L'Union africaine a de nouveau critiqué la CPI mercredi pour l'attention jugée excessive portée à ce continent, et demandé devant les Etats membres de la Cour réunis à La Haye que les poursuites contre le vice-président kényan soient abandonnées.
"Nous sommes arrivés à la conclusion que la CPI, dont la mise en place était fortement soutenue par l'Afrique (...) n'est plus un tribunal pour tous", a affirmé le ministre éthiopien des Affaires étrangères Tedros Adhamon Ghebreyesus.
Il s'exprimait au nom de l'Union africaine lors de la 14e session de l'Assemblée des Etat parties, l'organe législatif de la Cour regroupant les 123 Etats ayant ratifié le Statut de Rome, traité fondateur de la Cour pénale internationale.
L'Union africaine, menée en particulier par le Kenya, a déjà accusé la cour, à de nombreuses reprises, de cibler les Africains de manière excessive: toutes les enquêtes de la CPI se situent en effet sur ce continent, tout comme une majorité des examens préliminaires, étape préalable à l'ouverture d'une enquête.
Cela inclut notamment les poursuites contre le président kényan Uhuru Kenyatta et un procès en cours contre son vice-président William Ruto.
Les deux hommes sont soupçonnés de crimes contre l'humanité pour leurs rôles présumés dans les violences post-électorales de fin 2007-début 2008, qui avaient fait plus de 1.000 morts et 600.000 déplacés
La procureure de la CPI Fatou Bensouda avait abandonné les charges contre M. Kenyatta en décembre. Les procédures avaient été marquées par des accusations d'intimidations de témoins, de corruption et de faux témoignages.
Le Kenya veut désormais mettre à l'agenda de l'Assemblée l'utilisation par le procureur d'"anciens témoignages", soit les déclarations des témoins recueillies par son équipe avant que ceux-ci "ne succombent aux influences irrégulières".
"Nous estimons que les juges ont agi en dehors de leurs compétences en admettant les preuves retirées dans cette affaire", a affirmé à l'AFP la ministre kényane de la Justice, Amina Mohamed. "Ces affaires n'auraient jamais dû débuter devant la Cour, elles auraient dû être gérées au niveau régional et national".
Dans un entretien à l'AFP, la procureure Fatou Bensouda a assuré qu'il n'y avait "aucune volonté politique" au Kenya pour faire parvenir ces dossiers devant la justice.
Mme Bensouda a rappellé qu'à part les dossiers au Kenya, au Soudan et en Lybie, "les dossiers ont été initiés à la demande des Etats africains".