Les juges du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) doivent rendre jeudi leur jugement contre l'ultranationaliste serbe Vojislav Seselj en absence de l'accusé, remis en liberté provisoire pour raisons de santé.
Vojislav Seselj, 61 ans, est accusé de neuf crimes de guerre et crimes contre l'humanité pour son rôle durant les guerres qui ont déchiré l'ex-Yougoslavie au début des années 1990.
Ce démagogue connu pour sa violence verbale "a propagé une politique visant à réunir tous +les territoires serbes+ dans un Etat serbe homogène, qu'il appelait la +Grande Serbie+", explique l'accusation du TPIY. "Cet Etat devait englober la Serbie, le Monténégro, la Macédoine et de vastes portions de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine".
Cet ancien étudiant en droit a donc commis ou encouragé à commettre des crimes pour forcer la majorité des non-Serbes à quitter de façon définitive ces territoires, estime le procureur.
Dans son acte d'accusation, celui-ci évoque des persécutions, des transferts forcés, des meurtres, des tortures et des destructions de bâtiments religieux ou d'écoles.
Vojislav Seselj aurait participé à cette entreprise criminelle commune en compagnie de plusieurs responsables serbes, dont l'ancien président Slobodan Milosevic, décédé dans sa cellule de La Haye (Pays-Bas) en 2006.
- Déjà trois condamnations -
Après sa reddition volontaire en 2003, l'ancien député comparaît en novembre 2005 devant les juges et refuse de plaider coupable ou non-coupable. Un plaidoyer de non-culpabilité est donc enregistré en son nom.
Son procès s'ouvre en 2006 mais est annulé après quelques audiences, l'accusé refusant de comparaître et ayant entamé une grève de la faim. Le procès recommence en 2007 et se termine en 2012, après 175 jours d'audiences.
M. Seselj, qui ne reconnaît pas la compétence du TPIY, n'a pas présenté de moyens à décharge. L'accusation, qui a requis 28 ans de détention, avait présenté 1.367 pièces à conviction.
Lors de sa plaidoirie, M. Seselj, qui se défend seul, avait assuré que les Croates avaient "commencé" la guerre, tandis que les Serbes n'avaient fait que répondre. Pour l'accusé, le tribunal n'est qu'un "outil militaire" aux mains des puissances occidentales.
Pendant son procès, M. Seselj a déjà été condamné à trois reprises - à deux ans, 18 mois et 15 mois de prison - après avoir divulgué des informations confidentielles concernant des témoins protégés qui avaient déposé.
Il avait été libéré en novembre 2014, "pour des raisons humanitaires liées à la dégradation de son état de santé", selon les juges.
- Provocations -
Depuis son retour en Serbie, Vojislav Seselj, qui a été opéré d'un cancer du côlon, ne cesse de multiplier les déclarations provocatrices à l'adresse du TPIY et a renoué avec la rhétorique nationaliste en prônant la création d'une "Grande Serbie".
Fin mars, il avait encore défié l'Occident lors d'une manifestation en incendiant les drapeaux de l'Otan, de l'Union européenne, des États-Unis et du Kosovo.
Assurant se sentir bien malgré la maladie, M. Seselj a pris la route pour mener campagne à travers le pays pour son parti, dont il est tête de liste, à l'approche des élections législatives anticipées convoquées pour le 24 avril.
Il refuse de revenir à La Haye, où les juges ont accepté son absence pour raisons de santé". A l'exception de l'un d'entre eux, qui a reproché à la Serbie de ne pas avoir arrêté l'ancien député. Belgrade était "peu enthousiaste, au minimum", a-t-il affirmé.
Lors de la lecture du jugement contre l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic le 24 mars, Vojislav Seselj avait organisé une manifestation, entouré d'environ 5.000 manifestants.
Radovan Karadzic a été condamné à 40 ans de détention après avoir été reconnu coupable de génocide.