La société civile peut aussi s’approprier la justice transitionnelle. Ainsi en Tunisie, où le mouvement Manich Msamah, littéralement « Je ne pardonnerai pas » s’oppose au projet de loi sur la réconciliation économique qui de fait absout les responsables économiques corrompus et affairistes de l’ancien régime. Leur espace d’intervention : la rue. Leurs armes : les réseaux sociaux.
Olfa Belhassine, la correspondante de JusticeInfo.net en Tunisie décrit : « une page Facebook regroupant des juristes, des enseignants, des étudiants et des diplômés chômeurs, dont la moyenne d’âge est de 25 ans ».
Olfa Belhassine ajoute : “Portés par le goût du politique, mais aussi de l’irrévérence et de l’indépendance par rapport au pouvoir, les jeunes de Manich Msamah travaillent dans une dynamique horizontale. L’humour, la caricature et le sarcasme, sont les outils de prédilection qu’ils utilisent sans modération pendant les campagnes qu’ils mènent sur les réseaux sociaux pour expliquer les dérives du projet de loi relatif à la réconciliation économique et financière.”
Ce projet porté par le Président lui-même Béji Caied Essebssi devrait être voté après le ramadan par la chambre des députés mais Manich Msamah a relancé la contestation de cette loi d’amnistie un peu trop généreuse pour être honnête.
Autre point fort de cette semaine, une conférence à la Haye sur ce que la directrice de l’UNESCO et candidate à la succession du secrétaire général de l’ONU Irina Bokova a appelé « le nettoyage culturel ». La diplomate bulgare explique : « En Syrie, en Irak, en Afghanistan au Mali et ailleurs, la destruction du patrimoine mondial n’est pas « un dommage collatéral » mais « une tactique de guerre ».
A compter du 22 août, la Cour Pénale Internationale tiendra ainsi son premier procès pour juger de la destruction des Mausolées de Tombouctou assimilé à un crime de guerre. L’accusé est un touareg malien Ahmed Al Faqi Al Mahdi, dit Abou Tourab, ancien chef de la Hesbah, la brigade des mœurs de Tombouctou lors de l’occupation du nord du Mali, entre avril 2012 et janvier 2013 par des milices islamistes.
Preuve enfin que l’impunité n’est plus éternelle. Le jugement par une Cour française qui a redonné espoir aux proches des victimes que les présumés coupables du massacre du Beach devront un jour rendre des comptes. Ces disparus du Beach, ce sont 353 personnes retenues et transférées dans des camps au port fluvial – dit le Beach − en 1999 par des militaires de la République du Congo. Aucun n’est revenu de ces camps.
Le 3 juin, la justice française s’est déclarée compétente pour juger le général Norbert Dabira, inspecteur général des forces armées congolaises au moment des faits, − ce dernier possédant une résidence en région parisienne. Dabira avait été blanchi par la justice congolaise après une parodie de procès. Les associations de victimes ont aussi porté plainte contre le chef de l’Etat lui-même président de la République du Congo Denis Sassou-Nguesso. Lui aussi désormais menacé d’être poursuivi.