De nombreuses victimes ont eu les lèvres, le nez et les oreilles coupées.
Prophète auto-proclamé, Joseph Kony a mélangé mystique religieuse, techniques éprouvées de guérilla et brutalité sanguinaire. En dépit de sa jeunesse, Dominic Ongwen a très vite été repéré pour sa loyauté dans le crime, son courage au combat et ses qualités de tacticien.
Mais certains groupes de défense des droits de l'Homme estiment que Dominic Ongwen est à l'origine lui-même une victime : il a été enlevé pour devenir enfant soldat alors qu'il rentrait de l'école. Selon lui, il avait alors 14 ans.