La semaine de la justice transitionnelle : Bensouda répond à ses critiques sur JusticeInfo.net

La semaine de la justice transitionnelle : Bensouda répond à ses critiques sur JusticeInfo.net©ICC/CPI
Fatou Bensouda
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Interviewer Fatou Bensouda dans le domaine de la justice transitionnelle, c’est comme parler avec Glenn Gould pour un pianiste ou avec Lionel Messi dans le foot-ball. C’est ainsi que Pierre Hazan, conseiller éditorial de JusticeInfo.net a rencontré à Genève la procureure de la Cour Pénale internationale Fatou Bensouda qui a reconnu avoir l’un des jobs les plus durs au monde. Critiquée à la fois pour en faire trop notamment en Afrique et pour ne pas en faire pas dans le reste du monde quand il s’agit des puissants du Nord.

L’ancienne avocate et ministre gambienne a répondu point par point à ces mises en cause. Africaine, elle s’est défendue de ne cibler que des Africains. « La CPI n’a pas couru derrière l’Afrique. C’est l’opposé qui s’est passé » , a-t-elle souligné rappelant que cinq pays du continent ont demandé à la Cour Pénale d’intervenir.

Avocate de son tribunal, Fatou Bensouda explique : « Personne ne doit être au-dessus de la loi, pas plus les présidents que les chefs des milices. Le plus souvent, aucune juridiction ne peut les juger dans leur pays, c’est pourquoi la CPI a été créée : pour juger des personnes autrement hors d’atteinte ». (A noter que cette interview a été filmée par notre équipe et est diffusée dans une vidéo éditée sur le site.)

Autre dimension de la justice transitionnelle et des processus de mémoire et de réparations, la place des femmes notamment en Tunisie. Malgrè les tabous, les victimes sont venues en nombre témoigner devant l’Instance Vérité et Justice. Les femmes opposantes ou épouses ou sœurs d’opposants étaient ainsi deux fois victimes : du régime et de la société qui les condamnaient, explique notre correspondante Olfa Belhassine.

Ibtihel Abdellatif, présidente du Comité femme à la commission vérité explique : « Nous savons que les tabous qui pèsent sur les femmes dans notre société patriarcale ont la vie dure. L’héritage social est très lourd. Pour cela, nous entourons les dépositions des femmes et leur audience privée de l’anonymat et de toutes les garanties susceptibles de les rassurer. La confidentialité de leur dossier fait partie de nos priorités. Leur témoignage est recueilli par une femme, et à leur demande par un homme, dans le cas ou leur bourreau s’avère de sexe féminin ».

Ces mêmes tabous persistent au Mali où la société civile dénonce les lenteurs des processus de justice transitionnelle en raison de l’absence d’une claire volonté politique de confronter le passé. A ces facteurs s’ajoute la pression d’une société très croyante qui prèche le pardon et le refoulement.

Comme l’écrit le correspondant de JusticeInfo.net à Bamako Bruno Djito Segbedji : « l'évocation d'une infraction touchant au sexe est tabou. il est quasiment impossible aux femmes violées, encore marquées par le traumatisme, de raconter leur calvaire. » Les mêmes tabous bloquent les témoignages d’hommes victimes de violences sexuelles pendant un coup d’état en 2012 :  « Des policiers et militaires détenus au Groupement mobile de sécurité (GMS) de Bamako avaient été contraints, armes pointées sur eux, à se déshabiller et à se sodomiser à plusieurs reprises », écrit le correspondant citant un rapport d’Amnesty International.

Dans d’autres pays, la justice transitionnelle tente malgrè ces écueils et remous d’aller de l’avant. Ainsi, en République centrafricaine, Faustin-Archange Touadera le Président nouvellement élu a défini comme priorité de son mandat le désarmement des groupes armées et la reconstruction d’une armée régulière réputée jusqu’à aujourd’hui pour ses tendances putschistes et ses violations des droits de la population qu’elle était censée protéger. « Soulignant que la Centrafrique « doit sortir de ce cycle qui la projette aux yeux du monde comme un pays instable, incapable durant des décennies de prendre en main sa sécurité et celles de ses populations », Touadera a instamment demandé aux commandants militaires de faire leur travail « avec discernement, avec compétence, avec sang-froid, avec courage », car ils sont responsables de « l'armée d'un pays qui veut reconquérir tous ses attributs », écrit ainsi Ephrem Rugiririza de JusticeInfo.net.

 En Mauritanie pays avec le taux d’esclavage le plus élevé au monde, «un certain nombre de décisions fait espérer un réel revirement de situation pour les esclaves. Emprisonnés depuis seize mois, deux militants antiesclavagistes ont ainsi été libérés le 17 mai sur décision de la Cour Suprême. », écrit JusticeInfo.netLa journaliste de JusticeInfo.net Vony Rambolamanana   explique : « l’esclavage est enraciné en Mauritanie et constitue l’un des ressorts de la domination politique et sociétale de la communauté Baydan, à laquelle appartient le Président et dont son pouvoir est largement tributaire ».