Le chef du gouvernement conservateur espagnol sortant Mariano Rajoy a été malmené mercredi par une majorité de partis à la chambre des députés, qui ont jugé honteux que l'Espagne n'ait accueilli que 18 réfugiés depuis le début de la crise.
Sur les "millions de personnes déplacées fuyant la mort et la barbarie, votre gouvernement ne s'est montré capable d'accueillir que 18 êtres humains, c'est une véritable honte", a déclaré Pedro Sanchez, secrétaire général du Parti socialiste, après avoir écouté le compte rendu de Mariano Rajoy.
"Votre gouvernement a fait honte à toute l'Espagne", a-t-il dit.
Le gouvernement de Mariano Rajoy, qui expédie les affaires courantes depuis les élections législatives du 20 décembre, s'était engagé, en 2015, à admettre en Espagne quelque 16.000 réfugiés en provenance de Grèce et d'Italie.
Mais il n'a effectivement admis que 18 personnes depuis l'été 2015, assurant qu'il attendait la mise en place de procédures d'identification, un processus "très lent", a reconnu M. Rajoy.
Le processus européen de relocalisation des réfugiés, censé en répartir 63.300 dans l'UE sous deux ans, n'a concerné jusqu'à présent que 581 personnes.
Ne disposant plus de la majorité au parlement, M. Rajoy était parvenu à un consensus entre les quatre grandes forces politiques en Espagne (son Parti populaire, les socialistes, le parti de gauche radicale Podemos, et les centristes de Ciudadanos) avant le conseil européen qui a adopté l'accord avec la Turquie sur le rapatriement des réfugiés. Toute l'opposition lui a reproché d'avoir trop cédé à Bruxelles.
"L'accord avec la Turquie, il faut le dire clairement, est une honte", a lancé Pablo Iglesias, chef de Podemos, affirmant qu'il tourne le dos "à des millions de personnes qui fuient le terrorisme et les bombes (...) d'une même intensité que ce qu'ont souffert Paris et Bruxelles. Ces personnes ne valent pas moins que les Européens", a-t-il dit.
L'accord controversé avec Ankara prévoit le retour en Turquie de tous les migrants entrés illégalement en Grèce depuis le 20 mars. Il stipule également que pour chaque Syrien renvoyé de Grèce, un autre sera admis dans l'UE, dans le cadre d'un plan limité à 72.000 places.
"Le consensus exigeait (...) qu'il s'oppose à tout système permettant directement ou indirectement des expulsions collectives" a déclaré M. Sanchez.
Vivre en Europe "implique aussi d'être solidaires avec ceux qui fuient la guerre", a insisté à son tour le chef de Ciudadanos Albert Rivera.
Le dirigeant de Izquierda Unida (Gauche unitaire, écolo-communiste) Alberto Garzon a de son côté annoncé le dépôt jeudi d'une "plainte pour crimes contre l'humanité" contre M. Rajoy, pour sa politique en matière de réfugiés.